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Israël : Marwan Barghouti, pivot de la grève de la faim des détenus palestiniens

Israël ne "négociera pas" avec les prisonniers palestiniens en grève de la faim à l'appel de Marwan Barghouti, a affirmé le ministre de la Sécurité intérieure. Portrait d’un leader condamné à perpétuité, en qui certains voient un futur président palestinien.
Article rédigé par Eléonore Abou Ez
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Marwan Barghouti, poignets menottés, fait le V de la victoire en allant au tribunal de Tel Aviv où se tient son procès, le 20 mai 2004. (DAVID SIVERMAN /  AFP)

Environ 1 500 Palestiniens détenus en Israël ont entamé, lundi 17 avril, une grève de la faim collective lancée par Marwan Barghouti, responsable du Fatah condamné à la prison à perpétuité. Par cette grève d'une durée indéterminée, inédite depuis des années, les détenus entendent protester contre leurs mauvaises conditions de détention et contre la pratique israélienne de détention administrative. Celle-ci a été appliquée à des milliers de personnes depuis les années 1980. Aux yeux des autorités israéliennes, en revanche, le jeûne entamé par les prisonniers, dont bon nombre ont été condamnés pour des attaques ou des projets d'attaques contre Israël, est motivé par des considérations politiques.

Cette grève de la faim vise à "mettre fin aux abus" de l'administration pénitentiaire israélienne, avait indiqué Marwan Barghouti, dans une tribune envoyée au New York Times depuis sa prison de Hadarim, dans le nord d'Israël. En mesure de rétorsion, il a été placé à l'isolement dans une autre prison.

"Terroriste" ou "Mandela palestinien" ?

Marwan Barghouti, 57 ans, est l’un des inspirateurs du deuxième soulèvement palestinien contre l’occupation israélienne en 2000. Alors qu’il était député et secrétaire général du Fatah en Cisjordanie, le responsable palestinien est arrêté en 2002 par les forces israéliennes après un attentat à Tel Aviv qui a coûté la vie à trois civils israéliens.

Dès son arrestation en 2002, Marwan Barghouti voit sa popularité monter en flèche et apparaît comme un successeur potentiel à Yasser Arafat. Après quatorze ans en prison, "il a plus d’influence que jamais", souligne son épouse Fedwa, elle aussi cadre dirigeante du Fatah. Marwan Barghouti a obtenu plus de 70% des voix exprimées au Comité central du parti historique palestinien.

Reconnu par un tribunal israélien coupable d’implication dans des attentats, Marwan Barghouti a été condamné à cinq peines de prison à vie. Depuis, il est considéré par beaucoup d’Israéliens comme un "terroriste". A l'inverse, les Palestiniens voient en lui une figure de proue de la lutte contre l’oppression. Ils le considèrent comme un prisonnier politique qu’ils surnomment le "Mandela palestinien".

Militant de la première heure du Fatah

Diplômé en sciences politiques et père de quatre enfants, Marwan Barghouti est un militant de la première heure. C’est lui qui fonde la branche des chabiba, "les jeunes", au sein du mouvement Fatah, alors qu’il n'est encore qu'adolescent. C'est lui aussi qui est en première ligne lors de l’Intifada de 1987 avant d’être arrêté puis expulsé pendant sept ans en Jordanie.

Marwan Barghouti se prononce pour la lutte armée qui vise selon lui à mettre fin à l’occupation israélienne des Territoires palestiniens. Il se déclare en même temps opposé à des attentats aveugles. Le prisonnier palestinien le plus populaire dans les Territoires se veut avant tout un homme politique.

Depuis sa cellule, il adresse de nombreux messages à son peuple via la publication régulière de lettres ouvertes. Marwan Barghouti insiste notamment sur la réconciliation des Palestiniens divisés depuis la victoire du Hamas aux législatives de 2006. "C’est un homme qui, de sa prison, joue et jouera, une fois libéré, c'est certain, un rôle majeur pour bouger les lignes et ouvrir de nouvelles relations avec Israël", disait de lui en 2013 la vice-présidente du Parlement européen, Isabelle Durant, citée par Le Point.


Des femmes palestiniennes, assises près du mur de séparation entre Ramallah et Jérusalem, sur lequel figure un dessin appelant à la libération du prisonnier Marwan Barghouti.  (Abbas Momani-AFP)

Aujourd’hui, il apparaît comme un successeur possible au président Mahmoud Abbas, âgé de 82 ans et très contesté.

En cas d'élection présidentielle, le détenu palestinien le plus prestigieux l’emporterait dans tous les cas de figure. Avec 41% des voix, il devancerait le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, qui totaliserait 33%, et le président sortant Mahmoud Abbas, qui tomberait à 21%, selon un sondage du Palestinian Center for Policy and Survey Research. Encore faut-il qu'il retrouve le chemin de la liberté pour y participer.

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