Syrie : ce que l'on sait de l'attaque d'un convoi humanitaire de l'ONU près d'Alep
A la suite de ce raid aérien, qui a eu lieu lundi soir, les Nations unies ont suspendu la circulation de tous leurs convois humanitaires en Syrie.
Après cinq ans de guerre en Syrie et plus de 300 000 morts, la fragile trêve présentée comme celle de "la dernière chance" a échoué, lundi 19 septembre au soir, à la suite d'un raid meurtrier contre un convoi d'aide de l'ONU. Que sait-on de cette attaque, alors que Damas et Moscou en rejettent toute responsabilité ?
Que s'est-il passé ?
Lundi soir, au moins 18 des 31 véhicules du convoi qui livrait de la nourriture et des médicaments à 78 000 habitants d'une ville isolée de la province septentrionale d'Alep ont été endommagés par des raids aériens, selon l'ONU. Les carcasses encore fumantes de ces poids lourds et leur cargaison éventrée gisaient, mardi matin, sur le bord de la route, a constaté un correspondant de l'AFP.
L'émissaire des Nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura, a souligné que le convoi s'était ébranlé au terme de longues négociations avec le gouvernement de Bachar Al-Assad.
Notre indignation face à cette attaque est énorme... Le convoi était le résultat d'un long processus d'autorisation et de préparations pour venir en aide à des civils isolés.
Les Nations unies avaient en effet annoncé, plus tôt dans la journée, l'acheminement prochain de ce chargement comprenant notamment de la farine et de l'équipement médical. Bilan des raids : "Environ vingt civils et un membre du personnel du Croissant-Rouge syrien ont été tués, alors qu'ils déchargeaient une aide humanitaire vitale des camions. Une grande partie de l'aide a été détruite", a expliqué la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge dans un communiqué. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), lui, a fait état de 12 morts dans le raid.
Qui a bombardé le convoi ?
L'armée syrienne dément, mardi, que son aviation ait visé un convoi humanitaire la veille, comme l'a fait un peu plus tôt, dans un communiqué identique, le ministère russe de la Défense cité par les agences russes.
L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) n'est pas en mesure de préciser de quelle nationalité étaient les avions qui ont mené ces bombardements, mais il signale qu'aucun groupe rebelle syrien ne dispose de force aérienne. Enfin, sans directement accuser Moscou, le porte-parole du département d'Etat, John Kirby, assure que les Etats-Unis sont "scandalisés" par l'attitude de la Russie, alliée du régime de Damas.
Le correspondant du Monde au Proche-Orient, Benjamin Barthe, est un peu plus direct. Il estime que la trêve en Syrie a vécu. Selon lui, le coup de grâce "a été donné par l’aviation syrienne, qui a multiplié les bombardements, lundi 19 septembre, sur la province d’Alep (...) L’un de ces raids aériens, qui a également pu être mené par l’aviation russe, a détruit un convoi humanitaire affrété par les Nations unies et le Croissant-Rouge syrien." Et de rappeler : "Il s’agit de l’attaque la plus sanglante jamais menée contre un convoi de l’ONU depuis le début de la crise syrienne, en 2011."
Quelles sont les conséquences sur le terrain ?
Première conséquence : la fin de la trêve. Les bombardements reprennent de plus belle dans un pays dévasté depuis cinq ans par une guerre qui a déjà fait 300 000 morts, selon L'Observatoire syrien des droits de l'homme, et plusieurs millions de réfugiés. Deuxième conséquence : les Nations unies suspendent la circulation de tous leurs convois humanitaires en Syrie. Depuis Genève, le porte-parole du Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), Jens Laerke, réclame une "enquête" sur ce raid, tandis que Stephen O'Brien, le patron des opérations humanitaires de l'ONU, s'explique ainsi :
S'il s'avère que cette attaque impitoyable a délibérément visé des humanitaires, alors elle équivaut à un crime de guerre.
D'Alep à la banlieue de Damas, les habitants sont de nouveau plongés dans le bruit des bombardements et restent calfeutrés chez eux. Ils n'ont pu goûter qu'une semaine au plaisir de fréquenter à nouveau les rues de leur ville.
Les pourparlers sont-ils rompus ?
Pas tout à fait. A New York, où s'ouvre l'Assemblée générale des Nations unies, la guerre de Syrie va à nouveau s'imposer dans les discussions entre les chefs d'Etat.
Le Groupe international de soutien à la Syrie (GISS), qui rassemble depuis novembre 2015 une vingtaine de pays et d'organisations internationales – dont les Etats-Unis, la Russie, l'Arabie saoudite, la Turquie et l'Iran – se réunira à nouveau. Nul doute que Washington et Moscou se jetteront les mêmes accusations mutuelles à la figure, les Etats-Unis accusant Moscou et la Syrie de ne pas respecter la trêve, la Russie reprochant à Washington de ménager les "terroristes" rebelles au régime.
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