: Cartes Liban : cinq cartes pour comprendre un pays riche mais déchiré par les guerres
Le Liban, épicentre aujourd’hui d'une potentielle guerre régionale au Proche-Orient, a toujours été le point de rencontre d’intérêts qui le dépassent. En particulier ceux des grands empires. Depuis l’Antiquité, la position géographique et l’extrême diversité culturelle et cultuelle de ce petit pays en fait le lieu d’une confrontation parfois harmonieuse, souvent brutale aussi, des uns et des autres. Des Grecs, des Romains, des Byzantins, des Croisés ou des Arabes, des Ottomans et des grands empires d’Occident et d’Orient, jusqu’aux plus récents d’entre eux.
Situé à l’extrême ouest du Croissant fertile, il constitue aussi un pôle important d’un "croissant" plus géopolitique : l’arc chiite. Du golfe Persique à Beyrouth en passant par Téhéran (en Iran), Bassora (en Irak) ou Damas (en Syrie), il relie une branche minoritaire de l’Islam dont l’influence ne cesse de croître depuis la révolution islamique de 1979 en Iran.
On le connaît dans ses frontières actuelles depuis 1920. 10 452 km2, soit une superficie équivalente à la Gironde, que l’on traverserait en un clin d’œil par les airs, en quelques heures par la route. La plus grande distance à vol d’oiseau ne dépasse pas 200 kilomètres du nord au sud, et 90 kilomètres d’est en ouest. Mais le caractère montagneux du pays du Cèdre, traversé du nord au sud par deux massifs accidentés, crée des espaces géographiques très divers tout autant qu’il complique la circulation. Il faut ainsi au moins deux heures pour relier Beyrouth à la frontière syrienne à l’est, alors que seuls 80 kilomètres les séparent.
Mosaïque complexe
La géographie complexe du Liban se double d’une grande diversité de populations. Le pays compte 18 communautés ethniques et/ou religieuses, qui forment le socle d’un système politique singulier : un modèle de démocratie confessionnelle où le pouvoir est distribué entre les représentants des principales communautés, avec pour objet la recherche du consensus. Consensus qui, force est de le constater, a toujours été difficile à trouver, en particulier lorsque se bousculent les influences extérieures : les réfugiés palestiniens depuis 1948, les ingérences syrienne et israélienne pendant et après la guerre civile (1975-1991), la guerre par procuration menée par l’Iran à travers le Hezbollah, qui verrouille la gouvernance libanaise depuis 2005 et s’aventure unilatéralement dans des guerres chez les voisins (en Syrie) ou avec les voisins (Israël).
Depuis le 17 septembre 2024, l’État hébreu a déclenché une vaste opération au Liban, dénonçant le harcèlement dont sont victimes ses populations du nord, en particulier depuis la réponse armée d’Israël au massacre du 7 octobre 2023 perpétré par le Hamas dans les régions limitrophes de Gaza. Tous les jours, des roquettes tirées par les miliciens du Hezbollah depuis le sud du Liban tombent sur les villages de Galilée, en violation manifeste de la résolution 1701 des Nations unies qui, après la guerre de 2006, préconisait le déploiement de l’armée libanaise en lieu et place de la milice chiite.
Ce n’est donc pas un hasard si la contre-offensive israélienne vise essentiellement les régions chiites, où le Parti de dieu – la traduction littérale de "Hezbollah" – stocke ses armes et munitions, parfois dans des milieux urbains très denses et au sein de la population civile.
Délétère ciblage
C’est notamment le cas à Beyrouth, qui concentre, dans sa partie méridionale, une forte population chiite. De Chiyah à Haret Hreik sont implantés des lieux de décision stratégiques du Hezbollah. C’est dans cette zone, que l’on appelle aussi Dahieh, la banlieue, que se sont réunis les cadres du Hezbollah après que leurs principaux moyens de communication ont été détruits, entre le 17 et le 18 septembre. Au beau milieu des commerces et immeubles d’habitation. C’est donc aussi cette zone qui est ciblée par les projectiles israéliens, avec de lourds dégâts collatéraux – comprendre de nombreuses victimes civiles.
Ce ciblage des régions chiites a provoqué de forts mouvements de population, vers les régions chrétiennes notamment. Au risque de provoquer de dangereux déséquilibres, des tensions intercommunautaires susceptibles de générer d’irréparables violences.
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