"La situation est catastrophique" : l'économie s'effondre en Cisjordanie après des mois d'affrontements entre l'armée israélienne et des palestiniens
Les tensions sont particulièrement fortes à Jénine, une ville dans le Nord de la Cisjordanie occupée. Les clients ne viennent plus par peur des affrontements et parce que la ville est parfois coupée du monde par l'armée israélienne.
Les étals du marché de Jénine sont bien remplis, les vendeurs sont là, mais la foule est clairsemée. Les taxis jaunes sont vides, à l'arrêt sur le parking. Dans cette ville du Nord de la Cisjordanie occupée, l'économie est au bord de l'effondrement. Elle a souffert de la pandémie de Covid et souffre désormais de l'inflation et des affrontements incessants entre l'armée israélienne et les civils palestiniens.
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En Cisjordanie, la situation est très tendue depuis les attentats commis en Israël au printemps dernier. Les affrontements y sont quasi quotidiens entre l'armée israélienne qui parle de "lutte contre le terrorisme" et les combattants palestiniens qui se posent en "martyrs et résistants". Depuis le 1er janvier 2022, 18 personnes, essentiellement des civils, ont été tuées dans des attentats en Israël et 97 Palestiniens en Cisjordanie, civils et combattants. Jénine est particulièrement touchée. C'est à cet endroit que la journaliste palestinienne de la chaîne Al-Jazeera, Shireen Abu Akleh, a été tuée d'une balle dans la tête, le 11 mai. L'armée israélienne a reconnu, le 5 septembre, une "forte possibilité" d'avoir tué la reporter. C'est dans ce contexte que le président palestinien Mahmoud Abbas doit s'exprimer, vendredi 23 septembre, à l'Assemblée générale des Nations unies à New York.
La vie sous les balles repousse les clients
Dans les années 2010 et jusqu'à la pandémie de Covid, Jénine était plutôt prospère, attirant notamment des arabes israéliens de Nazareth ou d'Umm al-Fahm, mais tout s'est arrêté. "La situation ici est catastrophique, raconte Mohamad vendeur d'équipements sportifs et paramilitaires. Tu te couches le soir avec le bruit des tirs et tu te réveilles le matin en apprenant que telle personne a été tuée ou que tel ami a été arrêté par les Israéliens." Le commerçant dénonce les "opérations militaires" de l'armée israélienne : "Ils tuent des gens, ce n’est pas normal". "À cause de ça, les gens ne veulent plus venir faire leurs courses à Jénine. Ils ont peur, ils préfèrent aller ailleurs", explique Mohamad.
Mais ce n'est pas définitif, pour Ali, 26 ans. "Espérons que la situation s'améliore pour les gens qui viennent à Jénine et pour l'économie de Jénine", dit le Palestinien employé depuis quatre ans dans une boutique de bricolage et d'électroménager.
"Après chaque opération israélienne à Jénine on fait toujours la grève quand un Palestinien est tué, c'est pour respecter les martyrs."
Ali, un Palestinien de 26 ansà franceinfo
Après la mort d'un officier de l'armée israélienne, mercredi 14 septembre, les points d'entrée à Jénine ont été fermés. Ils ont rouvert quelques jours plus tard, mais l'affluence n'est vraiment plus la même, selon Mohamad Jamal, Directeur général de la Chambre de commerce et d'industrie de Jénine : "Avant les opérations militaires il y a cinq mois, le nombre de voitures qui entraient chaque jour en ville depuis les checkpoints était d'environ 7 000, maintenant on parle seulement de 3 000."
"L'économie a besoin de paix. Israël ne nous facilite pas la tâche."
Mohamad Jamal, Directeur général de la Chambre de commerce et d'industrie de Jénineà franceinfo
Mohamad Jamal aimerait que les Israëliens "mettent fin à l'occupation". Après, "l'économie ira bien, la politique ira bien, la vie des gens ira bien, même nos légumes iront bien, assure le responsable. Faites-moi confiance, même leur goût sera différent !" Selon les Nations unies, le taux de chômage atteint à cet endroit les 26%. En un an, la part de population en insécurité alimentaire est passée de 9% à 23%.
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