Vidéo Au Rwanda, un "village de la réconciliation" où cohabitent les rescapés du génocide et les assassins de leur famille

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Au Rwanda, un "village de la réconciliation" où cohabitent les rescapés du génocide et les assassins de leur famille
Au Rwanda, un "village de la réconciliation" où cohabitent les rescapés du génocide et les assassins de leur famille Au Rwanda, un "village de la réconciliation" où cohabitent les rescapés du génocide et les assassins de leur famille (ENVOYÉ SPÉCIAL / FRANCE 2)
Article rédigé par France 2
France Télévisions
A une heure de la capitale rwandaise Kigali, c'est un lieu que rien ne semble distinguer des autres villages de la région. Pourtant, à Mbyo, dans un "quartier de la réconciliation", les rescapés des massacres de 1994 cohabitent avec les anciens génocidaires. Ils ont parfois pour voisin le bourreau de leur famille.

C'est dans la tête d'un pasteur que cette idée folle a germé, dix ans après le génocide au Rwanda. En trois mois, du début avril jusqu'à mi-juillet 1994, les massacres perpétrés par les Hutus ont fait 800 000 morts tutsis dans tout le pays. Etienne Gahigi, lui-même survivant du génocide, a ressenti le besoin de rapprocher ces Rwandais que tout oppose. Pour leur "permettre de vivre à nouveau en harmonie", il a imaginé de les faire cohabiter dans un "quartier de la réconciliation".

Dans le village de Mbyo, situé à une heure de route de la capitale Kigali, le pasteur désigne une maison qui appartient à un ancien génocidaire. Celle d'à côté a été attribuée à un rescapé, explique-t-il aux journalistes d'"Envoyé spécial" : "En étant voisins, les gens peuvent de nouveau discuter ensemble. Et à terme, se réconcilier."

"C'est comme ça que le quartier a été imaginé : d'un côté une maison de survivant, de l'autre celle d'un bourreau."

Etienne Gahigi, pasteur

dans "Envoyé spécial"

Le quartier a été construit avec l'aide d'une ONG chrétienne, Prison Fellowship Rwanda, mais Etienne Gahigi assure qu'aucune conversion n'a été exigée pour habiter ici, et que "chacun dans ce village est libre de croire en ce qu'il veut". Une seule obligation : travailler à la réconciliation. "Pour les génocidaires, nous avions posé une condition : qu'ils reconnaissent leurs crimes et demandent pardon. Pour les rescapés, l'idée, c'était qu'ils retrouvent un toit et une vie normale, parce qu'ils n'avaient plus rien. La réconciliation, c'est essentiel pour réussir à se tourner vers l'avenir." 

Politique de réconciliation nationale

Si pour le pasteur, le pardon est une exigence chrétienne, pour le gouvernement, la réconciliation est un objectif affiché dès la fin des tueries pour reconstruire le pays et réinsérer leurs auteurs. Les insultes à caractère ethnique ont été interdites, sous peine de prison. La mention "hutu" ou "tutsi" n'apparaît plus sur les cartes d'identité. Les génocidaires repentis ont vu la durée de leur détention raccourcie.

A Mbyo, le quartier de la réconciliation s'est construit peu à peu. De quinze maisons au départ, il est passé à 54 aujourd'hui. Environ 400 personnes vivent ici, dont le pasteur lui-même. Pour mieux "convaincre les autres d'accorder leur pardon", il donne l'exemple en habitant le même village que l'homme qui a assassiné sa belle-sœur et ses cinq enfants. Et en saluant chaleureusement celui qui a "longtemps été [s]on ennemi" et que maintenant, il "considère comme un frère".

Extrait de "Rwanda : le miracle de la réconciliation", un reportage à voir dans "Envoyé spécial" le 28 mars 2024.

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