Italie : trois questions pour comprendre le référendum crucial pour Matteo Renzi
L'objectif du scrutin de dimanche est de permettre au pays d'avoir un exécutif renforcé pour mettre fin à l'instabilité politique. Et pour peser sur ce référendum, le Premier ministre a lié son avenir au résultat.
Matteo Renzi va-t-il réussir son pari ? Le Premier ministre a lié son avenir politique au référendum constitutionnel, organisé dimanche 4 décembre, en Italie. Il demande à ses concitoyens de mettre fin au bicamérisme intégral, qui donne autant de pouvoir au Sénat qu'à la Chambre des députés, et entraîne une valse chronique des gouvernements depuis des décennies.
Il faut, argue l'ancien maire de Florence, que l'Italie mette fin à cette instabilité politique. Mais les électeurs s'intéresseront-ils à la question posée, ou préféreront-ils manifester leur mécontentement devant une reprise de la croissance bien trop faible pour changer leur vie quotidienne ? Franceinfo vous résume les enjeux de ce scrutin périlleux en trois questions.
Quelle est la question posée aux Italiens ?
Matteo Renzi veut bouleverser le système institutionnel mis en place en Italie le 1er janvier 1948. Le bicamérisme intégral donne aux sénateurs les mêmes pouvoirs qu'aux députés pour légiférer et pour voter la confiance au Premier ministre et à son gouvernement. Il convient, argumente Matteo Renzi, d'y mettre un terme pour asseoir un exécutif renforcé. L'incessante valse politique depuis la seconde guerre mondiale plaide en sa faveur : l'Italie a vu défiler 60 gouvernements depuis 1946.
Les 52 millions d'électeurs italiens sont donc invités à déterminer, par référendum, s'ils veulent la fin de ce régime de stricte égalité entre les deux assemblées, la réduction du nombre des sénateurs, la limitation du pouvoir des régions et la suppression des provinces, l'équivalent des départements français. Si le "oui" l'emporte, le Sénat passera de 315 membres élus au scrutin universel à 100 membres nommés.
Quelles seraient les conséquences d'une victoire du "non" ?
Au pouvoir depuis février 2014, Matteo Renzi a lié son sort à celui de cette réforme constitutionnelle, qu'il présente comme la bataille majeure de son mandat. Si le "oui" l'emporte, il se voit conforté. Si c'est le "non", hypothèse privilégiée par les sondages tant la situation économique est perçue comme "dramatique" par bon nombre d'Italiens, s'ouvrirait alors une nouvelle période d'instabilité, qui confirmerait paradoxalement le besoin de changer de système.
Le chef du gouvernement italien a exclu de prendre la tête d'un gouvernement "technique" chargé de bricoler une nouvelle loi électorale avant des élections anticipées. Et il a fait savoir qu'il n'était pas "de ceux qui s'accrochent à leur fauteuil". L'Italie entrerait donc une nouvelle fois en campagne législative.
Sur le plan économique, une victoire du "non" pourrait provoquer l'effondrement de Banca Monte dei Paschi di Siena, la troisième banque d'Italie, considérée comme la plus fragile des grandes institutions financières de la zone euro. L'établissement a besoin de lever des capitaux rapidement pour nettoyer son bilan et pourrait devoir y renoncer si s'ouvre une période d'instabilité. D'où, selon Reuters, un risque de contagion désastreuse par effet de dominos dans toute la zone euro. Une nouvelle crise financière mettrait à mal la croissance, timide en Italie, et au-delà, en Europe.
Qui bénéficierait d'un désaveu de Matteo Renzi ?
Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Déjà à la tête d'une trentaine de villes, les populistes du Mouvement 5 étoiles (M5S) comptent sur une victoire du "non" pour faire un pas de plus vers le pouvoir.
Dans la dernière ligne droite, la campagne s'est d'ailleurs durcie entre le leader charismatique du M5S, l'humoriste génois Beppe Grillo, et le centriste Matteo Renzi. Les invectives sont allées crescendo, Beppe Grillo allant jusqu'à qualifier le Premier ministre de "truie blessée", après des sondages défavorables. Le fondateur du M5S n'a jamais mâché ses mots et son désormais célèbre "Vaffanculo" ("Va te faire foutre"), adressé à la classe politique lors d'un rassemblement en 2007, avait lancé le mouvement.
"Si le 'non' l'emporte, nous irons aux élections", n'a cessé de proclamer Beppe Grillo à longueur de meetings, tout au long du "TreNo Tour", la tournée en train qui a conduit ses partisans, "les Grillini", à travers toute l'Italie pour plaider la cause du "non". Et les appels à voter "oui" du président américain Barack Obama ou de la chancelière allemande Angela Merkel ont alimenté sa verve "anti-système".
Galvanisé par le Brexit et la victoire de Donald Trump, le mouvement assure être capable de prendre les rênes du pays en cas de victoire lors des législatives anticipées. Il a réussi, en tout cas, a être le plus visible des partis favorables au "non", dans un éventail allant de l'extrême droite à l'extrême gauche.
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