La France a nommé mercredi un diplomate, ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy, comme nouvel ambassadeur en Tunisie
Boris Boillon, 41 ans, remplace l'ambassadeur sortant, Pierre Ménat, qui de source gourvernementale, sera prochainement appelé à d'autres fonctions. M. Boillon, arabophone, était depuis la mi-2009 ambassadeur en Irak.
Nicolas Sarkozy a reconnu lundi que Paris avait tardé à prendre la mesure de la situation qui a conduit Zine Ben Ali à fuir le pays.
Ménat paie ses erreurs de diplomatie
Selon Le Canard, le jour même de la fuite du dictateur, le 14 janvier, Pierre Ménat, 60 ans, en poste depuis 2009, avait adressé "à l'Elysée et à Matignon un télégramme" dans lequel il affirmait que "Ben Ali avait repris le contrôle de la situation". Alors que depuis octobre, "l'attaché militaire de l'ambassade" de France à Tunis avait alerté le ministère de la Défense sur "le délitement du système Ben Ali." Mais selon une source citée par l'AFP et ayant eu connaissance du télégramme de l'ambassadeur, ce dernier évoque à la fin de son message la possibilité que "rien ne soit joué".
Certains diplomates refusent de porter seuls la responsabilité des erreurs de la France et renvoient la balle vers la classe politique française, dont la proximité avec le régime Ben Ali a été maintes fois soulignée. Un ex-ambassadeur en Tunisie a assuré dans une tribune à Libération que les autorités politiques françaises étaient "parfaitement informées des dérives du système Ben Ali" et de l'évolution de la société, notamment du "mal-être de la jeunesse tunisienne". Selon Yves Aubin de La Messuzière, en poste à Tunis de 2002 à 2005, l'expertise des diplomates a été "négligée", écrit l'ex-ambassadeur, rappelant que Nicolas Sarkozy, en visite en 2008 à Tunis, s'était félicité "des progrès de l'espace des libertés publiques".
Ce n'est qu'après la chute de l'ex-président que les autorités françaises ont explicitement appuyé le mouvement populaire. Le président Nicolas Sarkozy avait reconnu, lors de sa conférence de presse du 24 janvier, que Paris avait "sous-estimé (les) aspirations du peuple tunisien à la liberté". Il y avait en Tunisie "une désespérance, un sentiment d'étouffer dont il faut le reconnaître, nous n'avions pas pris toute la mesure", avait ajouté le chef de l'Etat.
Il y a deux semauines, la ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, après plusieurs semaines d'embarras de la diplomatie française face à la montée de la contestation en Tunisie, avait proposé une aide policière au régime de Ben Ali. Ce qui lui avait valu des appels à démissionner de membres de l'opposition. Elle a reconnu mercredi sur RTL qu'elle s'était "peut-être mal exprimée". "J'ai été mal comprise", a-t-elle ajouté, assurant ne pas se sentir "affaiblie".
Les responsables français, de droite comme de gauche, ont souvent justifié leur appui à Zine Ben Ali par sa lutte efficace contre les islamistes.
Boillon, le plus jeune ambassadeur français
Le porte-parole du gouvernement, François Baroin, a qualifié mercredi Boris Boillon, le plus jeune ambassadeur français, de "diplomate de grande valeur (...) qui fait ses preuves dans le poste qu'il exerçait précédemment".
Il a "la sensibilité naturelle pour correspondre à la nouvelle ère qui s'ouvre dans relations franco-tunisiennes", a-t-il dit lors du compte rendu du conseil des ministres.
Boris Boillon a été conseiller de Nicolas Sarkozy alors qu'il était encore ministre de l'Intérieur puis a rejoint la cellule diplomatique de l'Elysée en 2007 comme spécialiste de l'Afrique du Nord et du Proche-Orient.
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