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Affaire Benalla : Emmanuel Macron donne "l'impression d'un Président qui serait ivre de sa toute-puissance"

Le spécialiste en communication, Arnaud Benedetti, commente mercredi sur franceinfo la communication du président de la République qui "n'a pas véritablement de mots de regrets".

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Emmanuel Macron, le 17 juillet 2018, à l'Élysée. (IAN LANGSDON / POOL)

Emmanuel Macron est sorti de son silence mardi 24 juillet au soir, pour assumer avec fracas sa responsabilité dans l'affaire Benalla, devant les députés de sa majorité réunis à la maison de l'Amérique latine. Spécialiste en communication politique et auteur d'un ouvrage sur la communication d'Emmanuel Macron, Arnaud Benedetti a pointé mercredi sur franceinfo que le président n'exprimait pas "véritablement de mots de regrets" et pouvait "susciter l'impression d'un président qui serait ivre de sa toute-puissance."

franceinfo : Cette intervention du président est-elle une bonne réponse à la crise ?

Arnaud Benedetti : Je crois qu'il y avait trois objectifs dans cette sortie du président de la République, d'abord remobiliser des troupes qui peut-être, ces derniers jours, donnaient l'impression de flotter quant aux révélations du Monde, ça c'est plutôt réussi. Le deuxième objectif, c'était aussi de fournir la lecture des événements et cette lecture repose sur un trépied : un, j'ai été trahi donc on poursuit le sacrifice de M. Benalla ; deux, on explique qu'on est responsable et qu'il n'y aura pas de fusible, de ce point de vue-là, c'est un bon réflexe en matière de communication de crise que de reconnaître, même s'il arrive un peu tardivement, sa propre responsabilité ; et le troisième élément, et c'est vraisemblablement celui qui aujourd'hui crée le plus d'émois, c'est cette espèce de défi qu'il lance à ses opposants en leur disant "qu'ils viennent me chercher".

Comment vous interprétez ces mots-là ?

C'est vraiment la caractéristique de ce que l'on appelle en communication une injonction paradoxale, parce que pour venir le chercher, encore faut-il pouvoir le trouver. Et la difficulté, c'est qu'on ne peut pas le trouver puisqu'il est couvert par une immunité présidentielle. C'est bien aujourd'hui ce qui fait polémique dans cette déclaration, et que ses opposants n'ont pas manqué de relever. C'est malin sur le moment, la difficulté c'est que ça peut susciter l'impression d'un président qui serait ivre de sa toute-puissance et qui ne reconnaîtrait, en fin de compte, pas la gravité des faits. C'est vraisemblablement, aujourd'hui, ce qui est le plus handicapant dans sa stratégie de communication d'urgence, c'est qu'il n'a pas véritablement de mots de regrets au regard des événements qui se sont déroulés autour de l'affaire Benalla. C'est peut-être aujourd'hui ce qui manque le plus dans sa stratégie de communication.

Il aurait pu suggérer d'être auditionné par une des commissions d'enquête parlementaire. Ce n'est pas ce qu'il veut dire ?

En tout cas, c'est la manière dont vont certainement l'interpréter un certain nombre de parlementaires, et si j'en crois ce que je lis sur les réseaux, déjà un certain nombre de parlementaires de la France Insoumise mais d'autres formations politiques l'entendent comme cela. Nous allons voir dans les heures qui viennent quel écho et quelle suite seront donnés à cette déclaration du président de la République.

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