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Charles Enderlin sur le rôle de Mohamed Morsi dans l'arrêt des violences à Gaza

Le correspondant de France 2 en Israël revient sur la médiation menée par le président égyptien. Laquelle a conduit à un accord de cessez-le-feu dans la bande de Gaza, le 21 novembre 2012 au Caire, entre Israël et le Hamas palestinien. Membre des Frères musulmans, dont est issu le Hamas, Mohamed Morsi dirige un pays lié depuis 1979 avec l'Etat hébreu par un traité de paix.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton rencontre le président égyptien Mohamed Morsi au Caire, le 21 Novembre 2012. Une visite placée sous le signe d'une intense activité diplomatique visant à mettre fin à l'opération israélienne dans la bande de Gaza. (AFP PHOTO / KHALED DESOUKI )
Quel rôle a joué Mohamed Morsi dans la négociation ?  En sort-il renforcé aux yeux des Egyptiens, des Palestiniens, et plus généralement aux yeux du monde ?
C’est pour des raisons stratégiques majeures que Benjamin Netanyahu et Barack Obama ont donné le rôle principal à Mohammed Morsi. Il s’agissait d’impliquer ce Frère musulman dans un accord avec l’Etat qu’il déteste le plus au monde, Israël, et une grande puissance qu’il a toujours critiqué, les Etats-Unis. En juillet dernier encore, Mohammed Badi, le Guide suprême de la Confrérie répétait qu’il était «du devoir de chaque musulman d’œuvrer pour sauver Al-Qouds (Jérusalem) des mains des violeurs (les Israéliens) et de nettoyer la Palestine des griffes de l’occupation». Les dirigeants israéliens prennent soin d’ignorer ce genre de déclaration et, en l’occurrence, les critiques virulentes de Morsi à l’encontre de l’opération Pilier de nuage (en hébreu), qualifiée de «de grotesque agression flagrante contre l'humanité».

Dans ce contexte, les remerciements chaleureux proférés le 21 novembre au soir par Avigdor Lieberman, le ministre israélien des Affaires étrangères, sont à inscrire dans l’histoire de la région. «Un mot de remerciement revient absolument au Président Morsi, qui a fait face à une situation pas simple […] pour sa capacité à prendre une décision d’une manière responsable…» Il faut rappeler que l’actuel chef de la diplomatie israélienne a proposé, en 1998, de bombarder le barrage d’Assouan en représailles au soutien accordé par l’Egypte à Yasser Arafat. Il n’est pas certain qu’au Caire, on apprécie ce retournement de Monsieur Lieberman.

Les Israéliens ont très vite refusé la médiation franco-qatarie pour, avec l’administration Obama, concentrer leurs efforts sur Morsi afin d’amener le Hamas, qui est issu de la Confrérie égyptienne, à accepter une trêve. Le calcul a payé. Obama, en l’appelant personnellement au téléphone à plusieurs reprises, lui a donné une stature internationale. Au plan régional, il a montré qu'il pouvait négocier avec Israël. Si les salafistes et les plus durs parmi les Frères musulmans affirment qu’il aurait dû adopter une attitude plus hostile envers Israël, dans l’ensemble, en Egypte, on considère qu’il a réussi à rétablir la stabilité dans la région. Reste à savoir combien de temps cela pourra durer.

Quel impact cela aura-t-il sur les relations israélo-égyptiennes ?
Pour Israël, le traité de paix israélo-égyptien est un élément fondamental à tous points de vue et, comme on vient de le voir, les dirigeants israéliens sont prêts à avaler de nombreuses couleuvres afin qu’il soit maintenu en l’état.

Le Hamas n'est-il pas en train de remplacer l'autorité palestinienne comme représentant privilégié des Palestiniens ? N'y a-t-il pas là une tactique volontaire d'Israël ?
Ce devrait être la prochaine crise. Le 29 novembre, Mahmoud Abbas demandera à l’Assemblée générale des Nations Unies la reconnaissance de la Palestine en tant qu’Etat non-membre de l’ONU, contre l’opposition d’Israël et de l’administration Obama.

Benjamin Netanyahu et Avigdor Lieberman ont déjà fait savoir qu’il y aura des représailles contre l’Autorité autonome. Un éditorialiste israélien a relevé que l’actuel gouvernement israélien préférait un dialogue indirect avec le Hamas – qui rejette l’existence d’Israël – à des négociations avec Abbas, car cela signifie faire des concessions territoriales en Cisjordanie.

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