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Obama en Afrique : CNN qualifie le Kenya de "foyer de terreur" et provoque l'indignation nationale

Jeudi soir, à la veille de la première visite officielle du président Barack Obama au Kenya, CNN a qualifié le pays de "foyer de terreur". Une formule qui a déchaîné la colère des internautes kényans sur Twitter et provoqué l'indignation des autorités kényanes.
Article rédigé par Leticia Farine
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Un immense poster affiché devant l'aéroport International de Nairobi souhaite la bienvenue (Karibu) au président Barack Obama. © CHINE NOUVELLE/SIPA)

Le retour du premier président noir des Etats-Unis sur la terre de ses ancêtres, c’est un peu, voire beaucoup, comme le retour de l’enfant prodige. Cela fait des semaines que les médias kényans ne cessent d’en parler, avec une impatience et une fierté tangibles. Mais, à la veille de cette première visite officielle de Barack Obama dans la patrie natale de son père, la chaîne américaine CNN a qualifié sur son antenne le pays de "foyer de terreur". Une formule martelée à plusieurs reprises dans ses bulletins d’informations dans la soirée de jeudi, pour illustrer le poids de la menace des islamistes terroristes somaliens Shebab, qui avaient attaqué l’Université de Garissa en avril dernier, faisant au moins 148 morts et 79 blessés.

 

Indignés, les internautes kényans n’ont pas tardé à réagir sur les réseaux sociaux et notamment sur Twitter. Par le biais du mot-clef #SomeoneTellCNN , c’est-à-dire "Que quelqu’un dise à CNN ", ils se sont mobilisés pour dénoncer la formule injustement stigmatisante et montrer leur pays sous un jour plus positif, s'attirant le soutien de la Twittosphère. Certains ont même rebaptisé CNN (Cable News Network ), l'appelant "Chanel of Nonstop Nonsense" , soit "Chaîne de bêtises en continu ". 

"Que quelqu'un dise à CNN, que la chaîne est devenue un foyer de sensationalisme et de désinformation ", clame un internaute.

Le businessman et millionnaire kényan Chris Kirubi s'est insurgé, affirmant : "A moins que vous soyez ceux qui apportent la terreur, nous sommes un foyer d'investissements, d'opportunités et de gens formidables ". 

Un autre internaute a publié une photo du coureur Nixon Kiplimo Chepseba, vainqueur en 2011 de la Ligue de diamant, avant de déclarer avec ironie :  "CNN avait raison. Quand un comportement comme celui ci reste impuni, un lieu devrait être qualifié de foyer de terreur ". 

De nombreux clichés de Nairobi, la capitale du Kenya, ont également été à l'honneur sur Twitter, pour déconstruire l'image partiale d'un territoire gangréné par la guerre et les violences, véhiculée par la formule employée par CNN. 

En l’espace de quelques heures, le hashtag avait été utilisé plus de 17.000 fois, se plaçant dans la liste des mots-clefs les plus utilisés du réseau social. Preuve de l’ampleur du mouvement : la chaîne américaine a changé la titraille environ six heures après le premier tweet. "Le voyage d’Obama soulève des préoccupations en matière de sécurité ", a-t-elle alors écrit. Une modification qui, il faut bien l’avouer, n’a absolument rien d’une nuance, comme ont pu l’affirmer avec indifférence quelques observateurs. 

"La terreur est totalement aveugle, elle touche tout le monde, partout"

Dans une interview accordée à la chaîne kényane Capital FM News jeudi, la ministre des Affaires étrangères, Amina Mohamed, a tenu à rappeler que "la terreur n’est pas uniquement au Kenya, c’est un phénomène mondial, il nous touche tous ". "Nous avons eu New York, Boston, Paris, Londres, Madrid, la Russie environ trois ou quatre fois dans différents endroits du pays… Donc ce n’est pas uniquement au Kenya. Nous ne revendiquons aucun droit de propriété sur le terrorisme. Si quelqu’un souhaite nous en attribuer un, il se trompe ", a-t-elle affirmé avec calme.

"La terreur ne connaît pas de limites, elle ne reconnaît pas de nationalité, elle est totalement aveugle et elle touche tout le monde, partout ."

Après avoir évoqué les exemples des récentes attaques au Tchad, en Somalie ou encore en Tunisie, Amina Mohamed a conclu avec philosophie : "La leçon que nous devons retenir de tout cela, c’est qu’il faut se rassembler. Nous devons marcher ensemble. Nous devons partager toutes nos ressources et tout ce que nous avons, pour nous assurer que nous combattons le terrorisme ensemble. Car personne ne sait, où il frappera ensuite ."

Barack Obama est attendu vendredi soir au Kenya pour une visite officielle symbolique et historique de trois jours. Il assistera notamment à la sixième édition du Sommet mondial des entrepreneurs, forum économique annuel organisé par la Maison-Blanche. Le dispositif de sécurité qui sera déployé autour du président américain est impressionnant, avec la mobilisation de plus de 10.000 policiers, qui paralysent d’ors et déjà la ville de Nairobi, où les déplacements des Kényans relèvent du parcours du combattant.

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