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Gaza: le Hamas durcit son pouvoir en relançant la chasse aux collaborateurs

Le mouvement islamiste palestinien qui contrôle la bande de Gaza a procédé, le 6 avril 2017, à la pendaison de trois hommes accusés de collaboration avec Israël. Des exécutions qui interviennent moins de deux semaines après l’assassinat d’un haut responsable militaire du Hamas. Une pratique, condamnée par Human Rights Watch, qui révèle un durcissement de la nouvelle direction du mouvement.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
La police du Hamas escorte une ambulance transportant les corps des trois Palestiniens pendus, le 6 avril 2017 à Gaza, pour collaboration avec Israël.

En ce Jeudi matin dans la bande de Gaza, trois Palestiniens accusés de collaboration avec l’ennemi israélien ont été pendus sur un terrain d’entraînement, à l’intérieur d’un complexe de la police du territoire palestinien contrôlé par le mouvement Hamas.

Des exécutions en présence de responsables du Hamas et de journalistes 
Selon le journaliste de l’AFP, autorisé à assister aux exécutions, les trois hommes, âgés de 55, 42 et 32 ans étaient revêtus de l’uniforme rouge des condamnés à mort, avaient les pieds et les mains enchaînées et le visage recouvert.
 
Amenés à la potence par des policiers armés et masqués, à un quart d’heure d’intervalle, ils ont été mis à mort en présence de hauts responsables du Hamas, de représentants des différents groupes palestiniens et, pour la première fois en dix ans de pouvoir islamiste, d’un groupe de journalistes.
 
Cette première exécution collective depuis 2014 est, selon Tayssir al-Batch, le chef de la police du Hamas, «un message envoyé aux services de sécurité de l’ennemi et aux collaborateurs».
 
Elle intervient moins de deux semaines après l’assassinat de Mazen Faqha, un haut responsable militaire du Hamas, près de son domicile dans le quartier Tell al-Hawa au sud-ouest de la ville de Gaza. Abattu de quatre balles dans la tête, selon le porte-parole de la police gazaouie. Son crime avait aussitôt été attribué aux services israéliens et leurs collaborateurs.

Une préparation de l'opinion gazzaouie à des «mesures radicales» 
Si ces dernières exécutions ne sont pas en relation avec cet assassinat mais avec des faits antérieurs, elles font toutefois partie d’une campagne d’intimidation des personnes soupçonnées de fournir des renseignements à Israël et de préparation de l’opinion publique dans le territoire palestinen à des «mesures radicales».
Des Palestiniennes manifestant devant la prison Ansar de Gaza City, le 5 avril 2017, pour réclamer le châtiment des personnes espionnant pour le compte d'Israël. (Majdi Fathi/NurPhoto/AFP)
 
Condamnées par l’ONG de défense des droits de l’Homme, Human Rights Watch, qui estime que ce n’est pas avec cette «pratique barbare» que le Hamas instaurera «la sécurité ou la stabilité», ces exécutions attestent en tout cas d’une radicalisation du pouvoir islamiste à Gaza.
 
L’assassinat de Mazen Faqha s’est produit quelques semaines après l’accession de Yahya Sinouar à la tête du Hamas. Un militaire discret, proche de l’Iran et des Frères Musulmans et qui a fait sa carrière dans le renseignement, la sécurité et la chasse aux collaborateurs. Son ascension marque une rupture avec la précédente direction du mouvement qui cherchait à doter le Hamas d’une image «fréquentable».

Depuis le Qatar où il est installé, le chef du bureau politique du Hamas en instance de départ, Khaled Mechaal, avait en effet annoncé fin mars la publication imminente d’un addendum à la charte du mouvement. Un document selon lequel le mouvement islamiste serait prêt à reconnaître les frontières de 1967, retirer les passages jugés antisémites du texte initial et prendre ses distances avec la confrérie des Frères Musulmans.

La mort de Mazen Faqha, l'hypothèse d'une liquidation interne 
Un durcissement donc du pouvoir dans la bande de Gaza, qui pourrait accréditer l’hypothèse «de luttes intestines au sein du Hamas, voire d’un règlement de compte de la part de salafistes rivaux du mouvement» évoquée par l’AFP, en l’absence d’information précise sur la responsabilité d’Israël dans le meurtre du responsable palestinien.
 
Une optique partagée par le ministre israélien de la Défense qui a démenti l’implication d’Israël dans ce crime. «Nous ne cherchons pas l’aventure… Le Hamas est connu pour ses assassinats en interne, pour sa façon de régler ses comptes, a déclaré Avigdor Lieberman. Je leur suggère de regarder de ce côté-là», a-t-il ajouté.

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