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Affaire Tapie : pourquoi Hollande veut-il sauver Lagarde ?

La patronne du FMI est convoquée jeudi par la Cour de justice de la République dans l'affaire Tapie. Mais elle a le soutien du président. Francetv info détaille les raisons de ce choix.

Article rédigé par Louis San
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Christine Lagarde, la directrice du Fonds monétaire international, lors d'une conférence de presse à Washington (Etats-Unis), le 20 avril 2013. (NICHOLAS KAMM / AFP)

Christine Lagarde, la patronne du Fonds monétaire international (FMI), est entendue jeudi 23 mai par la Cour de justice de la République pour l'affaire Tapie. Il lui est reproché son rôle dans l'arbitrage rendu en faveur de Bernard Tapie en 2007, qui avait permis à l'homme d'affaires d'empocher 403 millions d'euros. Mais l'audition ne semble pas inquiéter l'ancienne ministre de l'Economie de Nicolas Sarkozy : "Rien de nouveau sous le soleil, je serai très contente de voyager à Paris pour quelques jours", avait-elle déclaré fin avril.

Et la femme française la plus influente a des raisons d'être confiante. Selon Le Canard enchaîné, François Hollande ne demandera pas son retrait du FMI, même si elle est mise en examen. Le président lui a même assuré son soutien lors d'une "discrète rencontre" à l'Elysée en mars, affirme Le Monde. Pourquoi le chef de l'Etat prend-il autant soin de Christine Lagarde, alors que les socialistes, l'actuel Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, en tête, l'avaient vivement attaquée à l'époque des faits ?

Christine Lagarde arrive devant la Cour de la justice de la République (France 3)

Parce que l'image de la France est déjà écornée

Christine Lagarde dirige le FMI, l'une des plus grandes institutions internationales. Surtout, elle a succédé à un autre Français : Dominique Strauss-Kahn. L'accabler dans un éventuel scandale financier, après un rocambolesque scandale sexuel qui a fait la une des journaux dans le monde entier, ternirait l'image de l'Hexagone sur la scène internationale. Et impossible d'oublier l'aura planétaire dont jouit Christine Lagarde : elle est la 7e femme la plus puissante du globe, selon le dernier classement Forbes (en anglais)"Il en va du prestige de la France", a estimé le chef de l'Etat cité dans Le Canard enchaîné.

Dominique Strauss-Kahn avait déjà été contraint de quitter la tête du FMI à cause d'une affaire judiciaire. Un deuxième départ forcé serait une inconfortable déconvenue. D'autant plus que Jean-Claude Trichet a cédé son poste de gouverneur de la Banque centrale européenne, et que le Français Pascal Lamy doit quitter, en septembre, la direction de l'Organisation mondiale du commerce, une autre grande institution internationale.

Parce que le retour de Bernard Tapie agace

"Bernard Tapie est convaincu que c'est à l'initiative de François Hollande que la machine d'Etat s'est remise en marche", écrit Challenges. Quelle pourrait en être la raison ? Freiner le retour de l'homme d'affaires, qui a mis la main sur le groupe Hersant et plusieurs quotidiens régionaux, dont La Provence. Et l'empêcher de se présenter à la mairie de Marseille (Bouches-du-Rhône). Une intention que l'ancien patron de l'OM réfute, mais que de nombreux politiques et commentateurs lui prêtent.

Reste que l'ancien ministre de la Ville de François Mitterrand continue à avoir de l'appétit pour la politique. Il a même offert ses services au chef de l'Etat, fin avril. "Je suis prêt à apporter ma contribution pour que le pays aille de mieux en mieux", a-t-il déclaré au Parisien, fin avril. Tout en précisant sur France info qu'il n'avait pas l'intention d'entrer au gouvernement : "Jamais de la vie, pour rien au monde."

Parce que Hollande a un "fusible"

De par les statuts du FMI, Christine Lagarde n'est pas menacée à son poste. L'institution ne prévoit pas de démission du directeur en cas de mise en examen. Sans compter que le Fonds a exprimé à plusieurs reprises "sa confiance" en sa patronne.

Enfin, au niveau national, François Hollande peut se permettre de défendre Christine Lagarde pour deux raisons. D'une part, la République exemplaire, qu'il prône et qui a déjà coûté son poste à Jérôme Cahuzac, ne concerne pas la directrice du FMI : elle n'est pas ministre. 

D'autre part, François Hollande dispose d'une tête à faire tomber avant que Christine Lagarde ne soit réellement inquiétée : celle de Stéphane Richard, actuel PDG de France Télécom et directeur de cabinet de l'ancienne ministre à l'époque des faits. La confidence d'un proche du président à Challenges ne laisse aucun doute : "Si Stéphane [Richard] peut servir de fusible pour protéger Christine Lagarde, il sera cramé sans états d'âme."

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