Depuis la primaire écologiste, les voix d’Eva Joly se sont évaporées tout au long de la campagne
L'intérêt de la candidature écologiste d'Eva Joly est régulièrement remis en cause au sein de son propre camp, alors que les sondages lui attribuent des scores de plus en plus faibles à l'élection présidentielle. Où sont passés ses électeurs ?
Fragilisée par les sondages, l'intérêt de la candidature d'Eva Joly est remis en cause même au sein de son propre camp. La parenthèse qui vient de se fermer avec la mort du "tueur au scooter" est d'autant plus difficile à gérer pour l'écologiste que la séquence précédente, où l'équipe de l'ancienne magistrate devait marquer sa différence sur quelques thèmes porteurs, n'a pas apporté les effets attendus. Partie au lendemain de la primaire d'Europe Ecologie - Les Verts (EELV) aux alentours de 8 à 10 % d'intentions de vote, Eva Joly est tombée à 3 %, voire 1 %.
Son électorat a donc fondu comme neige. Disparu. Alors que l'électorat écologiste a représenté 16 % des voix aux élections européennes de 2009, où sont donc passées les voix d'Eva Joly ?
Un autre sondage publié dimanche dernier pour le JDD.fr indique en effet que le taux d'abstention est particulièrement élevé (46 %) pour les sympathisants d'Europe Ecologie - Les Verts.
Lundi sur France Info, Noël Mamère s'est interrogé sur "l'intérêt" de sa candidature qui risque, selon, lui "d'affaiblir le candidat du PS"… Et de remettre en cause l'avenir des circonscriptions réservées à EELV par l'accord signé avec le Parti socialiste.
Le contenu de l'accord PS-EELV caduc ?
Car les écologistes -s'ils peuvent compter sur la pugnacité de Cécile Duflot pour défendre sa candidature à Paris aux futurs élections législatives- sont désormais dépendants de cet accord censé leur réserver soixante circonscriptions.
Effet indésirable de l'accord, le souci de voir la gauche gagner à la présidentielle a poussé les voix écologistes à se tourner vers la candidature de François Hollande dans un réflexe de vote utile, rendant le nombre de circonscriptions qui leur sont réservées incertain.
Il ne reste plus qu'un "noyau dur" d'écologistes qui correspond aux 2 % d'intentions de vote relevés par les sondages, analyse son conseiller politique Patrick Farbiaz. Ce dernier mise sur un score s'élevant à 5 % au soir du 22 avril. Une nécessité financière pour le parti.
"En termes de présidentielle pure, l'électorat écologiste tourne autour des 2 %, le noyau dur des écolos, explique ce proche d'Eva Joly. C'est à peu de choses près le score de Dominique Voynet en 2007."
"Les militants ont l'impression qu'on devrait avoir droit à 10 %, ajoute-t-il. Mais nos questions sociétales sont reprises par tous les partis. Ce qui compte c'est l'accord PS-EELV en lui-même, pas le contenu."
Objectif parlementaire
Exit donc la question de la personnalité d'Eva Joly pourtant visée par les moqueries, tandis que l'entourage de la candidate défend son choix de ne pas avoir mis en avant un professionnel de la politique.
"La question, ce n'est pas Eva Joly, estimait un proche à Roubaix en février. La question, c'est l'écologie. Il s'agit de rassurer les électeurs que François Hollande va gagner. On est complémentaire du Parti socialiste ! Ce qui compte, c'est que ce quinquennat soit utile."
Autre facteur déterminant, "Eva Joly subit la concurrence de Jean-Luc Mélenchon qui apparaît comme plus attractif et n'est pas hostile à la transition énergétique, analyse le sondeur Ipsos Brice Teinturier. Le Front de gauche est devenu une structure d'accueil pour les écologistes."
Dimanche dernier sur BFM TV, Jean-Luc Mélenchon a ainsi défendu le principe de la "dette écologique", valorisant au passage l'aspect environnemental de son programme, malgré l'existence de divergences sur la question du nucléaire.
Le risque pour les écologistes est maintenant que le Parti socialiste préfère faire du Front de gauche son partenaire principal, réduisant à peau de chagrin leurs espoirs d'obtenir un groupe parlementaire à l'Assemblée.
Sacrifiée politique
Face à cette menace, la "coccinelle" de la candidate EELV, Cécile Duflot, a défendu, dimanche au "Grand rendez-vous" Europe 1/I-Télé/Le Parisien/Aujourd'hui en France, l'ancienne magistrate et égratigné le tribun du Front de gauche, critiquant sa façon "nostalgique" de faire de la politique, avec un discours "un peu plaqué" sur l'écologie.
"L'environnement, l'écologie, ça ne peut pas être un truc en plus, c'est pas quelque chose qu'on rajoute à la mythologie révolutionnaire de la Révolution française, a-t-elle lancé. C'est ça la contradiction fondamentale de Jean-Luc Mélenchon".
D'autre part, "la campagne d'Eva Joly a désarçonné son électorat qui a jugé que celle-ci était trop axée sur des thématiques sociétales et pas assez sur l'environnement, estime Brice Teinturier. Ils attendaient une réponse écologique à la crise économique".
Mésentente ou manque de communication ? L'entourage de la candidate se targue pourtant d'avoir injecté dans le débat présidentiel la problématique du nucléaire. Jeudi dernier, lors de l'émission "Des paroles et des actes", poussé par Jean-François Copé, François Hollande a ainsi dû mettre au clair sa position sur la question qui consiste à fermer la centrale nucléaire de Fessenheim, et de .
Eva Joly est-elle la mieux placée pour faire passer le message environnemental ? "Pour moi, il n'y a pas d'erreur de casting, affirme à La nouvelle République Yannick Jadot qui a démissionné de sa fonction de porte-parole de la candidate en novembre. Le seul objectif de sortir Nicolas Sarkozy n'est pas suffisant. Il faut que ce quinquennat soit utile pour l'environnement et qu'on ne se réveille pas avec la gueule de bois parce que l'écologie aura disparu des radars."
Alors, Eva Joly, sacrifiée sur l'autel de l'écologie politique ?
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