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L'un des plus célèbres opposants de gauche au régime du roi Hassan II est décédé jeudi à Marrakech à l'âge de 84 ans

Ex-membre du PC marocain, Abraham Serfaty avait participé à la fondation dans les années 70 de l'organisation d'extrême gauche Ila Al Amam (En Avant). Des dizaines de personnes ont participé vendredi à Casablaca à ses obsèques.Arrêté une première fois en 1972, il avait affirmé avoir été "sauvagement torturé". Il a passé au total 17 ans en prison.
Article rédigé par France2.fr avec AFP
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Abraham Serfaty le 21 septembre 2000 (AFP - ABDELHAK SENNA)

Ex-membre du PC marocain, Abraham Serfaty avait participé à la fondation dans les années 70 de l'organisation d'extrême gauche Ila Al Amam (En Avant). Des dizaines de personnes ont participé vendredi à Casablaca à ses obsèques.

Arrêté une première fois en 1972, il avait affirmé avoir été "sauvagement torturé". Il a passé au total 17 ans en prison.

Après sa première arrestation, il vit plusieurs mois dans la clandestinité avant d'être incarcéré à nouveau en 1974. Trois ans après, il est condamné à la prison à perpétuité sous l'accusation de "complot contre la sûreté de l'Etat". Il est alors proche des thèses indépendantistes du Front Polisario sur le Sahara occidental.

En 1991, il est libéré par roi Hassan II, père de l'actuel roi Mohammed VI, après une importance campagne internationale en sa faveur. Il est aussitôt expulsé du Maroc vers la France par le ministre de l'Intérieur de l'époque, Driss Basri, au motif qu'il était "ressortissant brésilien". Très connu dans les milieux politiques en France, Abraham Serfaty a bénéficié d'une intervention de Danièle Mitterrand, épouse du président français d'alors, auprès du palais royal.

En 2000, après l'intronisation de Mohammed VI, fils d'Hassan II, l'opposant est autorisé à rentrer dans son pays avec un passeport marocain. Il s'installe alors à Mohammedia (sud de Rabat) avec son épouse Christine-Daure, qui l'a toujours soutenu.

Issu d'une famille de juifs chassés d'Espagne en 1492, Abraham Serfaty restait un antisioniste convaincu. "J'irai d'abord en Palestine lorsqu'il y aura un Etat puis je passerai voir des amis juifs qui se trouvent en Israël", avait-il confié dans une interview en 2005.

"M. Serfaty était un militant qui avait consacré sa vie d'abord à la lutte anticoloniale puis contre le régime antidémocratique du roi Hassan II", a déclaré le vice-président de l'Association marocaine des droits humains (AMDH, indépendant), Amine Abdelhamid. Le ministre de la Communication Khalid Naciri, qui avait milité avec l'ancien opposant au sein du Parti communiste marocain, a lui aussi rendu hommage, à un militant "de la première heure qui s'est d'abord battu pour l'indépendance de son pays".

Réactions
La Ligue des droits de homme à Paris a salué jeudi la mémoire de l'ancien opposant "infatigable militant pour la justice et la liberté". Il "a subi la torture et l'emprisonnement dans les pires des bagnes, ce dont il portait les traces physiques", a souligné la LDH dans un communiqué.

L'écrivain français Gilles Perrault, qui avait décrit le combat d'Abraham Serfaty dans son livre "Notre ami le roi" (Gallimard 1990), toujours interdit au Maroc, s'est dit "bouleversé". L'opposant "a été victime d'une répression féroce, il a été torturé abominablement et n'a jamais lâché, jamais rendu les armes. C'était un homme éminemment estimable, que j'admirais beaucoup, et c'est l'un de ceux qui a le plus souffert du régime d'Hassan II", a-t-il déclaré.

La première secrétaire du PS, Martine Aubry, a fait part de son émotion la mort d'Abraham Serfaty, "militant infatigable des droits de l'homme, de la liberté et du progrès au Maroc".

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