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FN : jusqu'où ira Marion Maréchal-Le Pen ?

Article rédigé par Ariane Nicolas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
La députée FN du Vaucluse, Marion Maréchal-Le Pen, le 18 octobre 2014 au Pontet (Vaucluse).  (ALAIN ROBERT / APERCU / SIPA)

La petite-fille de Jean-Marie Le Pen et nièce de Marine Le Pen a été élue députée en 2012. Elle pourrait prendre du galon au sortir du congrès du FN, samedi et dimanche. 

Sous ses traits fragiles et sa blondeur candide se cache une femme politique de plus en plus affirmée. Figure montante du Front national, Marion Maréchal-Le Pen pourrait arriver en tête à l'élection du comité central du FN, lors du congrès du parti à Lyon (Rhône), les 29 et 30 novembre. A 24 ans, la nièce de Marine Le Pen et petite-fille de Jean-Marie semble promise à un avenir politique radieux.

Marion Maréchal-Le Pen entre en politique en 2010, recrutée par Marie-Christine Arnautu pour les régionales en Ile-de-France, puis poussée par Jean-Marie Le Pen aux législatives de 2012. Deux ans plus tard, elle ferait presque de l'ombre au numéro deux du parti, Florian Philippot. La jeune première devait s'exprimer sur scène lors du congrès ? Elle a finalement disparu du programme. Interrogée sur son absence à la tribune, Marion Maréchal-Le Pen accuse directement le bras droit de Marine Le Pen : "Demandez à la vice-présidence !"

Rivalités internes

Les deux cadres frontistes dissimulent de moins en moins leurs sensibilités divergentes, pour ne pas dire leurs inimitiés. La députée du Vaucluse incarne une ligne distincte de celle de Florian Philippot, grand architecte de la stratégie de "dédiabolisation" qui porte ses fruits depuis l'élection de Marine Le Pen à la présidence du FN, en 2011.

"Florian Philippot représente une ligne antilibérale et interventionniste. Il s'adresse plus à un électorat ouvrier, résidant dans le nord-est du pays, explique Jean-Yves Camus, auteur de l'essai Les Droites extrêmes en Europe (Seuil). Marion Maréchal-Le Pen, elle, représente un électorat plus méridional, héritier du poujadisme : des artisans, commerçants et classes moyennes sensibles à l'idée de libérer les énergies productives." 

Forte d'un patronyme qui continue de faire recette au FN, Marion Maréchal-Le Pen suscite de plus en plus la jalousie dans les rangs du parti, et pas seulement en la personne de Florian Philippot. "Elle a des rivaux, incontestablement, note Jean-Yves Camus. Pour certains cadres, son ascension dynastique est jugée trop fulgurante."

Populaire et ménagée par la présidente

Loin de regretter ces lignes qui s'affirment, Marine Le Pen les cultive. Le positionnement très à droite de Marion Maréchal-Le Pen constitue un atout pour la présidente du parti, qui tente ainsi de toucher un maximum d'électeurs. Pascal Perrineau, auteur de La France au front (Fayard), explique que "Marine Le Pen veut avoir plusieurs fers au feu. Elle divise donc le travail entre différentes sensibilités, car elle sait que le FN n'a pas intérêt se battre pour un seul créneau mais à ratisser large. Et pour cela, elle a besoin de chaque dent du râteau."

Florian Philippot découvre, à ses dépens, qu'en dépit de la proximité qu'il entretient avec Marine Le Pen, cette dernière cherche à préserver différentes sensibilités dans son équipe. D'autant que Marion Maréchal-Le Pen est plus proche des militants que ne l'est le vice-président du FN, un énarque et ancien chevènementiste, qui ne semble pas vraiment venir du même monde. La présidente profite de cette popularité, que Marion Maréchal-Le Pen semble de plus en plus apprécier.

"C'est un bon produit médiatique"

D'un naturel stressé, la jeune députée a mis du temps à accepter l'exercice médiatique. Elle s'y plie désormais volontiers. Régulièrement invitée des matinales à la radio, elle a porté la parole frontiste face à Alain Juppé dans l'émission "Des paroles et des actes", sur France 2, en octobre. Preuve supplémentaire qu'elle incarne, à sa manière, un certain renouveau du FN. "C'est un bon produit médiatique, commente Joël Gombin, politologue à l'université de Picardie Jules-Verne. Pour l'instant, son grand atout, c'est d'avoir un côté 'belle-fille idéale', présentable et policée." 

Marion Maréchal-Le Pen à l'Assemblée nationale, le 12 novembre 2014. (ERIC FEFERBERG / AFP)

Mais il ne faut pas s'y fier : la jeune élue défend des positions radicales en matière sociale, sur la famille ou l'intégration des immigrés, par exemple (elle parle de "fusion" avec les Français d'origine). "Elle entretient des liens avec des personnes radicales à l'extrême droite, y compris parmi ses collaborateurs", souligne Joël Gombin. Un point crucial pour le parti. "Elle peut ainsi bâtir des ponts entre des camps politiques qui n'étaient pas connectés auparavant." Lors de la Manif pour tous de janvier 2013, à laquelle elle s'est ralliée sans hésiter, à la différence d'une frange de son parti, elle a ainsi pris la tête du cortège aux côtés de catholiques intégristes et d'élus UMP.

Une future vice-présidente du FN ?

Bien que parlementaire, Marion Maréchal-Le Pen n'exerce pas encore de fonction exécutive au sein du FN. Une situation qui devrait changer à l'issue du congrès, surtout si elle arrive en tête. "Pour l'instant, elle creuse son sillon. Elle sait qu'elle a le temps", glisse Jean-Yves Camus. Pour Pascal Perrineau, "elle s'efforce de ne pas déraper, contrairement à son grand-père. Elle incarne une sorte de parfum de soufre qui peut manquer à certains militants, nostalgiques de l'ère Jean-Marie Le Pen. Elle doit encore apprendre pour progresser dans ce sens. Mais elle apprend vite." 

Son ascension peut-elle la conduire à faire de l'ombre à sa tante ? Pour Joël Gombin, ce scénario n'est pas envisageable. "Sur le plan électoral, vu la dynamique du FN, il y a aujourd'hui suffisamment d'opportunités pour tout le monde, assure le chercheur. Le moment venu, Marine Le Pen saura faire les arbitrages nécessaires entre telle ou telle sensibilité. Tant qu'elle sera présidente, elle aura le dernier mot et les instances du parti joueront un rôle secondaire."

Les élections régionales de 2015 pourraient constituer un nouveau test pour la députée du Vaucluse, qui n'exclut pas de se présenter à la place de son grand-père en région Provence-Alpes-Côte d'Azur. "S'il souhaitait être candidat, je ne maintiendrais pas ma candidature", concède-t-elle tout juste sur BFMTV, mi-novembre. Marion Maréchal-Le Pen lorgne également le poste de vice-présidente du FN chargée des relations internationales, qu'elle a toutes les chances d'obtenir, à moins de 30 ans. 

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