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L'Amérique d'Obama : Chicago attend le retour de son futur ex-président

A cinq semaines de la présidentielle américaine, franceinfo s’est rendue à Chicago, ville d’adoption de Barack Obama où sa popularité, malgré le chômage et les violences, reste très élevée. Le reportage de Mathilde Lemaire, envoyée spéciale aux Etats-Unis.

Article rédigé par Mathilde Lemaire, franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Barack et Michelle Obama en 2012 à Chicago où de nombreux habitants souhaitent le retour du couple, après la prochaine présidentielle (SAUL LOEB / AFP)

Après huit ans au pouvoir, Barack Obama s’apprête à quitter la Maison Blanche. Quel bilan tirer de ces deux mandats ? A Chicago, sa ville d’adoption, le président américain reste très populaire, malgré la violence locale persistante, les tensions raciales et un taux de chômage qui atteint 60% dans certains quartiers. De nombreux habitants souhaitent que la famille Obama revienne s'installer à Chicago.

L'Amérique d'Obama : Chicago attend le retour de son futur ex-président - le reportage de Mathilde Lemaire

Une popularité inédite pour un président sortant

A l’heure de quitter la Maison Blanche, Barack Obama engrange 58% d’opinions positives. Ce taux est même encore plus élevé à Chicago, où le président américain a été travailleur social, professeur, puis sénateur. A voir son portrait affiché dans certains magasins, on croirait qu’il a été une star de musique. Sur Dorchester Avenue, on peut même voir une plaque à l’endroit de son premier baiser avec Michelle, son épouse. Dans le quartier de Hyde Park, les chauffeurs de bus ralentissent pour que les passagers prennent en photo la maison des Obama, fièrement gardée par les policiers.

Cachée derrières les arbres, la maison des Obama à Chicago, souvent photographiée (RADIO FRANCE / Mathilde Lemaire)

Milton 42 ans, venu de Cleveland, "veut voir la maison" des Obama. Il dit "adorer Obama parce qu’il est un bon président. Il va entrer dans l’histoire pour toujours. Je n’arrive pas à croire qu’il va bientôt partir". En plaisantant, Milton émet l’hypothèse d’un troisième mandat. "Quand on voit le ménage qu’il avait à faire après Bush, il a fait un sacré bon boulot", ajoute-t-il. 

La nostalgie de Milton fait écho à celle d’un chroniqueur du New York Times qui a titré en février : "Obama me manque déjà !"

Obama, c’est un style qui le montre opposé à tous les sectarismes, avec le sourire et avec allure. Hillary Clinton ne s’y trompe pas en tentant de prendre un peu de sa lumière pour sa campagne. C’est pourquoi on devrait les voir côte à côte de plus en plus souvent, d’ici le 8 novembre.

Le charisme d’Obama fait oublier des échecs

A Chicago, les gens répètent souvent que le changement doit venir aussi d’en bas, de leur communauté et d’eux-mêmes. Conformément à l’état d’esprit américain, beaucoup pensent qu’il ne faut pas tout attendre de Washington. Des habitants se souviennent aussi que la présidence d’Obama a débuté avec la crise dite des "subprimes". Obama est arrivé à la Maison Blanche quatre mois après la faillite de Lehman Brothers. "Et il a fait face" tient à souligner Marion, âgée d'une cinquantaine d'années. Cette inconditionnelle de Barack Obama a participé aux deux dernières campagnes présidentielles et elle porte encore les badges de 2008 et 2012 sur sa veste. 

Je pense qu’il aurait aimé faire plus que ce qu’il a fait. Certains ont accusé Obama d’avoir cédé à Wall Street, mais il a évité au pays de sombrer dans la récession.

Marion, une habitante de Chicago, supportrice d'Obama

Marion déclare aussi que "le chômage est bas" [inférieur à 5% au niveau national] et que "la dette est faible". "Souvenons-nous que pour chaque réforme qu’il a menée, la bataille avec le Sénat a été dure", dit-elle.

Une réforme mise en avant : l'"Obamacare"

La réforme de l’assurance santé universelle pour les plus défavorisés a donné du fil à retordre à Obama, au Congrès comme dans l’opinion. Bien des présidents démocrates avaient tenté de mener la réforme avant lui, mais ils ont jeté l’éponge. Barack Obama a fait des compromis, mais il a abouti. Certains continuent de dénoncer une atteinte aux libertés, à cause de l’obligation de cotiser, mais d’autres apprécient le résultat. Cassandra, qui appartient à la classe moyenne inférieure à Chicago, enchaîne les petits boulots. Cette salariée a vu des apports concrets issus de la mesure.

Avant, bien que myope, je ne pouvais pas m’offrir une paire de lunettes. Je devais aussi payer pour des médicaments qui coûtaient chers. Maintenant je les ai sans débourser de telles sommes.

Cassandra, salariée à Chicago

Cassandra ajoute qu’elle peut à présent "consulter un médecin pour son fils qui a des problèmes de reins". Ce n’était pas le cas avant la réforme.

Toutefois, pour nuancer ce succès, on notera que 12 millions d’Américains comme Cassandra bénéficient de l’"Obamacare" et c'est moins que l’objectif fixé. Ces derniers mois, plusieurs compagnies d’assurance se sont aussi désengagées du dispositif.

Un bilan plus discret d'Obama, celui de sa politique extérieure 

Si l’Américain de la rue en parle très peu, les partisans engagés auprès d'Obama y font référence. Mauricio, 26 ans, est étudiant en droit à l’université de Chicago. Il évoque notamment "l'accord avec l'Iran [sur le nucléaire] et le symbole de Cuba, qui a rouvert ses portes aux Etats-Unis grâce à Obama". "Beaucoup de monde avait perdu confiance en nous, Obama a fait un gros travail. Il a mené une vraie politique de réchauffement", ajoute Mauricio.

De manière générale, Obama a permis aux Etats-Unis de redevenir un ami pour le reste du monde. Le précédent président avait fait l’inverse.

Mauricio, étudiant à Chicago

Mauricio tout de même se garde bien de parler de l’impasse syrienne ou de la promesse non tenue de Barack Obama de fermer Guantanamo. 

Obama reviendra-t-il à Chicago ?

Sur le calendrier, la question se posera après le 20 janvier, date de l’investiture de Donald Trump ou d’Hillary Clinton. Beaucoup d'habitants souhaitent le retour d’Obama à Chicago. Mais il devrait rester à Washington deux ans, le temps que sa fille cadette termine le lycée. Ce qui est certain, c’est que comme treize anciens présidents avant lui – c’est une tradition –, Obama fera construire une grande bibliothèque, notamment pour abriter ses archives. Il veut en faire un grand lieu d’échange social et culturel. L’implantation est prévue à Jackson Park, sur le territoire de Chicago, au bord du lac Michigan. Le devis de la bibliothèque a été chiffré à 500 millions de dollars. L’appel aux dons privés est déjà lancé.

2008 - 2016 : L'AMÉRIQUE D'OBAMA

Huit ans après la première élection de Barack Obama et un mois et demi avant celle de son successeur, franceinfo dresse le bilan des deux mandats du premier président noir des Etats-Unis. Reportages, analyses, invités, c'est à suivre mardi 4 octobre sur franceinfo. 

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