: Témoignages "Si les troupes russes arrivent, je me poserai la question" : les Français en Ukraine hésitent à fuir le pays après l'invasion de la Russie
Nous avons pu joindre des Français installés depuis longtemps dans le pays qui nous décrivent les scènes d'exil.
"Franchement, on a franchi un palier, Vladimir Poutine remet en cause l'existence même de l'Ukraine." Jérémie, expatrié en Ukraine depuis quinze ans, travaille dans la logistique. Impossible de trouver le sommeil, il a écouté le discours de Vladimir Poutine tôt dans la matinée ce jeudi 24 février. Le président russe a annoncé une "opération militaire" en Ukraine pour, selon lui, défendre les séparatistes de l'est du pays, malgré les sanctions infligées par l'Occident. "Je pense qu'il n'y a plus aucune limite, estime Jérémie. On est à la merci de ses décisions et personne ne sait ce qu'il va faire."
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Une série d'explosions ont été entendues à Kiev où est installé Jérémie, les sirènes d'alarme anti-bombardement ont retenti. Il décrit l'atmosphère autour de lui, de la tension mais pas de panique : "On a compris que l'espace aérien est bloqué et juste quarante minutes après, on a entendu trois ou quatre explosions. Depuis, Kiev est calme, je suis même allé faire des courses et il y a beaucoup de gens au supermarché qui font des provisions pour les prochains jours."
"On a aussi le problème des distributeurs qui commencent à ne plus avoir d'argent et dans beaucoup d'endroits, on ne peut plus payer par carte bleue."
Jérémie, Français vivant à Kievà franceinfo
Dans la nuit de mercredi à jeudi, la France a appelé ses ressortissants se trouvant en Ukraine à devoir "quitter sans délai ce pays". Jérémie n'a pour l'instant pas pris de décision. Il hésite, lui, qui tôt ce matin dit avoir été témoin d'un véritable exode, des habitants de Kiev qui partent vers l'ouest du pays en voiture. Des voisins qui visent la frontière avec la Pologne, la Hongrie ou la Slovaquie. "J'ai pu voir un défilé de voitures à partir de 6 heures du matin, raconte-t-il. Je pense qu'il va y avoir un problème sur tout ce qui est carburant pour arriver à la frontière avec la Hongrie ou la Slovaquie."
Même hésitation du côté de Benoît qui vit, lui, à Dnipro dans le sud-est du pays. Il a entendu deux grosses explosions ce matin et a demandé aux 400 salariés des Ukrainiens de rester chez eux. Il ne veut pas se retrouver dans les longues files de voitures sur les routes. "Si j'ai l'opportunité de partir et que les troupes russes arrivent sur Dnipro, je me poserais la question de partir, déclare-t-il. Ce que j'entends, c'est que les troupes sont vers Marioupol."
"J'ai deux valises qui sont prêtes, j'ai une voiture dont le plein a été fait, après on verra."
Benoît, Français vivant à Dniproà franceinfo
Inquiet mais pas paniqué, Benoit, comme beaucoup, scrute les nouvelles à la télévision et sur son portable.
De son côté, Nadim Saadeh, un entrepreneur français, a décidé jeudi matin de suspendre l'activité de sa société spécialisée dans l'électronique et de quitter Kiev en voiture, direction Varsovie en Pologne avec plusieurs collègues français : "Nous sommes dix au total dans trois voitures. Nous n'avons pas d'enfants ce qui a rendu la décision plus facile. Nous souhaitons atteindre Varsovie et puis prendre un vol vers Paris."
L'entrepreneur décrit ce qu'il voit autour de lui depuis l'autoroute embouteillée en direction de la frontière polonaise. "Sur la route, on voit des scènes que l'on n'aurait pas imaginées avec des embouteillages monstres, des gens qui partent en marchant avec des sacs à dos et des bagages. Il y a aussi des convois militaires qui vont vers Kiev avec des provisions, des blindés légers, des soldats ou encore des lances missiles. En trois heures, on n'a pas fait beaucoup de kilomètres, on a fait le plein d'essence, des provisions, de quoi manger."
"Je ressens une très profonde tristesse de voir Kiev et la population ukrainienne dans cet état. Ce pays ne mérite pas ça."
Nadim Saadeh, entrepreneur françaisà franceinfo
"Kiev ce matin était une ville triste, une ville d'exode, poursuit Nadim Saadeh. Il y a de très longues queues devant les banques ou les magasins d'alimentation. Je pense que les gens ne s'y attendaient pas même si ça fait plusieurs jours qu'on en parle."
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