"Je ne rentrerai que si on m'assure que je serai protégé" : en Turquie, les réfugiés syriens ne sont pas prêts à rentrer au pays
L'objectif de Recep Tayyip Erdogan de créer une zone de sécurité en Syrie ne convainc pas tous les réfugiés syriens en Turquie.
Dans la ville d’Urfa, le quartier syrien s’étend sur une grande rue pleine de restaurants. Dans l’un d’eux, Omar s’active derrière les fourneaux. Il n'est pas contre l'idée de rentrer en Syrie, mais uniquement s’il a des garanties. "Avant tout, il faut que nous ayons la certitude que ce soit réellement une zone de sécurité."
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé une nouvelle fois mardi 15 octobre que l'offensive turque dans le nord de la Syrie se poursuivrait jusqu'à ce que ses "objectifs soient atteints", notamment celui de créer une zone de sécurité pour accueillir les réfugiés syriens en Turquie.
"Il faut que l’on puisse ouvrir un magasin par exemple, poursuit Omar, sans qu’il soit bombardé ou que des milices traînent un peu partout. Nous sommes partis de Syrie parce qu’il y avait des armes dans les mains des jeunes comme des vieux. Il y avait des groupes armés de tous les côtés : l’État islamique, le PKK, l’armée syrienne libre... Je ne rentrerai que si on m’assure que je serai protégé."
Nostalgie du pays
Dans la boulangerie voisine, Mohamed prépare des "manakish", des pizzas syriennes. ll a fui la ville de Raqqa et ses violents combats quand il avait 14 ans. Âgé de 19 ans aujourd'hui, il garde une certaine nostalgie du pays. "Inchallah, j’espère qu’on pourra rentrer un jour. Mais je ne sais pas quand… Je n’ai rien à faire ici, je suis un étranger, je préférerais être chez moi. En plus, la police nous arrête tout le temps, elle nous demande notre carte d’identité, elle fouille notre téléphone… En Syrie, nous n’avions pas ça."
C'est mon rêve de revoir le pays
Mohamedà franceinfo
Pour autant, il ne croit pas à la possibilité de rentrer, surtout depuis que l’armée de Bachar al-Assad s’est déployée de l’autre côté de la frontière. "Je préfère encore que la Turquie contrôle la zone parce que les Kurdes ou l’armée du régime, c’est la même chose, ils travaillent ensemble. Donc si nous allons là-bas, soit ils vont nous obliger à rejoindre leurs troupes, à servir à leur côté, soit ils vont nous interroger, nous jeter en prison ou peut-être même nous tuer."
Une zone de sécurité qui ne rassure pas
Derrière le comptoir, Abdul Fatah, le gérant de la boulangerie, acquiesce. "Moi, je préfère vivre ici. Dans la zone de sécurité, on n’aura pas les mêmes choses... Et puis je ne crois pas que deux à trois millions de réfugiés retourneront là-bas. C’est impossible de trouver un travail par exemple ! Je sais qu’ils promettent que ce sera une zone de sécurité mais ce sera quand ? Cela n’arrivera pas avant un an ou deux…"
Si la Turquie m'autorise à rester ici, je resterai.
Abdul Fatahà franceinfo
Sur sa devanture, le nom de la boulangerie n’est pas écrit en arabe, mais en turc. Un conseil qu’on lui a donné, raconte Abdul Fatah, car quand on est réfugié syrien en ce moment en Turquie, il vaut mieux se montrer discret.
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