"Je ne veux pas qu'Israël devienne une dictature" : à Jérusalem, des milliers de personnes rassemblées pour s'opposer à la réforme du système judiciaire
"Quiconque se soucie d'Israël doit faire grève aujourd’hui" - voilà le titre de l'édito d'Haaretz lundi 13 février, le journal quotidien israélien de gauche. En Israël, un mouvement de grève nationale a été lancé pour exprimer un mécontentement face à la réforme du système judiciaire.
Proposée par la nouvelle coalition, la plus à droite de l'histoire du pays, elle limiterait considérablement la capacité de la Cour suprême à invalider des lois et des décisions du gouvernement. Lundi, alors qu'a lieu une première lecture de certaines des dispositions controversées, une marée de drapeau bleu et blanc, des chants, le bruit des casseroles, s'est réunie devant la Knesset, le Parlement israélien. 70 000 personnes selon la police, plus 100 000 selon les organisateurs : des chiffres considérables pour ce petit pays de 9 millions d’habitants
"Trop de pouvoir entre les mains du gouvernement"
Parmi les manifestants, des jeunes, des personnes plus âgées, des familles, et surtout des Israéliens de tous horizons avec une chose en commun : leur opposition à cette réforme judiciaire et à ce nouveau gouvernement.
Schlomit, 69 ans, est venue spécialement de Tel Aviv. "Nous courrons un très grand danger de transformer notre démocratie en monarchie ou en un régime non démocratique", estime-t-elle. "Nous avons vu ce qu'il s'est passé en Hongrie, en Turquie, en Pologne. La séparation des pouvoirs se cassera, et il y aura trop de pouvoirs entre les mains du gouvernement, prévient Schlomit. Ils travaillent déjà très rapidement avec une attitude très brutale. Ils ne sont même pas prêts à écouter l'opposition !"
Même son de cloche chez Réguev, musicien israélien d'une trentaine d'années, lui aussi venu de Tel-Aviv. "Je ne veux pas qu’Israël deviennent une dictature." Selon lui, cette réforme "va changer la séparation des pouvoirs". "Ça donnera une force considérable au gouvernement, alerte-t-il. Peut-être que nous aurons encore des élections, certes, mais plus de séparation des pouvoirs comme dans les pays démocratiques."
Reguev tient une pancarte en hébreu et en arabe : "une pensée aux Palestiniens", dit-il. "Nous ne pouvons pas parler de démocratie si nous régnons sur quelques millions de personnes qui n'ont pas de droits civiques les plus basiques", dénonce-t-il. "Ils n'ont pas de droit de vote sur le gouvernement. Nous contrôlons tout le territoire, et en fait, c'est déjà un apartheid". "On sait très bien pourquoi Netanyahou veut affaiblir le système judiciaire", ajoute-t-il, en référence à son procès pour corruption.
Manifestations hebdomadaires depuis plus d'un mois
Cette manifestation s'inscrit surtout dans la suite des manifestations hebdomadaires, qui ont commencé à Tel Aviv il y a six semaines. Benyamin Netanyahou est revenu au pouvoir fin décembre. Son ministre de la Justice a annoncé début janvier ce projet de réforme controversée qui vise a accroître le pouvoir des élus sur celui des magistrats. Cette réforme limiterait considérablement la capacité de la Cour suprême à invalider des lois et des décisions du gouvernement.
Alors à Jérusalem, à Tel Aviv, à Haïfa, les Israéliens qui s'y opposent manifestent chaque samedi soir. Les députés de l'opposition sont aussi mobilisés. Même le président Isaac Herzog s'est adressé à la nation dans un discours télévisé et a appelé au dialogue pour mettre fin à la "polarisation" qui divise selon lui le pays.
Les manifestants se disent, eux, près à manifester pendant des mois. La coalition a, en effet, morcelé sa réforme en plusieurs projets et prévoit de les voter un à un, durant des mois.
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