Pakistan : un immense scandale de viols d'enfants secoue le pays
Plus de 280 enfants auraient subi des violences sexuelles. Le Premier ministre pakistanais a fait part de sa colère et demande une punition exemplaire des coupables.
Ce ne serait que la partie émergée de l'icerberg d'un phénomène largement répandu. Le Pakistan fait face à une terrible affaire de viols d'enfants. Au moins 280 enfants auraient subi des violences sexuelles.
La police pakistanaise a procédé, lundi 10 août, à de nouvelles arrestations. Ce scandale secoue l'ensemble du pays, de la classe politique jusqu'aux médias locaux qui se sont emparés de cette affaire.
Près de 400 vidéos sordides
L'affaire a éclaté après l'émergence de vidéos sordides tournées à partir de 2007. D’après The Nation, un quotidien local cité par Le Monde, près de 400 vidéos pédopornographiques ont été saisies dans le district de Kasur, dans la province du Pendjab. Elles mettent en scène environ 280 enfants, pour la plupart âgés de moins de 14 ans, du village d'Hussain Khanwala. Celui est situé à côté de Lahore, la deuxième ville du pays.
Les enfants y sont filmés alors qu'ils sont violés par un ou plusieurs hommes, dont 25 seraient impliqués au total, ou contraints à des rapports sexuels entre eux, ont indiqué Latif Ahmed Sara, un avocat représentant les victimes, et plusieurs médias.
Les familles des victimes traumatisées
Selon plusieurs témoignages, les coupables présumés ont essayé d'extorquer de l'argent aux parents de leurs présumées victimes, menaçant, en cas de refus, de vendre localement ces vidéos infamantes au prix modique de 40 roupies (30 centimes d'euro).
"Ils ont fait une vidéo de mon fils en 2011 et nous payons les maîtres-chanteurs depuis lors", affirme, sous couvert d'anonymat, la mère de l'une des victimes présumées.
Muhammad Akram, 60 ans, raconte avoir éclaté en sanglots en découvrant sur une vidéo son petit-fils en train d'être violé. "Il avait volé des objets de valeur et de l'argent à la maison pour payer les racketteurs", confie-t-il.
La police pointée du doigt
Latif Ahmed Sara accuse la police locale d'avoir depuis longtemps fermé les yeux et d'être de mèche avec les agresseurs. "La police protège les criminels, elle les soutient et leur a fourni le moyen de fuir le village", affirme-t-il.
Dans son rapport initial, la police avait conclu la semaine dernière que les accusations d'abus sur les enfants étaient "sans fondement". Le chef de la police locale, Shahzad Sultan, maintient que ce sont des vidéos d'actes sexuels entre jeunes "consentants", qu'un groupe d'hommes avait tournées il y a longtemps pour s'amuser. Selon l'un des agresseurs présumés interpellés, Amir, âgé de 25 ans, ces relations étaient consenties. "Ces vidéos sont authentiques, mais elles ont été faites pour le plaisir", a-t-il dit.
Le Premier ministre pakistanais en "colère"
Le Premier ministre Nawaz Sharif a fait part de sa "colère" et de sa "douleur", promettant "qu'aucun passe-droit" ne serait accordé aux coupables de cette affaire intervenue au cœur de son bastion électoral, le Pendjab. Les deux chambres du Parlement pakistanais ont voté à l'unanimité lundi des résolutions condamnant ces viols et requérant une punition exemplaire des coupables.
De son côté, Shahbaz Sharif, le chef de gouvernement de la province du Pendjab, où a éclaté le scandale, a demandé une enquête judiciaire indépendante. Mais la Haute cour de justice de Lahore a décliné la requête de Shahbaz Sharif, estimant que l'enquête était du ressort de la police déjà sur l'affaire.
L'intervention du Premier ministre pakistanais a tout de même mis la police sous pression. Les forces de l'ordre ont arrêté, mardi 11 août, cinq autres personnes, portant à 12 le nombre de personnes détenues dans le cadre de l'enquête.
3 500 affaires recensées dans le pays
Selon Mumtaz Hussain, au service de Sahil, l'une des principales ONG locales de défense des droits de l'enfant, plus de 3 500 affaires de ce type ont été recensées l'an dernier, mais le chiffre réel pourrait être de 10 000.
Plusieurs spécialistes locaux de l'enfance soulignent que les victimes taisaient le plus souvent les abus dont elles ont souffert pour ne pas souiller l'"honneur" de leur famille par cette "honte". Dans la société pakistanaise, la sexualité est un sujet tabou et ce silence favorise les abus, explique Samar Minallah, militant local des droits de l'homme. "C'est important de briser le silence", assure-t-il.
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