Fabius, Luquiens, Pinault : qui sont les trois nouveaux Sages qui vont entrer au Conseil constitutionnel ?
Le ministre des Affaires étrangères succèdera à Jean-Louis Debré, Corinne Luquiens à Guy Canivet, et Michel Pinault à Renaud Denoix de Saint-Marc.
Trois membres du Conseil constitutionnel sur dix sont remplacés en ce début d'année 2016. La nouvelle a été confirmée mercredi 10 février : le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius quitte le gouvernement pour succéder à Jean-Louis Debré. Il espère prendre la tête du Conseil constitutionnel "d'ici le début du mois de mars".
Le Conseil se féminisera un peu plus avec l'arrivée de Corinne Luquiens, désignée par le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone pour remplacer Guy Canivet. L'actuelle secrétaire générale de l'Assemblée sera donc la quatrième femme à siéger parmi les dix Sages. Enfin, le moins médiatique des trois, le conseiller d'Etat Michel Pinault, nommé par le président du Sénat Gérard Larcher, prend le siège de Renaud Denoix de Saint-Marc.
Qui sont ces trois Sages, qui vont rejoindre, rue de Montpensier, les six autres membres désignés, plus Valéry Giscard d'Estaing, le seul des anciens chefs d'Etat à siéger ?
Laurent Fabius, un parcours politique exceptionnel
A 69 ans, Laurent Fabius possède un des CV les plus impressionnants de la République. Enarque et normalien, ce "fils préféré" de François Mitterrand devient, à 37 ans, le "plus jeune Premier ministre" que l'ancien président "a donné" à la France. Il reste deux ans à Matignon (de 1984 à 1986). Il prend brièvement la tête du PS (de 1992 à 1993), devient deux fois président de l'Assemblée nationale (de 1988 à 1992 et de 1997 à 2000), puis ministre de l'Economie sous Jospin (2000-2002), tout en se bâtissant un fief en Seine-Maritime (il y sera élu député de 1978 à 2012).
Sous le quinquennat Hollande, Laurent Fabius quitte le Quai d'Orsay, après trois ans et neuf mois, sur un bilan mitigé. Au Proche-Orient, aucune de ses initiatives n'a semblé concluante et il a parié à tort sur l'effondrement du régime Assad en Syrie. Reste le succès, au moins sur le papier, de la COP21, puisque l'accord de l'ONU sur le climat a finalement été signé par les pays présents au sommet de Paris, en décembre 2015.
En fin de carrière, il doit donc décrocher le très prestigieux poste de président du Conseil constitutionnel. Mais lui que l'on compare souvent avec Alain Juppé, autre énarque-normalien et ex-Premier ministre, d'un an son aîné, n'a jamais été en situation de se présenter à l'élection présidentielle. D'abord à cause du scandale du sang contaminé, pour lequel il avait pourtant été relaxé en 1999 par la Cour de justice de la République, puis pour cause d'échec aux primaires socialistes. En 2006, Ségolène Royal lui est préférée par les militants. Et en 2012, c'est son vieil adversaire au sein du PS, François Hollande, qui accède à la magistrature suprême.
Corinne Luquiens, une motarde secrétaire générale de l'Assemblée
A 63 ans, cette motarde est moins connue du grand public. Entrée au Palais Bourbon en 1975 après avoir décroché le concours d'administrateur, aussi difficile que l'ENA, explique-t-elle, elle y a gravi tous les échelons, jusqu'à devenir secrétaire générale de l'Assemblée nationale et de la présidence.
L'ancien président, Bernard Accoyer (alors UMP, devenu LR) l'avait nommé en 2010 à ce poste crucial. "L'inconnue qui murmure à l'oreille des présidents", selon Le Nouvel économiste, devient alors la première femme à exercer cette fonction délicate. Elle "a la haute main sur une douzaine de services législatifs, de la séance aux affaires juridiques en passant par les questions sociales ou les finances publiques." Elle a donc organisé, entre autres, le Congrès de Versailles qui a suivi les attentats de 2015. Son métier compte d'ailleurs des aspects plaisants, comme accompagner le président de l'Assemblée dans ses déplacements à l'étranger, souligne le JDD.
"Cocolulu" (son surnom, selon L'Opinion) accède désormais au-devant de la scène. Changera-t-elle pour autant ses habitudes ? Ou continuera-t-elle à se rendre à son travail en BMW 650, même rue de Montpensier ?
Michel Pinault, un discret conseiller d'Etat
Le troisième nouveau membre, Michel Pinault, risque d'être moins sollicité par les médias. Difficile même de trouver un cliché le représentant sur les agences photos... Fin connaisseur du milieu économique, énarque et diplômé d'HEC, ce conseiller d'Etat de 68 ans a exercé des responsabilités à l'Union des assurances de Paris (UAP), puis au sein du groupe AXA (1997-2004).
Cet inconnu du grand public dirige la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers depuis 2014. Avec calme et humour, paraît-il.
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