Attaque du Hamas contre Israël : "L'humiliation la plus grande" pour "le gouvernement le plus dur" d'Israël, estime le géopolitologue Dominique Moïsi
"C'est le gouvernement le plus dur qu'Israël ait connu depuis sa création qui se trouve confronté à l'humiliation la plus grande sur le plan de la sécurité", estime le géopolitologue Dominique Moïsi, invité de franceinfo lundi 9 octobre, après les attaques surprises du Hamas contre Israël samedi 7 octobre. L'offensive lancée par le mouvement islamiste palestinien au pouvoir à Gaza est une "humiliation totale" pour le pouvoir israélien, a-t-il répété.
Au troisième jour d'affrontements qui ont fait plus de 1 100 morts dans les deux camps, "l'union sacrée" prévaut. Le président israélien, Isaac Herzog, a appelé samedi 7 octobre à "l'unité dans le peuple, au Parlement et dans un gouvernement d'urgence". Pour le moment, c'est l'union sacrée face à l'horreur et à la barbarie. Demain, effectivement, on se posera des questions", prévient le spécialiste des relations internationales.
Benyamin Netanyahou acculé par l'attaque du Hamas
Benyamin Netanyahou, revenu au pouvoir en décembre 2022 après avoir fait sa campagne sur le thème de la sécurité et "dénonçait la gauche israélienne pour sa mollesse, en particulier à l'égard des Palestiniens" est acculé par l'attaque du Hamas. D'autant que Benjamin Netanyahu est à la tête d'un des gouvernements les plus à droite qu'ait connu Israël. "Il y a eu une dérive du côté israélien qui me paraît incontestable. Vous avez l'entrée au gouvernement de personnalités d'extrême droite dont le comportement est carrément raciste. Ces personnalités n'auraient jamais dû faire partie du gouvernement israélien", estime Dominique Moïsi.
"Il y a au sein du gouvernement israélien des personnalités d'extrême droite qui sont non seulement idéologiquement extrêmes, mais bureaucratiquement incompétentes"
Dominique Moïsi,à franceinfo
Pour Dominique Moïsi, Israël a "surestimé" sa "supériorité". "Je crois qu'il y a un phénomène spécifique, l'hubris, le sentiment de supériorité, la conviction que l'ennemi n'osera pas vous attaquer, c'est ce qui s'est passé en 1973", analyse le géopolitique qui fait le parallèle entre l'attaque inédite du Hamas contre Israël samedi 7 octobre, et la guerre israélo-arabe de 1973 qui avait pris les forces israéliennes totalement par surprise, entraînant la mort de 2 600 Israéliens et faisant au moins 9 500 morts et disparus côté arabe en trois semaines de combat.
Dominique Moïsi pointe également "le nombrilisme de politique intérieur israélien". Depuis la présentation en janvier d'un projet de réforme du système judiciaire par le gouvernement du Premier ministre, Benjamin Netanyahu contribue à une intense polarisation politique entre partisan et adversaire de la réforme. À l'origine d'un des plus importants mouvements de contestation de l'histoire d'Israël, cette réforme adoptée en juillet par la Knesset, restreint les pouvoirs de la Cour suprême pour invalider une loi ou une décision du gouvernement.
"Ça a joué certainement un rôle dans la décision palestinienne d'attaquer Israël de la sorte", estime le géopolitologue. "On ne songe pas à réformer les structures de la maison quand il y a le feu qui couve à l'extérieur de celle-ci", ajoute-t-il.
Une solution à deux Etats impensable
La guerre va durer, affirme le spécialiste des relations internationales, qui assure qu'"à un moment donné, il faudra vivre avec l'autre" mais la solution à deux États, israélien et palestinien, "paraît effectivement impensable". "Il faudra repasser par la table des négociations", martèle-t-il "Tout dépend de quelle est votre priorité. Faire en sorte que vous et vos enfants et petits enfants aient une vie normale qui ne soit pas dominée totalement par la violence et l'obsession de la violence ou le nationalisme de la terre à tout prix ?", s'interroge-t-il.
"Je ne crois pas que les valeurs juives passent par la priorité donnée à la terre, c'est la vie qui doit l'emporter et pas l'obsession de la possession de la terre", tranche-t-il.
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