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Jean-Yves Le Drian qualifie une Française jugée en Irak de "terroriste de Daech", ses avocats lui répondent

Dans une lettre consultée par franceinfo, William Bourdon, Martin Pradel et Vincent Brengarth, avocats de Mélina Boughedir, dénoncent "l'ingérence" du ministre des Affaires étrangères.

Article rédigé par franceinfo
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La jihadiste Mélina Boughedir arrive à son procès à Bagdad (Irak), le 19 février 2018. (AFP)

"Elle est défendue, nous faisons en sorte que notre consultat suive sa situation, mais c'est à la justice irakienne de rendre son verdict à l'égard d'une terroriste de Daech qui a combattu contre l'Irak." Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a estimé, jeudi 31 mai, que la Française Mélina Boughedir devait être jugée dans ce pays.

Cette Française de 27 ans, mère de quatre enfants, a accompagné son mari combattre dans les rangs du groupe Etat islamique. Elle a été arrêtée durant l'été 2017 à Mossoul. Elle a été condamnée en février à sept mois de prison pour entrée "illégale" en Irak. Mais la cour de cassation irakienne a réexaminé son dossier et Mélina Boughedir est rejugée depuis le 2 mai, cette fois pour "terrorisme". Une prochaine audience est prévue dimanche 3 juin.

"Elle est jugée sur les lieux de ses exactions"

"Madame Boughedir est une combattante. Quand on va à Mossoul en 2016, c'est pour combattre et donc elle est jugée sur les lieux de ses exactions. C'est la logique normale. Elle a combattu contre les unités irakiennes, elle est jugée en Irak", a déclaré Jean-Yves Le Drian à la chaîne d'information en continu LCI.

 "Nous n'avons pas vocation à nous mêler des jugements" mais "nous condamnons totalement la peine de mort" et "nous souhaitons qu'elle ne soit pas appliquée en Irak", a-t-il ajouté, alors que Mélina Boughedir risque la peine capitale.

"Une ingérence inacceptable"

En réponse, les avocats de la Française, dénoncent, samedi, "un très grave écart de langage délibéré". William Bourdon, Martin Pradel et Vincent Brengarth s'expriment dans une lettre adressée au ministre des Affaires étrangères, consultée par franceinfo puis mise en ligne sur le compte Twitter de l'un des avocats.

"Dans une complaisance indécente avec l’opinion publique, vous avez gravement foulé au pied les principes fondamentaux, la présomption d’innocence, la séparation des pouvoirs, les droits de la défense dont l’exercice est déjà extrêmement entravé", écrit le trio de conseils. 

"Ces déclarations sont d’autant plus graves que notre cliente risque la peine de mort, et que son avocat irakien n’a pas pu prendre connaissance de son dossier, ni la rencontrer en prison avant son procès, poursuivent-ils. Vos déclarations sont aussi dommageables, car il reste probable que son procès soit expéditif." 

Et de conclure : "Personne ne peut douter dans ces circonstances, si une peine lourde était prononcée demain, que celle-ci serait immédiatement mise en relation avec l’ingérence inacceptable dont vous vous êtes rendu responsable."

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