: Témoignage Guerre en Ukraine :"J'ai perdu mon frère d'armes, mon ami et mon fils", confie le père d'un volontaire mort à Bakhmout
"Danylo n'avait jamais eu affaire à des armes de près ou de loin ou peut-être seulement, enfant, quand il jouait avec son sabre de bois", raconte son papa Boris Denisevich, réalisateur de films d'animation. L'histoire de Danylo Denisevich est celle d'un enfant de 21 ans plein de sensibilité et de fantaisie, élevé par ses parents artistes près de Kiev. Et qui n'aurait jamais dû se retrouver à la guerre. Il y est pourtant parti dès les premières heures de l'invasion russe, avec son père.
"Moi, j'ai tout de suite décidé de m'engager, confie Boris, de retour à Kiev. J'ai essayé de dissuader Danylo d'en faire autant, mais il fait son sac sans rien dire et il est parti avec moi. Dès le 24 février, nous avons rejoint la défense terroriale". Il y aura les premiers combats pour défendre Kiev, puis le père et le fils sont recrutés par l'armée, rapidement envoyés vers le Donbass et l'enfer de Bakhmout, à l'est de l'Ukraine. Boris servira sur le front-même, Danylo sera affecté à l'arrière, dans les bureaux du quartier général.
Père et fils avaient un projet d'école de cinéma
Mais la mort ne frappe pas toujours là où on l'attend le plus. "Ce sont deux drones Shahed qui leur sont tombés dessus, et voilà… Mon commandant est venu m'annoncer qu'il y avait 99 % de probabilité que Danylo ait été tué", se souvient Boris.
"J'ai essayé de lui téléphoner, je me suis raccroché à ce 1% de chance mais au bout d'une demi-journée, j'ai réalisé qu'il ne répondrait pas".
Boris Denisevichà franceinfo
Cinq hommes sont morts dans cette frappe russe. Boris, lui, a perdu bien plus ce jour-là : "Danylo, c'était mon meilleur ami, depuis son enfance. À vrai dire, j'ai perdu en même temps mon frère d'armes, mon ami… Et mon fils".
Le père et son fils avaient des projets ensemble, des films à réaliser, une école de cinéma pour les enfants qu'il voulaient ouvrir. "Malheureusement, il va falloir revoir tous ces plans, mais on ne va pas baisser les bras, on va continuer à vivre et à créer. C'est une évidence !" Ce qui console Boris, c'est que la guerre n'aura pas changé Danylo. Jusqu'au bout, à Bakhmout, il aura continué à composer de la musique qu'il envoyait à sa mère et à ses amis, continué aussi à voir de la lumière et de l'art dans l'un des endroits les plus sombres de cette guerre.
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