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Turquie : à l'approche d'un double scrutin crucial, le principal parti pro-kurde joue sa survie

Alors que les Turcs s'apprêtent à voter pour un double scrutin présidentiel et législatif dimanche, le HDP, principal parti pro-kurde, subit des pressions de toute part.

Article rédigé par Alexandre Billette
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Les partisans de Selahattin Demirtas, candidat à l'élection présidentielle et leader du Parti démocratique du peuple (HDP), brandissent des masques alors qu'ils défilent lors d'un rassemblement à Ankara, le 19 juin 2018 (ADEM ALTAN / AFP)

La Turquie va voter dimanche 24 juin pour un double scrutin présidentiel et législatif. Un scrutin que Recep Tayyip Erdogan a anticipé depuis plus d’un an et demi. L’une des clés de cette élection réside dans le vote kurde. Ce dernier représente 20% de la population en Turquie.

En position de faiseur de roi, le Parti démocratique des peuples (Halkların Demokratik Partisi, HDP), principal parti pro-kurde, pourrait bien empêcher le parti d’Erdogan d’avoir la majorité au Parlement. Mais à Dyarbakir, la ville que les Kurdes considèrent comme leur "capitale" en Turquie, la campagne se déroule sous tension, et l’opposition craint des fraudes massives.

Tuna Bekleviç, candidat indépendant pour la présidentielle, a marché un mois depuis Ankara. 1 000 kilomètres à pied pour porter un message de paix et de fraternité entre Turcs et Kurdes. Dès son arrivée dans la vieille ville de Diyarbakir, les policiers l’ont prévenu : "Tu as le droit de marcher 1 000 kilomètres dans ton pays. Par contre, si tu veux rejoindre les Kurdes, on ne te laissera pas faire un pas."

Être Turc à Diyarbakir, ce n’est pas un problème, mais si vous êtes Kurde, alors même respirer est un luxe

Tuna Bekleviç, candidat indépendant

franceinfo

Pendant des mois, les forces turques et le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ont mené une véritable guerre urbaine dans la vieille ville. Aujourd’hui, le Parti démocratique des peuples (HDP) est considéré par Ankara comme l’antenne politique du PKK. Si le HDP a ouvert ses bureaux de campagne en périphérie de Diyarbakir, le député Ziya Pir ne se fait guère d'illusion sur une supposée égalité de traitement : "Ils utilisent la force de l’État pour mettre la pression sur nos militants et nos électeurs : ils nous demandent des autorisations qui n’existent pas, ils tentent d’intimider les gens. Nous n’avons aucune instance auprès desquelles déposer plainte : c’est le gouverneur qui est responsable des élections, mais les forces de l’ordre sont sous ses ordres."

Les bureaux de vote sous surveillance

Comme une mauvaise nouvelle ne vient jamais seule, une nouvelle loi électorale permettant entre autres de déplacer des bureaux de vote pour raisons de sécurité, doit prochainement entrer en vigueur. Cette mesure concerne particulièrement les régions à majorité kurde. Gözde Soytürk, responsable de Oy ve Ötesi, un organisme indépendant d’observateurs électoraux, demande à ce que les déplacements d'urnes soient dûment justifiés."Pour l’instant la commission électorale n’a pas répondu sur ce point. On sait que les déplacements sont en cours, la commission a déclaré que cela concernerait 144 000 électeurs ! Mais rien n’est encore officiel", explique-t-il. "Nous leur posons la question depuis plusieurs jours : quelles sont les motifs et les raisons de ces déplacements ?", s'interroge ce responsable.

Sous pression, le HDP joue aujourd’hui sa survie politique : le parti doit absolument faire le plein de voix dans ses bastions comme Diyarbakir pour espérer envoyer des députés au Parlement. Et, qui sait, d'empêcher le parti d'Erdogan de décrocher la majorité à l’Assemblée nationale.

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