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Assemblée nationale : on vous résume la bataille de chiffonniers autour de la tenue "débraillée" et des cravates des députés de gauche

Après qu'un élu a accusé la gauche d'apparaître "sale", certains députés ont réclamé l'obligation du port de la cravate. A gauche, on réclame plutôt l'interdiction des costumes "qui coûtent plus d'un smic".

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le député LFI Louis Boyard s'exprime à l'Assemblée nationale, à Paris, le 18 juillet 2022. (STEPHANE MOUCHMOUCHE / HANS LUCAS / AFP)

Quel code vestimentaire pour les députés ? Au milieu des débats sur le pouvoir d'achat, la question s'est invitée à l'Assemblée nationale, jeudi 21 et vendredi 22 juillet, après que le président de la région Sud, Renaud Muselier, s'en est pris à la tenue "débraillée" de certains élus de gauche. Dans son sillage, des responsables politiques de droite ont appelé à durcir le règlement de l'Assemblée nationale. Un élu de gauche a, lui, tenté de rhabiller ses opposants pour l'été en demandant l'interdiction des tenues "aux prix indécents". On vous raconte en six actes cette polémique riche en effets de manche.

Acte 1 : Muselier critique "la gauche débraillée"

Ancien cadre de LR, désormais soutien d'Emmanuel, Renaud Muselier a critiqué, jeudi, sur BFMTV, la gauche "débraillée, sale, qui hurle, qui crie partout" à l'Assemblée nationale. Le président de la région Paca a évoqué "un problème de comportement" des élus de la Nupes. "Vous représentez au Parlement français la République, (...) vous avez une charge, vous n'êtes pas dans une cour de récréation", a-t-il ajouté.

Acte 2 : la Nupes dénonce un "mépris de classe"

"Le mépris de classe suinte jusque dans le temple de la République", a réagi, jeudi, le député "insoumis" Antoine Léaument, dénonçant les "propos indignes" de Renaud Muselier. "Comme quoi on peut porter une cravate et tenir des propos indignes et irrespectueux", a abondé sa collègue Alma Dufour.

"Nous avons été élus pour représenter le peuple et défendre ses intérêts. Pas pour se payer des costumes à 3000 euros."

Alma Dufour, députée LFI de la Seine-Maritime

sur Twitter

Le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a, lui aussi, déploré "ce mépris" et "cette condescendance". "On n'était pas sale quand on a appelé à faire barrage à l'extrême droite en faisant voter pour monsieur Muselier", a ajouté le député Génération.s Benjamin Lucas, sur Europe 1.

Acte 3 : Ciotti réclame la cravate obligatoire

Jeudi après-midi, le député LR Eric Ciotti a apporté son soutien à Renaud Muselier. Dans un courrier adressé à la présidente de l'Assemblée, l'élu des Alpes-Maritimes a demandé "l'obligation du port de la cravate pour les hommes" dans l'hémicycle. Selon lui, "un nombre de plus en plus important de députés, notamment de LFI" se laisse aller à "une forme de relâchement vestimentaire et comportemental".

"Cette question est loin d'être anodine", estime Eric Ciotti. Il voit dans le port du costume et de la cravate une "marque de respect due à nos institutions et à nos compatriotes" et un moyen "d'unifier visuellement la représentation nationale" pour se concentrer sur les débats de fond. A ce jour, rappelle-t-il, le règlement de l'Assemblée prévoit que la tenue des députés doit "s'apparenter à une tenue de ville".

Acte 4 : le RN dénonce les tenues de "plage" des élus de la Nupes

"Porter la cravate, ça ne me paraît pas aberrant", a réagi, vendredi, sur franceinfo, la porte-parole du groupe RN à l'Assemblée nationale, Laure Lavalette, à propos de la proposition d'Eric Ciotti. Selon elle, les députés de la coalition de gauche "viennent là comme ils pourraient aller à la plage", en violation de "l'esprit de l'institution".

"Nous sommes dans une institution qui est belle, nous sommes dans des locaux magnifiques. Comme nous ne sommes pas d'extrême gauche, comme nous ne sommes pas islamo-gauchistes, nous respectons l'institution", a ajouté l'élue du Var, ancienne porte-parole de la campagne présidentielle de Marine Le Pen.

Acte 5 : un élu "insoumis" veut faire interdire les costumes trop chers

Pastichant le courrier adressé par Eric Ciotti à la présidence du palais Bourbon, le député LFI du Val-de-Marne Louis Boyard a demandé, vendredi, "une interdiction des costumes aux prix indécents". Selon l'élu de 21 ans, "un nombre de plus en plus important de députés, en particulier chez LREM, LR et RN" se laisse aller à "une forme d'arrogance vestimentaire et comportementale".

"Cette question est loin d'être anodine", poursuit Louis Boyard. Il voit dans le port de costumes "à des prix exorbitants" un "luxe indécent au regard de l'explosion de la pauvreté dans notre pays""Cela bien sûr contribue à accroître le ressenti dans la population de parlementaires éloignés de la réalité du quotidien des Français", ajoute l'élu "insoumis".

Acte 6 : les députés LFI jugent "anachroniques" les recommandations d'Eric Ciotti

Vendredi après-midi, les députés LFI ont fini par écrire à la présidence de l'Assemblée nationale. Dans ce courrier, signé par leur chef de file Mathide Panot, ils jugent "anachroniques" les recommandations d'Eric Ciotti. Ils rappellent que "les députés doivent être à l'image du peuple, à ses espoirs et ses indignations, et non s'en marginaliser". "Aimer la République et la représentation parlementaire, c'est veiller à ce que ceux qui ont l'honneur d'être parlementaires ressemblent au peuple", insistent-ils.

Pour LFI, en 2022, "le port de la cravate, n'est plus une tenue de ville courante", mais au contraire "la marque vestimentaire d'une catégorie sociale très particulière, généralement les hommes les plus aisés", même si "des Français, plus modestes, la portent encore par goût ou par obligation". Ils concluent leur lettre ainsi : "L'habit ne fait pas le député". 

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