Reportage "J'étudie la Torah, donc je n'irai pas à l'armée" : en Israël, l'exemption militaire des juifs ultra-orthodoxes fait débat

Alors que l'armée israélienne a besoin de mobiliser de nouveaux soldats, le cas des juifs ultra-orthodoxes, jusqu'à présent exemptés de service militaire, pose question dans le pays.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le quartier ultra-orthodoxe de Bnei Brak, à Tel-Aviv, le 29 octobre 2023. (AGATHE MAHUET / RADIOFRANCE)

C’est le premier coup de semonce de la Cour suprême israélienne, la plus haute juridiction du pays, contre l’exemption militaire dont bénéficient, depuis des années, les juifs ultra-orthodoxes. Depuis lundi 1er avril, les élèves des Yéshivotte, ces écoles religieuses, en âge d’aller à l’armée, c’est-à-dire entre 18 et 24 ans, ne recevront plus de subventions pour étudier la Torah. Au bout de cette politique punitive, il y a ce que les Hardeim - ceux qui craignent Dieu - craignent le plus : être enrôlés de force dans l’armée.

Quartier de Tela-Shomer, à l'est de Tel Aviv. Chapeaux noirs, longs manteaux, une trentaine de jeunes ultra-orthodoxes attendent en file indienne, un papier à la main, l'ouverture du bureau de recrutement de l'armée : "C'est un document pour être exempté. On le présente et on est exempté un an. Là, vous voyez, il y a la signature du rabbin et celle du demandeur." Comme Haïm, ils ont tous entre 18 et 24 ans, l'âge du service militaire et chaque année, ils reviennent au même endroit, à la même date et avec toujours la même demande.

"C'est nous qui veillons sur eux"

"J'étudie la Torah, donc je n'irai pas à l'armée." Le jeune homme prend la parole pour le groupe : "Sans notre travail sur la Torah, les soldats ne pourraient pas exister. C'est nous qui veillons sur eux grâce à nos études du livre sacré." L'Armée de Dieu au service de l'Armée nationale. Le ministère de la Défense a évalué les besoins en hommes à 7 000 à très court terme.

Les ultra-orthodoxes en âge de faire leur service militaire sont dix fois plus. Alors, avec la guerre, le regard de la société civile a changé : "On voit combien de soldats ont été tués ou blessés. On a besoin de plus de soldats." Rivka a perdu des amis à Gaza et son frère a été grièvement blessé.

Cette chercheuse, spécialiste de la société ultra-orthodoxe est croyante, traditionaliste et elle comprend, malgré les drames qui la touchent personnellement, l'état d'esprit des religieux les plus extrêmes : "Je pense que les ultra-orthodoxes ont peur, pas forcément d'être tués, mais plutôt d'être laïcisé. Mais les ultraorthodoxes sont sincèrement concernés. Ils prient, ils essaient de faire des choses à leur manière, mais ils savent que ce n'est pas assez".

"Ils ont conscience que les Israéliens sont très en colère contre eux."

Rivka

à franceinfo

La réponse d'un des plus grands rabbins d'Israël a choqué, il y a moins d'un mois, une grande partie de la population. Yitzhak Yosef a affirmé que s'ils étaient contraints de servir dans l'armée, les ultra-orthodoxes quitteraient le pays. Le gouvernement peut encore proposer un projet de loi permettant d’aménager leur service militaire et sauver sa coalition composée de partis ultra-orthodoxes. Ce projet devra être validé par la Cour Suprême. Si ce n'est pas le cas, les sanctions financières contre les étudiants des écoles religieuses pourraient encore se durcir et l’enrôlement dans l’armée être imposé par la force. Prochaine échéance : le 9 août.

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