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Génération Born Free : "Le temps de Mandela est terminé"

REPORTAGE MULTIMEDIA | Ils n'ont pas connu le régime de l'apartheid et se souviennent à peine de l'élection de Nelson Mandela. Les Sud-africains les ont appelés les "Born free". Mais s'ils revendiquent leur liberté, les jeunes étudiants de Johannesburg ne se sentent pas reconnus et doivent faire face à un chômage record.
Article rédigé par Antoine Krempf
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

Nelson
Mandela "est simplement un vieux monsieur. Ce n'est pas dieu ". Le
discours de Feke tranche avec les images de la Mediclinic de Pretoria depuis le 8 juin dernier et
l'hospitalisation de "Madiba". La jeune femme de 18 ans dit aussi son
"profond respect pour celui qui s'est battu pour notre pays ", mais
elle a autre chose à penser.

C'est aujourd'hui qu'elle s'inscrit en première année d'Art dramatique à la prestigieuse université du Witwatersand (ou Wits) de Johannesbourg. Comme elle, ils sont une quinzaine de jeunes à patienter devant la porte d'entrée. "Avec nos amis, on ne discute pas vraiment de la santé de Mandela. On se concentre surtout sur les études et les sorties. Je dirais même que Madiba est la dernière de nos priorités ", renchérit Zwani.

"Comment savoir où l'on va ?"

Ces jeunes appartiennent à la génération des "Born free", nés après la fin de l'apartheid. De Nelson Mandela, ils connaissent ce que leur ont dit leurs professeurs. "J'ai étudié Madiba pendant dans mon manuel d'Histoire il y a deux ans. Mais, ils ne m'ont pas donné beaucoup d'informations. On nous a juste dit : il s'est battu pour la paix et il a passé 27 ans en prison. J'ai appris récemment qu'il était aussi avocat ", explique Amujela.

En l'occurrence, Nelson Mandela a passé cinq ans à étudier le droit sur les bancs de la fac que le jeune homme s'apprête à fréquenter. "C'est le problème des 'Born Free' : on ne sait pas vraiment d'où l'on vient. Alors comment savoir où l'on va ?

"Ils ne comprennent rien à notre monde "

Mais pour la plupart des futurs étudiants présents, le passé ne vaut pas vraiment la peine. A eux seuls, les moins de 24 ans représentent près de 25% de la population sud-africaine. Et un fossé semble s'être creusé entre ceux qui ont connu l'apartheid et les plus jeunes, baignés dans la société de consommation depuis l'ouverture des frontières du pays.

"SI nous sommes là aujourd'hui grâce à ce que Mandela a fait. Nous sommes la génération qui doit prendre cet héritage pour aller plus loin. Les anciens ont l'esprit trop étroit. Nous vivons au 21e siècle, ils ne comprennent rien à notre monde. Ils sont dépassés par la technologie. Nous on peut faire et avoir tout ce qu'on veut maintenant ", affirme Nsuku, smartphone en main et casque par dessus le bonnet.

"On peut faire beaucoup d'argent"

Une apparente liberté qui a un prix pour les "Born free". D'après la dernière livraison de l'Agence de statistiques sud-africaine, le taux de chômage a dépassé les 25% en Afrique du Sud au premier trimestre. Et sept demandeurs d'emplois sur dix ont moins de 25 ans... D'où l'importance des études pour les familles qui peuvent assumer une facture moyenne de 30.000 rands (2.300 euros) pour une première année à l'université du Wits.

Un investissement que Teshapalela compte bien monnayer : "Avec mon diplôme d'ingénieur chimiste, j'espère partir aux Etats-Unis. On peut faire beaucoup d'argent là-bas. Ici, même quand on est qualifié, on est mal payé. " Le jeune homme dit avoir retenu une phrase de Mandela : "Allez-y maintenant. Le futur n'est promis à personne. "

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