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Sarkozy sur écoute : est-ce que l'opinion s'en moque ?

A quelques jours des élections municipales, cette nouvelle affaire met en difficulté l'opposition comme la majorité. Francetv info s'est interrogé sur ses possibles effets sur les Français, avec l'aide de deux spécialistes de l'opinion.

Article rédigé par Clément Parrot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
L'ancien président Nicolas Sarkozy à Nice (Alpes-Maritimes), le 27 septembre 2013, après avoir donné une conférence privée à Cannes. (VALERY HACHE / AFP)

La mise sur écoute de Nicolas Sarkozy et l'ouverture d'une information judiciaire pour "trafic d'influence" n'en finissent plus d'alimenter les chroniques médiatique et politique. Un "scandale d'Etat" pour le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, une manipulation politique, selon l'opposition. Au milieu de ces réactions, le public tente de comprendre cet enchevêtrement d'affaires et de polémiques. A neuf jours du premier tour des élections municipales le 23 mars, francetv info a interrogé deux spécialistes de l'opinion pour connaître l'impact de cet épisode sur les Français.

Oui, l'opinion éprouve de la lassitude

L'opinion semble "imperméable" à l'affaire de la mise sur écoute de Nicolas Sarkozy, confie à francetv info Frédéric Dabi, directeur du département opinion de l'Ifop. "Il y a des sujets sur lesquels les Français adorent être interrogés, comme Hollande-Gayet, mais les affaires judiciaires, cela reste pâteux", ajoute Emmanuel Rivière, directeur du pôle opinion de TNS Sofres. Ce dernier cite les exemples des affaires Bettencourt ou Karachi pour expliquer qu'au final, l'opinion a l'impression "de ne jamais connaître le fin mot de l'histoire".

De plus, estime Emmanuel Rivière, "les Français sont vaccinés avec cette accumulation d'affaires". CopéBuisson, la mise sur écoute de Sarkozy, tous ces dossiers ont en effet éclaté la même semaine. D'autant que "ce type d'affaire est à des années-lumières de leurs préoccupations quotidiennes", ajoute Frédéric Dabi.

Facteur supplémentaire d'ennui : "L'ouverture d'une information judiciaire, la différence entre le parquet et les juges du siège, tout cela se révèle très compliqué à suivre", explique Emmanuel Rivière. A côté, les affaires Buisson et Cahuzac apparaissent "très simples", selon Frédéric Dabi, qui compare le dossier Sarkozy sur écoute à l'affaire Clearstream, à laquelle "le public ne comprenait rien".

Il tient cependant à relativiser le désintérêt du public en expliquant qu'un nouveau fait d'actualité "n'impacte pas nécessairement l'opinion immédiatement. Elle a souvent besoin de le digérer"

Oui, l'impact devrait rester mesuré aux municipales

Pour Emmanuel Rivière, l'aspect "repoussant" de cet épisode ne signifie pas qu'il n'aura aucun effet. A neuf jours du premier tour des élections municipales, il évoque une possible démobilisation qui, comme toujours dans ces cas-là, pourrait affecter le pouvoir en place. "Ce qui est devenu 'l'affaire Taubira' fragilise le camp socialiste en appuyant sur ses points faibles dans l'opinion : la maladresse et l'amateurisme, étaye le spécialiste de l'opinion, alors que de son côté, l'UMP en a vu d'autres sur la question des affaires"

"Il ne faut pas exagérer l'impact sur l'opinion pour les municipales", atténue Frédéric Dabi. Selon lui, l'UMP va tenter de nationaliser le vote, mais les affaires pourraient rendre "inaudibles" la stratégie du parti de Jean-François Copé. Il évoque aussi un "climat mauvais", qui pourrait nourrir l'abstention et les extrêmes dans cette fin de campagne, affirmant que la succession d'affaires nuit généralement à l'ensemble de la classe politique traditionnelle.

En conséquence, les partis qui jouent sur l'indifférenciation entre la gauche et la droite comme le Front national "pourraient profiter de la situation", juge Frédéric Dabi. Une opinion tempérée par Emmanuel Rivière, qui rappelle que le FN se situe déjà à un niveau élevé, et qu'il existe "une sorte de plafond pour ce parti qui reste rejeté par une grande partie des Français".  

Oui, cela affecte peu l'image de Sarkozy

"L'atout maître de la communication de Nicolas Sarkozy ne se joue pas sur la probité, l'honnêteté. Du coup, cette nouvelle affaire ne l'affecte pas tant que cela", analyse Emmanuel Rivière, qui ajoute : "A la limite, cela peut être ennuyeux pour le calendrier de son retour". Le sondeur envisage même "un effet remobilisateur chez les militants, qui voient leur champion attaqué, et qui l'estiment victime d'un complot"

La dernière enquête de l'Ifop pour le JDD, datée du 9 mars, montre quand même un impact négatif des dernières affaires sur l'image de l'ancien président pour 44% des Français. Mais Frédéric Dabi relève une profonde dichotomie dans le dernier baromètre Ifop pour Paris Match,  Nicolas Sarkozy perd 6 points, mais progresse de 2 points chez les seuls sympathisants UMP. Il reste ainsi la personnalité préférée au sein du parti d'opposition.

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