"On est un peu abandonnés dans ce quartier" : à Sedan, comme dans d'autres villes, des habitants se sentent isolés
Selon un rapport de la Fédération nationale des centres sociaux et socioculturels qui a interrogé les habitants de 13 quartiers en France, le sentiment d'abandon est très fort par endroit.
Le quartier de Torcy à Sedan (Ardennes) est une ancienne cité ouvrière coupée par une longue ligne droite. Ici, on compte 3 000 habitants pour un taux de chômage supérieur à 20%, et comme dans d'autres quartiers en France, le sentiment d’abandon et d’isolement est très fort. C’est ce qui ressort du nouveau rapport de la Fédération nationale des centres sociaux et socioculturels rendu public samedi 12 janvier. Il s'appuie sur les témoignages de plusieurs centaines d'habitants de 13 quartiers populaires.
"Ici, il n'y a pas grand-chose à faire"
Dans le quartier de Torcy, les usines et les commerces ont fermé les uns après les autres, malgré la rénovation du quartier débutée il y a près de 15 ans. "Ici, il n'y a pas grand-chose à faire", soupire Valérie. Elle habite dans une petite rue où se trouvent des dizaines de petits pavillons, qui ont remplacé trois grandes tours de 15 étages. Cela fait presque vingt ans que Valérie vit ici, et cette mère de quatre enfants se souvient de ce qu’était son quartier il y a encore quelques années : "Il y avait un marché dans le temps quand il y avait encore les tours. Il y avait une fête foraine qui venait de temps en temps, donc les gens se regroupaient sur la fête foraine. Et là, il n'y a rien, il n'y a pas de local pour les jeunes, il n'y a pas de structure pour que les gamins puissent se réunir le soir pour faire des petits jeux", déplore-t-elle. "Je pense qu'on est un peu abandonnés dans ce quartier, personne ne nous écoute".
Tout le monde nous dit 'oui il y a plein de choses qui se font'. Qu'ils nous expliquent quoi parce que nous, on ne voit rien arriver...
Valérieà franceinfo
Le sentiment d’abandon est très fort dans ce secteur où un tiers de la population a moins de 18 ans. Il n’y a plus de vie de quartier, le dernier collège a été détruit en même temps que les tours et la seule ligne de bus qui dessert le centre-ville ne passe que toutes les heures. Il n'y a aucun médecin et il ne reste plus que deux commerces de proximité : une boulangerie, et une pharmacie tenue par Aude Amiot depuis 17 ans. Elle se souvient d'ailleurs qu’à l’époque, Torcy était surnommé Chicago "parce que c'était un peu la loi de la jungle dans la rue". Mais aujourd’hui, ça va beaucoup mieux, dit-elle. Pourtant, le quartier reste enclavé, regrette la pharmacienne. "Le top du top, ce serait une maison médicale avec les professionnels de santé rassemblés, ou alors jouer sur tout ce qui est transports. Pourquoi pas des navettes organisées par la ville ? Pour qu'il y ait vraiment une mobilité, un lien avec le centre de Sedan pour rapprocher un peu les quartiers".
Une cassure dans la société
Pour Horia Idri, qui dirige le Centre social du quartier, les habitants sont oubliés par le gouvernement, trop occupé dans le contexte actuel. "J'ai l'impression qu'on ne parle que des 'gilets jaunes'. On a un petit peu envie d'entendre autre chose. Qu'on se focalise maintenant sur d'autres problématiques qui sont aussi importantes que le pouvoir d'achat, dit-elle. Il faudrait que tout le monde se mette autour de la table et prenne réellement conscience du cri d'alarme que les habitants sont en train de remonter. Faut les écouter et après s'organiser pour savoir qui fait quoi". Un cri d’alarme, une cassure dans la société, et une question inscrite noire sur blanc sur le rapport dévoilé samedi : “Et maintenant, on fait quoi ?”
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