Financement libyen : "Cette enquête dans l'enquête ne fait que commencer", estime Fabrice Arfi après la mise en examen de Mimi Marchand
Le journaliste estime "qu'on aura de nouvelles découvertes dans les jours, semaines et mois qui viennent."
"On aura de nouvelles découvertes... Cette enquête dans l'enquête ne fait que commencer." Après la mise en examen de "Mimi" Marchand pour subornation de témoin et association de malfaiteurs dans l'affaire du financement libyen présumé de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007, le journaliste de Mediapart Fabrice Arfi assure samedi 5 juin sur franceinfo que "c'est potentiellement catastrophique pour Nicolas Sarkozy". "Les investigations accouchent d'un scandale dans le scandale de l'affaire Sarkozy-Kadhafi, avec des soupçons de témoignages achetés et manipulés."
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franceinfo : En clair, les enquêteurs n'écartent pas l'idée que Ziad Takieddine a pu subir des pressions pour retirer ses accusations contre Nicolas Sarkozy ?
Fabrice Arfi : C'est même plus que ça ! Les investigations accouchent d'un scandale dans le scandale de l'affaire Sarkozy-Kadhafi, avec des soupçons de témoignages achetés et manipulés, sur fond de presse sous influence. Ziad Takieddine avait fait grand bruit avec ses soi-disant rétractations qui ont depuis été démenties par l'enquête. Nicolas Sarkozy s'était emparé de ce soi-disant évènement pour dire qu'il n'y avait plus rien dans le dossier et attaquer l'intégrité des juges. Or, aujourd'hui, il y a cinq mis en examen. Donc, il y a des juges d'instruction qui estiment qu'il y a un faisceau d'indices graves : d'innombrables documents, des virements bancaires et des témoignages concordants.
"Cela montre que ce n'était pas une opération de presse mais une barbouzerie qui, d'après les juges d'instruction, s'appelle 'subornation de témoins', c'est-à-dire l'achat potentiel d'un témoignage pour changer le cours de la justice."
Fabrice Arfi, journaliste de Mediapartà franceinfo
De ce que nous savons, il y a de nombreux éléments matériels qui permettent de mieux comprendre l'intérêt de Nicolas Sarkozy dans ce soi-disant revirement, mis en scène par Paris Match, propriété du groupe Lagardère au sein duquel Nicolas Sarkozy siège au conseil de surveillance.
Qui est Mimi Marchand, qui vient d'être mise en examen ?
Elle dit qu'elle n'a fait que son rôle de journaliste, mais elle n'est pas journaliste. C'est une femme d'affaires, directrice d'une agence de paparazzi, "papesse" de la presse people comme elle est souvent présentée, mais surtout elle est très proche du couple Sarkozy et du couple Macron. Elle a quand même été conseillère image de l'actuel président de la République. Et elle est aujourd'hui formellement suspectée par des procureurs, des policiers anticorruption et deux juges d'instruction, d'avoir orchestré une subornation de témoins et une association de malfaiteurs avec des protagonistes extrêmement hétéroclites. Un homme déjà condamné plusieurs fois pour escroquerie, un homme d'affaires versé dans l'immobilier, un autre publiciste qui avait travaillé pour Nicolas Sarkozy en 2012... Tous sont soupçonnés d'avoir pris part d'une manière ou d'une autre dans les manœuvres pour promettre, voire verser, de l'argent à Ziad Takkiedine qui est en cavale au Liban après avoir été condamné dans une autre affaire politico-financière qui est l'affaire Karachi.
Quelles seraient les conséquences pour Nicolas Sarkozy si ces personnes sont reconnues coupables ?
Je pense que cette enquête dans l'enquête ne fait que commencer et qu'on aura de nouvelles découvertes dans les jours, semaines et mois qui viennent. C'est potentiellement catastrophique pour Nicolas Sarkozy qui est déjà quatre fois mis en examen dans l'affaire des financements libyens pour corruption, recel de détournement de fonds publics, financement illicite de campagne électorale et pour association de malfaiteurs. Lui qui dit depuis des années qu'il n'y a rien dans ce dossier, pourquoi un clan à son service se prête à ce type de pratique ? Ca pourrait être une sorte de preuve indirecte de nature à nourrir le dossier. Ca montre, de mon point de vue, l'extrême panique qu'il y a aujourd'hui dans le clan Sarkozy face à cette affaire qui est la plus grave pour lui.
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