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Pollution: les bonnes intentions de New Delhi torpillées par la réalité

Aucune des solutions lancées par la municipalité indienne de New Delhi – 18 millions d'habitants – pour endiguer la pollution, n'a abouti. Ni la journée sans voiture du 22 octobre organisée dans l'indifférence générale, ni le paiement d'une taxe pour les camions qui traversent la ville, dont l'application devait entrer en vigueur le 1er novembre 2015. Motif invoqué: un manque de personnel formé.
Article rédigé par Véronique le Jeune
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le trafic des camions est à l'origine d'un tiers de la pollution de New Delhi. Mais faire payer une taxe aux poids-lourds s'avère très difficile. (MONEY SHARMA / AFP)

On l'oublie souvent, New Delhi est la capitale la plus polluée du monde, affichant le plus haut niveau de particules fines PM2,5, supérieur à celui de Pékin. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) l'a placée en tête de son palmarès depuis 2014.

On comprend pourquoi les autorités locales aimeraient sortir de ce hit parade peu glorieux. Mais, à Delhi, où pourtant un tiers des enfants souffrent de problèmes respiratoires, de troubles de la concentration et de carences en vitamine D à cause de la pollution atmosphérique, les décisions prises au sommet ne sont pas suivies d'effet garanti. Ainsi, le plan expérimental d'un péage de 700 roupies (10 euros) pour les véhicules commerciaux et de 1.300 roupies (18 euros) pour les camions, approuvé par la Cour suprême indienne, n'a pu être mis en pratique comme prévu le 1er novembre 2015.

Le personnel des péages souvent malmené par les automobilistes
«Nous n'avons pas appliqué la nouvelle taxe verte... Il y a toujours trop de confusion, pas de communication adéquate ni de personnel formé ni d'instructions sur les cartes mensuelles», a justifié un responsable de la société sous-traitante, chargée de la collecte. Tandis qu'un autre affirmait dans le quotidien Hindustan Times que cette collecte «pourrait s'avérer impossible dans le futur». En cause, la sécurité du personnel des péages souvent malmené par les automobilistes.

Selon le Centre for Science and Environment (CSE), basé dans la capitale indienne, les camions représentent un tiers de la pollution à Delhi ; leurs émissions s'ajoutent au cocktail déjà très nocif de rejets industriels et de poussières des chantiers de construction. Certes, les poids lourds sont interdits de circulation dans la ville pendant la journée mais, chaque soir dès 20h, plus de 50.000 d'entre eux entrent dans la mégapole.

Au total, plus de 8,5 millions de véhicules circulent à Delhi et 1.400 nouvelles automobiles s'ajoutent chaque jour au trafic. Le 22 octobre était organisée la première «journée sans voiture» mais, planifiée un jour férié, elle n'a guère eu d'écho.

Chaque événement polluant rend la situation de plus en plus irrespirable
Autre point noir: la capitale indienne connaît chaque année une détérioration de la qualité de l'air à l'approche de l'hiver, quand les agriculteurs des Etats voisins se mettent à brûler le chaume après les récoltes.

Les feux allumés par les plus pauvres pour se réchauffer aggravent encore la situation tandis qu'à Diwali, la fête hindoue des lumières, célébrée cette année mi-novembre, correspond fréquemment à un pic de pollution en raison des jets incessants de pétards et de feux d'artifice.

Une grande campagne pédagogique de sensibilisation du public devra un jour ou l'autre figurer au menu des élus de New Delhi, soucieux, tout comme le gouvernement indien, de donner des gages d'efficacité dans la lutte contre le réchauffement, à la veille de la COP 21.

L'Inde lance le premier indice de la qualité de l'air de son histoire 

En avril 2015, un premier pas était franchi avec le lancement d'un indice de qualité de l'air dans dix villes indiennes. «L'indice de la qualité de l'air (AQI) pourrait donner une impulsion majeure à l'amélioration de la qualité de l'air dans les zones urbaines, car il va améliorer la prise de conscience du public sur la nécessité d'atténuer la pollution atmosphérique», disait à l'époque le ministre de l'Environnement Prakash Javadekar. 

L'incapacité pour les autorités de New Delhi d'imposer un nouveau péage aux camions et utilitaires montre néanmoins que la route vers la responsabilisation des citoyens risque d'être encore longue.

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