: Témoignage "Les gens sont prisonniers" : de retour de Rafah, un humanitaire décrit une situation chaotique pour les civils
Au cours de sa longue carrière d'humanitaire, Jean-Pierre Delomier a vécu des situations dramatiques. Mais celle que le directeur adjoint pour les opérations internationales de l'ONG Handicap International a découverte à Rafah repousse toutes les limites. Les pourparlers sur une trêve piétinent entre le Hamas et Israël : les médiateurs internationaux ont poursuivi mercredi 6 mars leurs négociations pour arracher un accord de trêve à Israël et au Hamas à Gaza, où la mort et la faim sont désormais le lot quotidien de la population civile après cinq mois de guerre.
La population palestinienne de la bande de Gaza vit en effet un calvaire humanitaire, confrontée à des bombardements incessants et plongée dans un dénuement total. 2,2 des 2,4 millions d'habitants sont menacés de famine et 1,7 million ont été contraints de fuir leur foyer selon l'ONU. Des chiffres qui prennent désormais des visages, grâce à la voix de Jean-Pierre Delomier. "Les gens sont prisonniers d'un endroit dont ils ne peuvent pas sortir. Ils se sont déplacés... pour arriver dans un cul-de-sac", décrit-il ainsi à franceinfo après son retour d'une mission dans l'enclave palestinienne.
"La première chose qui est frappante, ce sont les piétons, les personnes qui marchent dans la rue, parce que les trottoirs sont jonchés de tentes, tous les espaces sont occupés par des tentes et des abris. Il n'y a plus de circulation automobile puisqu'il y a une pénurie de carburant", raconte-t-il, évoquant un sentiment d'effroi qui l'a saisi en pénétrant dans l'enclave.
Des restes explosifs "jonchent le sol"
Selon l'ONU, près de 1,5 million de Palestiniens, la plupart des déplacés, sont massés à Rafah, où Israël a annoncé préparer une offensive terrestre pour, dit-il, parvenir à la "victoire totale" sur le Hamas après les massacres perpétrés lors des attaques du Hamas, le 7 octobre 2023, qui ont fait près de 1200 morts. Dans cette ville non loin de l'Egypte, les infrastructures de base, notamment de santé, sont détruites ou hors services.
Quand il leur reste un peu d'argent, les habitants se procurent quelques denrées à des vendeurs ambulants, d'autres fouillent les décombres à la recherche de nourriture.
"Chaque recherche de nourriture ou d'eau est une quête qui les amène à prendre des risques incommensurables"
Jean-Pierre Delomierà franceinfo
"Il y a eu des bombardements tellement intensifs qu'aujourd'hui on estime à 3 000 les restes explosifs de guerre qui ne sont pas explosés et qui jonchent le sol du chemin du retour, pour ceux qui envisageront de retourner dans le Nord", poursuit l'humanitaire. La situation est d'autant plus tragique que des kilomètres de camions chargés d'aide humanitaire sont toujours bloqués côté égyptien.
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