Syrie : retour à Raqqa, quatre jours après la chute du groupe État islamique
L'envoyé spécial de franceinfo en Syrie est retourné dans la ville, tout juste libérée. Il témoigne de la situation, quatre jours après.
À Raqqa, quatre jours après la libération de la ville proclamée par les Forces démocratiques syriennes (FDS), la situation est relativement calme. Il n'y a aucun civil et les combats sont terminés, même si on entend ici et là quelques tirs sporadiques, pour certains des tirs de joie, ou des explosions, dues aux mines. Des équipes de déminage ratissent la ville pour déminer ce qui fut la capitale des jihadistes du groupe État islamique.
De très nombreux combattants des FDS ont quadrillé la ville à la recherche de jihadistes qui se seraient cachés dans les tunnels ou les galeries souterraines. La bataille de Raqqa s'est en partie jouée dans ces souterrains, qui ont parfois permis aux jihadistes de prendre les FDS à revers.
Les civils, amers, ne sont pas encore revenus
À l'extérieur de Raqqa, les civils ont afflué dans des camps à Aïn Issa et aux environs. Ils y vivent dans des conditions extrêmement dures. Les civils sont soulagés mais l'amertume pointe. Leur ville est détruite et à reconstruire et ils savent qu'ils devront rester dans ces camps de réfugiés pour six mois, un an, peut-être plus. Chez certains, la colère naît à l'idée que Daesh ait pu régner sur cette ville pendant quatre ans. Ils estiment que la coalition aurait pu les en débarrasser plus tôt.
Pour les très nombreuses femmes seules, avec leurs enfants, qui se retrouvent dans le camp d'Aïn Issa, c'est la tristesse qui domine. Elles n'envisagent pas un retour sans leurs maris, arrêtés et parfois exécutés par les jihadistes, ou morts au combat.
Le rôle des Kurdes suscite les craintes des Arabes
La victoire de la coalition arabo-kurde n'efface pas les divisions. Les Kurdes, qui sont le maillon fort des Forces démocratiques syriennes, soutenues par les États-Unis, ne sont pas toujours vus d'un bon œil. Raqqa est en zone arabe et les Kurdes sont hors de leur zone d'influence, qui est le long de la frontière avec la Turquie. Et les Arabes s'inquiètent de l'arrivée de ces Kurdes, se demandant si ces derniers vont administrer la ville ou la restituer à la société civile de Raqqa, représentée par le conseil civil, porte-parole des habitants.
L'avenir de la Syrie se jouera en partie à Deir ez-Zor
De son côté, Daesh, après avoir été un pseudo-État, va retrouver la clandestinité. Les services secrets kurdes font état de l'existence de cellules dormantes dans la région. Mais au-delà des activités terroristes, la guerre n'est pas finie. La bataille de Deir ez-Zor, dans la province voisine, le long de la frontière irakienne, est toujours en cours. Une double offensive y est menée. D'un côté, les Forces démocratiques syriennes, soutenues par Washington. De l'autre, l'armée de Bachar Al-Assad, avec ses alliés, Hezbollah irakien et Hezbollah libanais, et le soutien de la Russie.
L'objectif de cette double offensive est de reconquérir les territoires occupés par Daesh et les champs pétroliers, pour ensuite négocier le futur de la Syrie. Avec, pour les Kurdes, la possibilité d'une Syrie fédérale qui leur accorderait une autonomie.
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