Les résultats d'un sondage pour franceinfo sur l’accueil des migrants en France montrent "un déclin des valeurs de solidarité"
"Mieux la France accueillera ces migrants et plus on arrivera à réduire les craintes, les fantasmes et les peurs", a estimé vendredi sur franceinfo Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité.
Six Français sur dix estiment que la France accuielle trop de migrants, selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour franceinfo et Le Figaro. "La multiplication des discours de responsables politiques (...) alimente les peurs et les fantasmes", a dénoncé, vendredi 29 juin sur franceinfo, Florent Gueguen, le directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité.
franceinfo : Êtes-vous surpris par les résultats de ce sondage ?
Florent Gueguen : Non, c'est un sondage qui est évidemment inquiétant parce que ça montre quand même un déclin des valeurs de solidarité et d'hospitalité. Nous subissons en réalité la multiplication des discours de responsables politiques ou gouvernementaux qui dénoncent, selon nous de manière infondée, des effets supposés d'appel d'air, des effets supposés, qui n'existent pas, de "submersion migratoire". Quand on a la répétition de ces discours notamment dans les médias, évidemment on fait infléchir l'opinion et on alimente les peurs et les fantasmes car il s'agit bien de fantasmes. Nous étions en 2017 à 100 000 demandeurs d'asile en France pour un pays de 67 millions d'habitants. On est très très loin d'avoir atteint la capacité d'accueil et d'acceptabilité en France. L'Allemagne en a accueilli un million en 2015 et 2016.
Les résultats du sondage peuvent-ils s'expliquer par une certaine déconnexion d'avec le réel ?
Quand on ouvre un centre d'accueil, très souvent on a des réactions d'hostilité des habitants et des riverains, parfois des manifestations, pendant les premières semaines. Et puis, ensuite, comme les choses se passent bien neuf fois sur dix, vous avez une situation d'indifférence. Et puis vous avez l'opinion locale qui se retourne et on voit des personnes qui s'opposaient au projet d'accueil et qui deviennent souvent des aidants, des bénévoles, aux associations qui gèrent ces établissements et qui gèrent l'accueil.
Nous voyons aussi beaucoup de choses positives. Il y a beaucoup de Français qui s'engagent bénévolement dans les associations d'accueil des migrants. On voit aussi beaucoup de familles françaises qui s'engagent dans des réseaux d'entraide et qui accueillent chez elles des personnes migrantes, donc il ne faut pas non plus noircir le tableau. Il y a toute une partie du pays qui est solidaire avec l'accueil des migrants et qui considère que la France a un devoir d'hospitalité et de solidarité à l'égard de personnes qui sont victimes des guerres et de la grande pauvreté.
Les images de camps insalubres peuvent choquer aussi.
Nous pensons que ce qui explique les résultats de ce sondage, ce sont aussi les conditions d'accueil assez dégradées qui sont proposées aux migrants en France et qui renvoient une image négative de l'immigration. Parce qu'effectivement, quand on voit dans les médias des images de campements indignes et des personnes en situation d'extrême détresse, on comprend que l'opinion publique puisse s'inquiéter et puisse considérer à tort que la France n'est plus en capacité d'accueillir ces personnes. Mais le raisonnement est assez simple : mieux la France accueillera ces migrants et plus on arrivera à réduire les craintes, les fantasmes et les peurs.
Pourtant, les dirigeants disent s'appuyer sur l'opinion et craindre une montée des extrêmes en raison de l'immigration.
C'est vrai qu'il y a une crainte de la montée de l'extrême droite en Europe et que cela agite beaucoup les gouvernements. Mais, quand nous disons que ces peurs et ces fantasmes sont infondés, je veux relever par exemple les résultats d'une enquête qui a été publiée par le CNRS la semaine dernière et qui disait très clairement que l'immigration en Europe a plutôt des effets positifs sur les économies. Les années où il y a un pic migratoire, on voit plutôt un PIB en augmentation, un taux de croissance en augmentation. On voit que l'immigration n'a pas d'impact négatif sur la situation du chômage et n'a pas d'impact négatif non plus sur la dépense publique. Donc, on est bien quand même dans la production de fantasmes et finalement quand même, souvent, un manque de courage des gouvernements parce qu'il faut faire de la pédagogie.
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