Mehdi Nemmouche, geôlier cruel au service de l'EI ?
C’était un secret précieusement gardé par les ex-otages français Didier François, Edouard Elias, Nicolas Hénin et Pierre Torres pour éviter tout risque de représailles sur leurs confrères américains James Folley et Steven Sotloff, exécutés depuis. Mehdi Nemmouche était leur geolier, un personnage décrit comme pervers, égocentrique et brutal.
C'est Nicolas Hénin qui raconte ses mois de captivité sous la surveillance de Mehdi Nemmouche. Dans un article qui doit paraître la semaine prochaine dans Le Point, le journaliste évoque un homme pour qui le djihad n’était finalement qu’un prétexte pour tenter d’assouvir sa soif de notoriété. La nuit, Medhi Nemmouche racontait aux otages les épisodes de Faites entrer l’accusé en espérant pouvoir devenir un jour le héros de l’émission. Avec un petit groupe de français, il terrorisait les prisonniers syriens et les assenait de coups jusqu’à la prière de l’aube, se souvient l'ex otage.
Mehdi Nemmouche avant le profil d'un "technicien de mort " (Eric Encel)
Pour Frédéric Encel, spécialiste du Moyen-Orient et maître de conférences à Sciences Po Paris, le profil de Mehdi Nemmouche n’est pas un cas isolé dans les rangs de ceux partis faire le djihad en Syrie. “Ce n’est pas la première fois que des djihadistes utilisent des gens qui sont psychologiquement , socialement ou identitairement fragiles et par conséquent malléables. Le fait d’utiliser des gens en provenance notamment d’Europe, très fraîchement convertis à l'islamisme radical et qui sont très manipulables, correspond à un matériau très apprécié pour les basses oeuvres, pour des oeuvres de techniciens de mort, de la part des chefs djihabdistes dans ces pays là ”, analyse-t-il sur France Info.
“Les gens qui sont convertis et qu’on a réussi à convertir à une forme de radicalité, c’est vrai pour l’islam et d’autres religions, (...) s’avèrent extraordinairement cruels. Regardez, toutes proportions gardées, les militants nazis : ce sont des gens qui étaient convertis de très fraîches dates à un fanatisme absolu et ce sont eux qu’on a retrouvé parfois gardiens de camps ”, poursuit-il.
Une stratégie "tortionnaire"
Il s’agit là d’une véritable stratégie, selon l’islamologue Mathieu Guidère. Une stratégie qui change de celle des groupes terroristes islamistes du Sahel ou du Magreb. “Cette organisation (l'Etat islamique) a d’abord créé des sections, des brigades, des unités réunissant des combattants par nationalité, d’abord pour éviter les problèmes et faciliter la coordination. Puis, elle a mis des personnes de ces origines là à la tête de ces sections; c’est plus facile pour les interrogatoires et la phase de négociations. Il s’est avéré que de tels individus avaient une haine encore plus grande à l’égard de leur compatriotes, (...) une haine encore plus forte que n’importe quel geôlier ", explique Mathieu Guidere sur France Info. L’Etat Islamique a une stratégie "qui fonctionne quasiment comme un état tortionnaire, avec une torture psychologique ”, ajoute-t-il.
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