François Bayrou relaxé dans l'affaire des assistants parlementaires européens du MoDem, son parti condamné

Le tribunal de Paris a prononcé des peines contre la majorité des cadres et élus du parti centriste qui étaient poursuivis. Le maire de Pau n'est pas condamné "au bénéfice du doute".
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le président du MoDem, François Bayrou, arrive au tribunal judiciaire des Batignolles, à Paris, le 5 février 2024. (MIGUEL MEDINA / AFP)

La décision était lourde d'enjeux pour son avenir politique. François Bayrou a été relaxé "au bénéfice du doute", faute de preuves, dans l'affaire des assistants parlementaires du MoDem, lundi 5 février, par le tribunal correctionnel de Paris. Le président du parti centriste avait comparu du 16 octobre au 21 novembre pour "complicité de détournements de fonds publics européens", avec dix cadres du parti et élus centristes à ses côtés.

Ces personnes physiques et morales étaient poursuivies pour avoir participé, de près ou de loin, à un système "frauduleux", qui consistait à rémunérer des assistants parlementaires d'eurodéputés avec les fonds du Parlement européen, prévus à cet effet, alors qu'en réalité, ils travaillaient au profit du parti centriste.

L'UDF et le MoDem condamnés

Deux autres prévenus ont aussi été relaxés, tandis que les huit autres, parmi lesquels figuraient cinq ex-eurodéputés, dont Anne Laperrouze et Jean-Luc Bennahmias, ont été condamnés à des peines allant de 10 à 18 mois de prison avec sursis, des amendes de 10 000 à 50 000 euros et à deux ans d'inéligibilité avec sursis. Parmi les personnes renvoyées devant la justice figurait également l'ancien garde des Sceaux Michel Mercier, condamné à 18 mois de prison avec sursis, 20 000 d'amende et deux ans d'inéligibilité avec sursis.

Le MoDem a pour sa part été condamné à 350 000 euros d'amende, dont 300 000 euros ferme, et l'UDF, la formation politique qui l'avait précédé, à 150 000 euros, dont 100 000 ferme. Les deux partis politiques étaient poursuivis en tant que personnes morales.

Selon la justice, il y a en effet bien eu dans ce dossier détournement de fonds publics. Mais "aucun élément ne permet d'affirmer que M. Bayrou avait connaissance de la non-exécution des contrats d'assistants parlementaires", c'est-à-dire du fait qu'ils n'étaient pas employés à des tâches liées au Parlement européen, a détaillé le président du tribunal, lisant le jugement. "Il est très probable" que les actes commis par trois des prévenus l'ont été avec "l'autorisation de M. Bayrou", a-t-il nuancé, mais "il n'est pas rapporté la preuve de cette autorisation".

"Il y a des gens qui en sont morts"

"Pour moi, évidemment, c'est un cauchemar de sept années qui vient de s'achever par une décision sans contestation du tribunal", a commenté François Bayrou après le jugement. Affirmant que la justice avait prouvé "qu'il n'y avait pas de système" organisé par le MoDem, il a estimé que les condamnations prononcées contre le parti et plusieurs de ses représentants portaient sur "des décisions de certains députés européens sur un nombre extrêmement limité de cas".

"Je ne suis pas naïf : la cible de toute cette affaire, hélas, c'était moi", a poursuivi François Bayrou, insistant sur le "gâchis" politique et humain que représente à ses yeux cette procédure judiciaire. "Il y a des gens qui en sont morts", estime même le patron du MoDem, faisant référence sans la nommer à Marielle de Sarnez, son bras droit, également mise en examen dans ce dossier et morte d'un cancer en 2021.

Estimant que François Bayrou, 72 ans, était coupable de faits portant "atteinte aux valeurs de probité et d'exemplarité qu'il promeut", le parquet avait requis 30 mois d'emprisonnement avec sursis, 70 000 euros d'amende et trois ans d'inéligibilité avec sursis contre le triple candidat à la présidentielle.

Une décision avec d'importants enjeux politiques

Cette décision intervient alors que la deuxième vague de nominations au gouvernement de Gabriel Attal se fait attendre, et que François Bayrou plaide, en coulisses, pour être mieux représenté. Une question qu'il a refusé de commenter, lundi : "On va attendre quelques minutes, quelques heures, pour réfléchir à l'avenir", a-t-il répondu aux journalistes.

Par ailleurs, le MoDem n'est pas l'unique parti français visé par des accusations similaires. La France insoumise (LFI) et le Rassemblement national (RN) sont aussi soupçonnés d'avoir employé des assistants parlementaires européens à des tâches liées à leurs activités en France, et non pour des missions liées au Parlement européen. 

La présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale, Marine Le Pen, est renvoyée devant le tribunal correctionnel de Paris pour des soupçons de détournements à hauteur de 6,8 millions d'euros, entre 2009 et 2017. Du côté de LFI, une information judiciaire est en cours, mais personne n'a été mis en examen depuis son ouverture fin 2018, selon l'AFP.

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