Vidéo "Je me sentais un peu comme un menteur" : le policier condamné pour violences conjugales qui avait reçu Chahinez Daoud avant son féminicide s'exprime dans "Complément d'enquête"

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"Je me sentais un peu comme un menteur" : le policier condamné pour violences conjugales qui avait reçu Chahinez Daoud avant son féminicide s'exprime dans "Complément d'enquête"
"Je me sentais un peu comme un menteur" : le policier condamné pour violences conjugales qui avait reçu Chahinez Daoud avant son féminicide s'exprime dans "Complément d'enquête" "Je me sentais un peu comme un menteur" : le policier condamné pour violences conjugales qui avait reçu Chahinez Daoud avant son féminicide s'exprime dans "Complément d'enquête" (COMPLÉMENT D'ENQUÊTE/FRANCE 2)
Article rédigé par France 2
France Télévisions
"L'électrochoc de Mérignac", c'est le scandale qui a décidé le ministre de l'Intérieur à annoncer, en août 2021, des mesures sans précédent : quelques semaines avant son féminicide, la plainte de Chahinez Daoud avait été traitée par un policier lui-même condamné pour violences conjugales. Dans cet extrait de "Complément d'enquête", il donne sa version des faits.

Chahinez Daoud est morte le 4 mai 2021. Elle a été brûlée vive devant chez elle par son ex-mari, précédemment condamné pour des violences à son encontre. Moins de deux mois avant ce féminicide, le 15 mars, la jeune femme était allée porter plainte au commissariat de Mérignac (Gironde). Sans savoir que le policier qui allait prendre sa déposition venait d'être lui-même condamné à huit mois de prison avec sursis pour violences conjugales…

Ce fonctionnaire pouvait-il faire son travail en toute objectivité, malgré sa condamnation ?

Dans un document diffusé le 23 novembre, les journalistes de "Complément d'enquête" ont pu retrouver cet ancien policier, aujourd'hui radié. C'est la première fois qu'il s'exprime sur cette affaire. S'il affirme n'avoir "rien à [s]e reprocher" concernant le recueil de la plainte, sa responsabilité a pourtant été établie par l'Inspection générale de l'administration et l’inspection générale de la justice. Cinq de ses collègues, enquêteurs et hauts gradés, ont aussi été sanctionnés. 

C'est ce policier qui reçoit Chahinez Daoud quand elle vient déposer plainte, et il va être le premier maillon d'une chaîne de défaillances. Questions laissées sans réponse sur les formulaires destinés à déterminer les risques encourus par la victime, incohérences et contradictions d'un document à l'autre... des erreurs qui ont pu empêcher d'évaluer correctement le danger encouru par la jeune femme. D'autant que ce n'est pas la seule qui est reprochée au policier : deux semaines plus tard, il expulse sans même prendre son identité l'ex-mari de la plaignante (recherché par la police) alors qu'il fait un esclandre au commissariat, où il est venu signaler des problèmes de garde d'enfants… Le rapport de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale) a conclu à "une négligence professionnelle" de la part du gardien de la paix. 

"C'est bizarre de prendre les plaintes des gens qui se sont fait frapper quand on est soi-même auteur [de violences]..."

Le policier qui avait reçu Chahinez Daoud dit avoir fait part de son malaise à sa hiérarchie

Lors de cette rencontre avec lui, les journalistes ont abordé sa condamnation pour violences conjugales. Revenant sur les violences commises sur son ancienne compagne, l'ancien policier, qui dit avoir alors "dégoupillé" sous l'effet des antidépresseurs et de l'alcool, affirme être suivi depuis par une psychiatre. Était-il à sa place à ce poste ? Il assure en tout cas avoir alerté sa hiérarchie sur le malaise qu'il ressentait à "prendre des plaintes des gens qui se sont fait frapper" tout en étant lui-même auteur de violences. "C'est comme ça, tu me fais pas chier", lui aurait répondu sa supérieure.  

Serait-ce une tempête médiatique qui a finalement décidé l'institution à agir ? Le 21 juillet 2021, Le Canard enchaîné révèle l'affaire au grand public sous un titre ironique : "Enquêteur sur mesure pour féminicide", soulevant une vague d'indignation. Deux jours après la publication de l'article, le fonctionnaire est suspendu… soit plus de six mois après son jugement, et trois mois et demi après la mort de la jeune femme. Quelques jours plus tard, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin annonce  cette mesure sans précédent : tout policier condamné pour violences conjugales et en attente d’une décision du conseil de discipline devra être écarté du contact avec le public. 

Extrait de "Violences conjugales : quand l'agresseur porte l'uniforme", un document diffusé dans "Complément d'enquête" le 23 novembre 2023.

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