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Quels risques après la mort d'Oussama Ben Laden ? D'où partiront les représailles, s'il y en a ?

Pour Louis Caprioli, conseiller du groupe GEOS (intelligence économique) et ancien responsable de la lutte anti-terroriste à la DST (direction de la sûreté du territoire *), les jihadistes se réclamant de Ben Laden n'étaient pas à ses ordres, mais à leur compte.
Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié
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Une patrouille nigérienne après des enlèvements revendiqués par l'AQMI de Français salariés d'Areva (AFP/ISSOUF SANOGO)

Pour Louis Caprioli, conseiller du groupe GEOS (intelligence économique) et ancien responsable de la lutte anti-terroriste à la DST (direction de la sûreté du territoire *), les jihadistes se réclamant de Ben Laden n'étaient pas à ses ordres, mais à leur compte.

Ce qui n'empêchera pas ces groupes de réfléchir à des actions d'éclat pour le venger. Trois zones semblent particulièrement sensibles à ce spécialiste de l'anti-terrorisme : les zones tribales du Pakistan, le Yémen et les zones contrôlées en Afrique par l"AQMI (Al Qaïda au Maghreb islamique), qui a revendiqué l'enlèvement d'otages français. Interview.

Y a-t-il des risques de représailles après la mort d'Oussama ben Laden ?

Il y a trois zones à surveiller. Oussama Ben Laden était soutenu par une partie des services secrets pakistanais et il peut y avoir des représailles menées à partir des zones tribales pakistanaises.

Seconde zone : le Yémen, où s"est replié le groupe Al Qaïda de la péninsule arabique après avoir vu nombre de ses membres emprisonnés en Arabie Saoudite. Des attentats ou tentatives d"attentats sont déjà partis de là.

Enfin, il y a l"AQMI (Al Qaïda au Maghreb islamique) en Afrique du Nord. Le "Groupe salafiste pour la prédication et le combat", a pris le nom d'AQMI en 2007, mais il est toujours dirigé par des Algériens. Il donne ainsi l"illusion de représenter Al-Qaïda, ce qu'a accepté Ben Laden. L"AQMI peut s"en sentir redevable et vouloir le venger, d"autant qu"il y a des otages dans les zones tribales qu'il contrôle.

Et les deux journalistes otages de France 3 détenus en Afghanistan, Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier ?

Les deux otages sont détenus par les talibans afghans, qui ont une vision afghane, pachtoune de leur vallée et poursuivent leurs objectifs propres : prendre le pouvoir et faire partir les Américains.

Qui risque de succéder à Oussama Ben Laden ?

Ayman Al-Zawahiri, le numéro deux d"Al Qaïda, peut s"imposer. Il a un passé important, il a fait partie du jihad islamique égyptien. Charismatique et doctrinaire : il a toutes les capacités pour succéder à Ben Laden.

Les alliés des Américains étaient-ils au courant de l'opération, selon vous ?

Le secret de l"opération est une condition de la réussite. En cas d"échec, il y a un risque considérable. C"est normal que les alliés ne soient pas au courant. Oussama Ben Laden était une cible prioritaire pour les Américains : ce compte personnel est désormais réglé.

Est-ce que ça a été une longue préparation pour les Américains ?

Oui, puisque ça dure depuis l"été 2010. Ils ont préparé leur intervention pendant neuf mois. C"était une opération loin de leurs bases qui a montré la puissance logistique des Américains et qui a nécessité une préparation minutieuse. Ils ont posé l"hélicoptère sur la maison pour accroître l"effet de surprise. Ils ont dû répéter sur des maquettes. L"objectif était visiblement d"éliminer Ben Laden.

Ne croyez-vous pas que la décision d"immerger le corps peut susciter la colère ?

A ceux qui estiment que ce n"est pas une façon d"enterrer un musulman, je réponds qu"un vrai musulman n"est pas un terroriste. L"immense majorité des musulmans n"adhère pas au discours de Ben Laden. Mais de toute façon, s"il doit y avoir des représailles, elles auront lieu du seul fait qu"Oussama ben Laden a été tué. Pendant dix ans, il a échappé aux Américains, avec sa mort, c"est un symbole fort qui disparaît, mais pas le terrorisme. Les jihadistes n"étaient pas aux ordres de Ben Laden.

* L'appellation DST a disparu. Lex-DST fait désormais partie de la Direction centrale de la sûreté intérieure

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