Affaires Fillon : trois questions sur l'élargissement de l'enquête à des faits d'"escroquerie aggravée", de "faux et usage de faux"
Les enquêteurs ont saisi des documents qui laissent croire que des fausses preuves ont été créées pour justifier le travail d'attachée parlementaire de l'épouse du candidat à la présidentielle.
C'est une ligne de plus qui s'ajoute à une enquête déjà bien fournie. Selon les informations du Monde confirmées par franceinfo, le parquet national financier (PNF) a délivré, jeudi 16 mars, un réquisitoire supplétif pour "escroquerie aggravée, faux et usage de faux" aux trois juges d'instruction chargés de l'enquête sur les affaires Fillon. L'enquête est déjà ouverte pour "détournement de fonds public, abus de biens sociaux, complicité et recel de ces délits, trafic d'influence et manquement aux obligations déclaratives".
Franceinfo revient sur ce qu'il faut savoir sur cet énième volet d'une affaire hors norme.
Que soupçonnent les enquêteurs ?
Les enquêteurs ont saisi, lors d'une deuxième perquisition courant mars à l'Assemblée nationale, de nouveaux documents qui comportent différents calculs d'heures travaillées par Penelope Fillon. Ces derniers "se demandent si ces calculs ne constituent pas des faux, établis pour justifier a posteriori les salaires versés à l’épouse du député de Paris et conforter la réalité de son travail d’assistante parlementaire", écrit le quotidien du soir qui précise que "l'on ignore à qui était destinée cette déclaration d’emploi et à quelle période de sa vie professionnelle ils correspondent".
Le Monde rappelle également des informations dévoilées par Le Canard enchaîné dans son édition du 22 mars : Penelope et François Fillon "ont carrément signé une fausse déclaration, certifiant aux fonctionnaires de l’Assemblée que madame ne bossait pas plus d’une trentaine d’heures par mois à la Revue des deux mondes où elle était payée pour 151,67 heures", alors que l'épouse du candidat de la droite et du centre cumulait deux emplois à plein temps, entre le 1er juillet 2012 et le 30 novembre 2013, à l'Assemblée nationale et à la Revue des deux mondes.
Que répond le camp Fillon ?
"Il n'y a pas le moindre faux dans ce dossier." Contacté par l'AFP, l'avocat de Penelope Fillon, Pierre Cornut-Gentille, a contesté les révélations du Monde dénonçant également une violation du secret de l'instruction. "Nous n'allons pas nous expliquer avant d'aller devant les juges", a-t-il ajouté.
Sur le plan politique, plusieurs ténors de la droite ont également adopté la même défense. Invité de RTL mercredi 22 mars, Bruno Retailleau, coordinateur de la campagne de François Fillon, a lui aussi dénoncé une "violation du secret de l'instruction". "S'il vous plaît, on ne va pas feuilletonner jusqu'au premier tour de l'élection présidentielle. On voit bien qu'il y a des fuites organisées", a-t-il lancé, avant d'accuser : "Ces fuites viennent bien sûr soit des enquêteurs soit de la justice, elles sont transmises par les journalistes."
"Il n'y a plus de campagne électorale", a renchéri sur RFI Eric Ciotti, en charge de la mobilisation dans la campagne de François Fillon. "On voit que toutes les règles, tous les usages sont violés, violation du secret de l'instruction tous les jours (...), Tout ça n'est pas vérifié, tout ça n'est pas prouvé. On balaie la présomption d'innocence."
Qu'est ce que ça change ?
Pour l'instant, sur le plan judiciaire, pas grand chose. Cela élargit simplement le champ de l'enquête et pourrait rajouter une charge supplémentaire contre le candidat de la droite. Rappelons néanmoins que le faux et l'usage de faux sont punis de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Convoquée le 28 mars en vue d'une mise en examen, Penelope Fillon devrait en tout cas être interrogée sur ce point. Même si une source proche du dossier interrogée par Le Monde indique que "ce supplétif ne concerne pas exclusivement Mme Fillon".
Ce nouveau rebondissement vient donc s'ajouter à une enquête aux ramifications désormais nombreuses. Et dont les résultats commencent à filtrer dans la presse. Dans son édition du 22 mars, Le Canard enchaîné note que les enquêteurs ont mis la main sur les archives familiales des Fillon lors d'une perquisition le 3 mars dans le manoir de Beaucé. Mais, croit savoir l'hebdomadaire, ils n'y ont trouvé aucun élément en lien avec le travail de Penelope Fillon.
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