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Affaire Jouyet-Fillon : pourquoi la droite soupçonne l'existence d'un "cabinet noir" à l'Elysée

Pour les proches de Nicolas Sarkozy, l'enchaînement des affaires autour du déjeuner entre Jean-Pierre Jouyet et François Fillon met en lumière l'existence d'une structure à l'Elysée chargée de s'occuper de l'ancien chef d'Etat.

Article rédigé par Louis Boy
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Jean-Pierre Jouyet et François Fillon à la sortie de l'Elysée, le 12 novembre 2008. (GERARD CERLES / AFP)

C'est une vieille rumeur ravivée par l'affaire Jouyet-Fillon : l'existence d'un "cabinet noir" de l'Elysée. Selon Le Figaro, mardi 11 novembre, s'ils n'emploient pas encore ce terme, les proches de Nicolas Sarkozy "n'hésitent plus à évoquer la possibilité d'une structure, à l'Elysée", chargée d'orchestrer l'avancement des affaires judiciaires visant Nicolas Sarkozy. Une accusation déjà lancée, il y a un an, par Valeurs actuelles, et récurrente contre tous les gouvernements depuis François Mitterrand. Mais pourquoi la droite soupçonne-t-elle l'existence de ce "cabinet noir" ?

Parce que le calendrier judiciaire est jugé suspect

Depuis la révélation du déjeuner entre François Fillon et Jean-Pierre Jouyet, le 24 juin, durant lequel l'ancien Premier ministre aurait demandé au secrétaire général de l'Elysée d'accélérer le rythme des affaires visant Nicolas Sarkozy, les proches de l'ancien chef d'Etat s'intéressent aux jours qui ont suivi. En effet, le 2 juillet, soit huit jours plus tard, le parquet de Paris ouvrait une enquête préliminaire pour "abus de confiance", à propos du règlement par l'UMP des pénalités infligées à l'ancien président de la République pour le dépassement du plafond de ses dépenses de campagne en 2012. Une affaire qui aurait été justement au menu du déjeuner entre François Fillon et Jean-Pierre Jouyet.

Trois mois plus tard, le 6 octobre, l'enquête préliminaire aboutit à l'ouverture d'une information judiciaire confiée à deux juges d'instruction. "La légendaire lenteur de la justice est, ici, bien contredite", grince Le Figaro. Pour les proches de Nicolas Sarkozy, cet enchaînement rapide, dans une affaire à laquelle la justice ne s'était pas encore intéressée, est suspect. Mais le 1er juillet, à la veille de l'ouverture de l'enquête préliminaire, les commissaires aux comptes de l'UMP avaient écrit au parquet de Paris, faisant part de leurs suspicions sur l'illégalité du règlement des pénalités par le parti. Selon Libération, le procureur "n'avait d'autre choix" que d'ouvrir une enquête préliminaire.

Parce qu'une note de Bercy, favorable à Sarkozy, est restée secrète

C'est l'autre élément suspect pour les proches de Nicolas Sarkozy dans l'affaire des pénalités. En novembre 2013, raconte Le Figaro, l'UMP envoie au Trésor public des titres de recettes concernant le règlement des pénalités infligées à Nicolas Sarkozy. "[Le Trésor] les encaisse sans ciller", explique le journal. En effet, Bercy a émis deux notes juridiques qui valident ce règlement : "Aucune réglementation spécifique aux produits divers de l'Etat n'exclut qu'une créance de cette nature soit réglée par un tiers" et "le droit électoral et le droit applicable aux partis politiques ne s'opposent pas non plus à ce que l'UMP assure le paiement des dettes de M. Nicolas Sarkozy auprès du Trésor public". Mais ce document, consulté par Le Figaro, "ne sortira pas des tiroirs".

Parce que certains ministres ont commis des bourdes

La rumeur du "cabinet noir" avait déjà fait surface en mars, en plein scandale sur l'affaire des écoutes. L'Elysée affirme ne pas suivre l'avancement judiciaire de cette affaire, dans laquelle Nicolas Sarkozy sera mis en examen dans la nuit du 1er au 2 juillet. Mais les ministres socialistes vont commettre deux bourdes qui vont nourrir la suspicion. Le 12 mars, la ministre de la Justice, Christiane Taubira, tient une conférence de presse où elle affirme n'avoir aucune information sur le contenu des écoutes. Elle brandit même une lettre, adressée par la procureure financière au procureur général de la Cour d'appel de Paris pour appuyer son propos. Problème : le document contient des informations qui contredisent la version de la ministre.

Le lendemain, Michel Sapin, alors ministre du Travail, invité sur Europe 1, défend Christiane Taubira. Mais commet un lapsus, que certains jugeront révélateur : "On va s'occuper des enquêtes contre Nicolas Sarkozy, enfin... Les juges vont s'occuper de l'enquête contre Nicolas Sarkozy."

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