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Qui sont les perdants et les gagnants de la bataille de l'UMP ?

Malgré l'accord signé entre Copé et Fillon, l'UMP sort affaiblie de sa longue crise interne. Qui a laissé le plus de plumes ? A qui a profité la bataille ? Francetv info compte les points.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
De g. à dr., Jean-Pierre Raffarin, Jean-François Copé, François Fillon et Bernard Accoyer, le 26 mai 2012, lors d'une réunion de l'UMP à Paris. (WITT / SIPA)

La crise aura duré un mois. Quatre semaines de contestations, d'invectives, d'annonces, de démentis, d'ultimatums, de tentatives de conciliation et de coups bas entre deux camps irréconciliables après l'élection à la présidence de l'UMP. L'accord signé lundi 17 décembre entre Jean-François Copé et François Fillon – un nouveau vote en septembre 2013 – a le mérite d'éteindre temporairement l'incendie.

Le bilan de ces trente jours n'en demeure pas moins catastrophique pour le parti, première victime de cette crise. Il n'est guère plus réjouissant pour ses acteurs principaux, qui en sortent presque tous affaiblis. Qui y a laissé le plus de plumes ? A qui a profité cette bataille ? Francetv info compte les points.

Jean-François Copé : les limites de la "bunkerisation"

Ce qu'il a perdu. Réfugié derrière des statuts désuets et des commissions internes à l'impartialité contestée, Jean-François Copé a tout misé sur un pourrissement de la situation. Sa stratégie : s'accrocher à son poste en espérant que la lassitude de ses adversaires entame leur envie d'en découdre.

Il a échoué, mais l'intransigeance qu'il a déployée pendant cette crise, bunkerisé au siège du parti, lui coûte déjà très cher. Le député-maire de Meaux dégringole dans les sondages, battant des records d'impopularité. En acceptant d'organiser un nouveau vote en 2013, il effectue de fait sa première concession d'importance. Après tant de rigidité, elle ne peut apparaître que comme une forme d'aveu : celui de n'avoir pas obtenu dans les urnes la légitimité dont il se prévaut.

Pourquoi il sauve les meubles. L'épisode aura conforté l'image d'un Jean-François Copé sûr de lui, déterminé, prêt à tout pour arriver à ses fins. Un argument non négligeable dans la perspective de la primaire qui désignera en 2016 le candidat de l'UMP à l'élection présidentielle de 2017.

François Fillon : de concessions en concessions

Ce qu'il a perdu. Il pensait l'emporter haut la main. Mais le 18 novembre au soir, il se retrouve à égalité avec son rival. Ce soir-là, l'ancien Premier ministre est tombé de haut. Puis vint le moment de la contestation. S'il a très vite renoncé à revendiquer la victoire, François Fillon a réclamé pendant longtemps un nouveau vote "en décembre ou janvier". Puis ses soutiens ont plaidé pour "le printemps 2013".

En créant son groupe parlementaire dissident, il a abattu l'une de ses dernières cartes. Sans faire plier Copé. Privé de moyen de pression, il doit se contenter de la date finalement proposée par son rival. Se présentera-t-il lors de ce nouveau scrutin ? "Probablement pas", a-t-il déclaré il y a quelques jours. Pour celui qui, il y a un mois, prétendait prendre les rênes de l'UMP, c'est un échec cuisant.

Pourquoi il sauve les meubles. "Peu courageux", "isolé", "planqué"... Pendant toute la campagne interne, les copéistes ont affublé l'ex-Premier ministre d'adjectifs pas toujours élégants. Mais après le 18 novembre, François Fillon les a fait mentir. Il s'est montré pugnace et déterminé à obtenir un nouveau vote.

Nicolas Sarkozy : une autorité écornée

Ce qu'il a perdu. Après être intervenu plus ou moins discrètement pour forcer les deux prétendants à s'accorder, Nicolas Sarkozy peut tirer une première conclusion : ce n'est pas grâce à lui qu'un compromis a été trouvé entre François Fillon et Jean-François Copé.

Ses menaces (publier un communiqué les disqualifiant tous les deux, etc.) n'ont eu qu'un effet très relatif. Le duel au sommet du parti l'a en tout cas obligé à intervenir, dévoilant ainsi une partie de son jeu en vue de 2017. Désormais, tout un chacun sait que Nicolas Sarkozy s'intéresse de très près sa famille politique. Fillon et Copé savent à quoi s'en tenir. Et feront tout pour empêcher son retour.

Pourquoi il peut encore espérer. Avec ce possible accord, l'UMP devrait échapper à l'implosion tant redoutée par Nicolas Sarkozy. Avec un peu de chance, ni François Fillon ni Jean-François Copé ne parviendront à prendre l'ascendant, et l'ex-chef de l'Etat pourra revenir en sauveur en 2016 ou 2017.

Les "non-alignés" : des pacificateurs de retour dans la course ?

Ce qu'ils ont gagné. Leurs multiples pressions ont fini par payer. En ne prenant parti ni pour l'un ni pour l'autre, Nathalie Kosciusko-Morizet, Bruno Le Maire et quelques autres ont pu rester en marge de la bataille. Et même jouer les pompiers de service. Lors de la prochaine élection, le nombre de parrainages nécessaires pour se présenter devrait être abaissé, ce qui pourrait leur permettre de se lancer dans la course. Une bonne carte à jouer pour ces "pacificateurs" en mal de visibilité.

Pourquoi leur victoire n'est pas totale. La crise à l'UMP leur a offert une exposition médiatique inattendue. Mais septembre 2013, c'est loin. Seront-ils aussi indispensables dans neuf mois ?

Les seconds couteaux : la prime aux plus habiles

Eux aussi ont gagné en notoriété. Quasi inconnus du grand public avant le 18 novembre, des lieutenants comme Michèle Tabarot (pro-Copé) ou Jérôme Chartier (pro-Fillon) sont subitement apparus en boucle sur les chaînes de télévision, pour défendre leur mentor.

A l'intérieur de chaque camp, d'autres ont subtilement dévié de la ligne du chef. C'est le cas des copéistes Luc Chatel, Christian Jacob et Jean-Pierre Raffarin, qui semblent avoir convaincu Jean-François Copé d'accepter un nouveau scrutin. Dans le camp Fillon, l'ancien président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, a refusé de rejoindre le groupe filloniste RUMP, avant d'organiser un référendum des parlementaires, qui devait initialement se tenir ce mardi, sur une nouvelle élection. Une initiative qui a contribué à débloquer la situation. Ces élus joueront sans doute un rôle incontournable dans la longue phase de reconstruction que s'apprête à vivre le parti.

L'UMP, grande perdante

Evidemment, le parti sort affaibli de cette crise inédite. Et le voilà qui replonge dans une campagne interne de neuf mois. Ses dirigeants auraient tort de donner plus d'importance qu'elles n'en ont aux trois élections partielles du dimanche 16 décembre 2012, qui ont vu la droite s'imposer largement contre les candidats de gauche, victimes d'une abstention massive. S'il veut gagner en 2017, le candidat de l'UMP aura besoin d'un parti fort et uni.

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