Le projet de loi des retraites a été adopté mercredi selon le calendrier souhaité par le gouvernement
"C'est un jour sombre pour notre pacte social et notre fonctionnement démocratique" a déclaré au sortir de l'hémicycle, la députée Marisol Touraine, chargée du dossier des retraites au PS.
A l'inverse, le ministre du Travail Eric Woerth, a jugé que le débat à l'Assemblée avait été "un beau débat de la Ve République".
329 voix de députés UMP et Nouveaux Centre pour la réforme contre 233 voix de députés socialistes, verts et communistes, on peut résumer l'adoption du texte à ces deux chiffres. Mais ce serait passer à côté de l'ambiance électrique d'un hémicycle chauffé à bloc.
Mercredi après-midi, les arguments ont fusé juste avant la séance du vote. Sur la clôture des débats décidée le matin même par Bernard Accoyer, le député UMP Thierry Mariani est monté en première en ligne: "Le Président de l'Assemblée ne fait qu'appliquer l'esprit du texte" alors que "Les députés PS ne savent que détourner un article pour répéter 200 fois la même chose".
Interprétation strictement opposée de l'article 49 al.13 par le député PC Maxime Gremetz : "Le gouvernement fait un putsch en utilisant le règlement".
Arguments contre arguments
Dans l'hémicycle, le premier à ouvrir le bal des hostilités est Bernard Accoyer. Grimpant au perchoir sous les huées des députés de gauche, le Président de l'Assemblée nationale a fustigé "une stratégie délibérée d'obstruction" et rappelé que la procédure utilisée par le PS était faite pour les députés ayant une opinion divergente de leur groupe, ce qui n'était, en l'espèce, pas le cas.
La riposte ne tarde pas. Assénée d'abord par Yves Cochet. Ceint de son écharpe tricolore comme nombre de ses collègues, le député Vert a qualifié "de dérive droitière et d'acte inconstitutionnel" la clôture des débats décidée par M. Accoyer.
Dans son sillage, le chef de groupe PS à l'Assemblée Jean-Marc Ayrault a dénoncé "une crise morale et politique dont M. (Eric) Woerth est devenu le symbole": "Aujourd'hui notre République est abîmée. Notre République perd ses repères lorsque des ministres confondent l'intérêt général et l'intérêt de l'UMP".
Applaudi par la gauche mais hué par la droite, il a enchaîné ses critiques sur le contenu même de la réforme: "Nous n'acceptons pas que le poids de la crise soit supporté par ces victimes. Nous n'acceptons que 85 % reposent sur les classes populaires pendant que Mme Liliane Bettencourt est protégée par le bouclier fiscal. Nous n'acceptons pas que le fond de réserve soit ainsi sacrifié, siphonné".
Au-delà des invectives, le programme s'est déroulé comme annoncé.
"L'heure est désormais venue de voter. Dans tout débat démocratique, il y a un début, il y a une fin" a lancé presque en guise de conclusion le chef de groupe UMP Jean-François Coppé, lors de sa prise de parole.
Quelques minutes plus tard, le projet de loi est adopté au grand dam des socialistes qui ont décidé de boycotter les débats à l'Assemblée jusqu'à la fin de la semaine.
Les opposants du texte rassemblés face à l'Assemblée
Dès la mi-journée, quelques milliers de salariés et militants syndicaux avaient investi la place de la Concorde, en face de l'Assemblée nationale.
"Messieurs Mesdames les députés, ne votez pas la réforme" pouvait-on lire sur l'une des banderoles brandie, sur fond de "Ca va péter, ça va péter".
Au coeur de la foule, une même colère. "C'est toujours les mêmes qui sont mis à contribution. Les femmes sont les plus pénalisées. Je trouve cela scandaleux" s'indigne une salariée de Saint Brieux. "La crise a bon dos" renchérit sa collègue. "85% de la réforme est supportée par les salariés" souligne un autre.
Mais pour eux, pas question de baisser les armes. "Ce n'est pas un baroud d'honneur. A l'Assemblée, ca risque de passer, mais au Sénat, c'est pas fait. Les sénateurs sont plus libres, ils sont moins godillots" soutient Arnaud contractuel à la RATP.
"Aujourd'hui, c'est un avertissement. Tout le monde se souvient du précédent du CPE" prévient Patrice, originaire de Chalon-sur Saône.
Suite du calendrier
Après le vote des députés mercredi, le projet de loi va prendre la direction de la Haute Assemblée où il sera examiné à compter du 5 octobre.
S'il est adopté par les sénateurs, une commission mixte paritaire (CMP) Assemblée-Sénat sera convoquée pour mettre au point un texte commun aux deux assemblées qui sera soumis aux députés et sénateurs pour son adoption définitive.
L'objectif du gouvernement, qui a décidé d'utiliser la procédure d'urgence, est toujours de faire adopter définitivement la réforme fin octobre, début novembre. Celui des opposants, toujours de faire plier le gouvernement.
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