Congrès des maires : "On demande toujours plus aux collectivités locales"
Baisse des dotations, réforme territoriale... Le 97e congrès des maires de France s'annonce houleux. Francetv info a interrogé le président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), Vanik Berberian.
Baisse des moyens, multiplication des obligations, incertitudes en matière d'organisation territoriale... Le congrès de l’Association des maires de France s’ouvre, mardi 25 novembre, dans un contexte tendu. Les maires se disent pris à la gorge. Alors que la réforme des rythmes scolaires nécessite des moyens supplémentaires, les recettes des communes diminuent : d'ici 2017, leurs dotations vont être réduites de 11,5 milliards d'euros. Enfin, la réforme territoriale, qui remet en cause les compétences des collectivités, fait grincer des dents. Les édiles comptent donc profiter du congrès pour faire entendre leur "ras-le-bol".
L'exaspération touche particulièrement les maires des petites communes. Confrontés à des difficultés croissantes, ils estiment être les grands perdants d'une réforme territoriale qui nie, selon eux, la notion de proximité. Francetv info est allé à la rencontre de Vanik Berberian, maire de Gargilesse-Dampierre (Indre) depuis vingt-cinq ans et président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), qui représente les maires des communes de moins de 3 500 habitants.
Est-ce la première fois que l'on constate une telle grogne des maires ?
L'inquiétude n'est pas nouvelle. Mais cette année, elle prend de l'ampleur. Les élus de longue date observent des difficultés croissantes. Les maires fraîchement élus, eux, sont déjà exaspérés par leur début de mandat. C'est un phénomène nouveau.
Nos concitoyens sont devenus très exigeants envers leurs élus. Ils se sentent de moins en moins partie prenante d'un ensemble et deviennent avant tout consommateurs. L'élu, qui a par définition une vision globale de l'intérêt général, se retrouve à devoir composer avec ses administrés et l'Etat, qui de son côté ne cesse de se désengager. Donc, forcément, une certaine lassitude s'installe face aux difficultés qui s'accumulent.
Les maires ruraux sont-ils confrontés à de plus grandes difficultés que leurs homologues urbains ?
Le maire d'une commune rurale est constamment sur le terrain, au contact direct des concitoyens, donc des critiques. Le maire urbain, lui, est plus protégé, on ne l'appelle pas directement pour se plaindre d'un problème. Nous incarnons au quotidien cette notion de service public et d'intérêt général.
De la même façon, le maire d'une ville dispose d'un staff administratif et technique, alors que les maires des petites communes, des villages, ne peuvent s'appuyer sur l'expertise de services techniques. Souvent, ils se retrouvent débordés par la bureaucratie. Et même si des formations spécifiques existent, peu de maires ruraux y participent, faute de temps.
Mais nous sommes confrontés aux mêmes difficultés que les autres maires : des charges plus importantes et des recettes en baisse. On demande toujours plus aux collectivités locales alors que l'Etat pioche dans les finances et se désengage de ses missions. La baisse des dotations a forcément un impact sur le niveau et la qualité des services proposés à la population et retarde certains investissements. C'est toute l'économie locale qui est directement affectée. Donc, chaque jour, nous devons faire des arbitrages, choisir ce que l'on maintient, tenter de garder des services, en supprimer d'autres…
Pourquoi les maires ruraux sont-ils particulièrement inquiets de la réforme territoriale ?
Les maires ruraux sont favorables à une réforme de l'organisation territoriale, mais ils ne veulent pas de cette réforme qui est entourée d'un flou institutionnel très inquiétant. Ce qui agace surtout, c'est que le but est de supprimer l'échelon de proximité et de tout concentrer vers le pôle urbain. On veut diluer la commune dans un plus grand ensemble, sous prétexte d'économies d'échelle et au risque d'une perte de proximité entre les citoyens et les élus municipaux. Et ce n'est pas la solution. C'est une réforme qui ne va rien arranger, qui va coûter cher et qui va entraîner des blocages.
Nous faisons un choix de société. Nous considérons que la question posée est de savoir quel aménagement du territoire nous voulons pour demain. Veut-on continuer à agréger les richesses vers les pôles urbains ou ose-t-on un réel équilibre du territoire ?
J'attends du congrès des maires une prise de conscience sur la dimension absurde de la réforme territoriale que l'on est en train de mettre en place, qui nie la notion de proximité et affecte l'identité des communes rurales.
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