: Reportage Guerre en Ukraine : "Nous voulions rester jusqu'au bout", témoignent les derniers civils qui fuient Irpin
La ville d'Irpin, au nord-ouest de Kiev (Ukraine), a été en partie détruite par l'offensive russe et a subi de nouveaux combats mardi. Parmi les derniers habitants à quitter la ville, les soignants et les plus fragiles.
À Irpin, à 30 kilomètres au nord-ouest de Kiev (Ukraine), un flot de réfugiés se presse à la sortie de la ville pour fuir les bombardements. Dans cette ville stratégique, qui permettrait aux Russes de s'approcher de la capitale ukrainienne, des combats ont encore eu lieu mardi 8 mars. Une partie de la ville est en ruine et plusieurs civils ont été tués dans les jours précédents.
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Une forêt de pin, une rivière, un pont miné par les Ukrainiens pour ralentir l’avancée des Russes, une planche en bois en travers du courant pour aider les réfugiés à traverser, à quitter Irpin, leur ville, là derrière. Leur ville défigurée. Un flot de réfugiés se presse à la sortie de la ville pour fuir les bombardements. Irpin, à 30 kilomètres au nord-ouest de Kiev, est une ville stratégique qui permettrait aux Russes de s'approcher de la capitale ukrainienne, des combats ont encore eu lieu mardi 8 mars. Une partie de la ville est en ruine et plusieurs civils ont été tués dans les jours précédents.
Les derniers civils tentent donc de fuir. Ils laissent derrière eux une ville défigurée. "Presque toutes les maisons de notre quartier sont détruites. Alors on a pris seulement quelques affaires et on est parties", raconte Valentina, 74 ans, qui peut à peine marcher. Avec sa fille Svetlana, elles se traînent sur la route avec leur petite valise. "Mon mari a vu beaucoup de civils tués dans la rue", assure Svetlana, tandis que les tirs d’artillerie résonnent de part et d’autre de la rivière.
"Il y a des tirs partout dans la ville, plus de gaz, plus d'électricité... C'est très dangereux."
Svetlana, habitante d'Irpin qui fuit vers l'Ouestà franceinfo
Des policiers et des militaires tentent de maîtriser le flux de réfugiés, mais la confusion règne : de vieilles personnes impotentes peinent à escalader le talus, des voitures venues de Kiev viennent chercher leurs proches, des ambulances démarrent en trombe... "On évacue tous les blessés vers Kiev. Depuis trois jours, on ne fait que ça", explique une femme.
Dans la cohue, une petite femme énergique marche plus vite que tout le monde. "Je ne voulais pas partir parce que je ne voulais pas laisser mon chat. Mais j’ai demandé à la voisine de me le garder", sourit Véra, 69 ans. "Là, je vais à Lviv pour retrouver mon fils et sa femme", glisse-t-elle comme si celui-ci se trouvait juste derrière la forêt de pins. Pourtant, Lviv est à plus de 500 kilomètres.
"Ceux qui comprennent, ils prient Dieu"
Dans le flot des réfugiés, on aperçoit des blouses blanches sous les gros manteaux. "Nous somes les soignants de l'hôpital, raconte Alexandra, endocrinologue à l'hôpital, entourée de quelques collègues. Nous voulions rester jusqu'au bout mais plus rien ne fonctionne sur place. Plus d'eau, plus d'électricité, plus de gaz. Nous avons réussi à nous échapper de la ville mais nous ne savons pas si nos autres collègues vont pouvoir nous rejoindre. Il y a des bombes là-bas et il y a encore des civils blessés à soigner. Je n'ai pas de mots... pas de mots."
Dans ce cortège de malheurs, beaucoup de vieilles personnes. Comme ce couple, un homme et une femme âgés de 85 ans. "On a marché quatre kilomètres dans la neige. Mon mari est presque aveugle et on ne sait pas où aller. On n’a pas d’enfant, pas de famille. On suivait nos voisins mais on les a perdus de vue. On est seuls", glisse-t-elle en avançant. Derrière eux, encore des personnes âgées, encore plus mal en point. Un hospice d’Irpin vient d’être évacué. Une vieille dame est transportée dans une brouette, une autre dans un charriot de supermarché, les bras ballants, l’air hagard. "Beaucoup de nos pensionnaires ne comprennent pas ce qu’il se passe. Et ceux qui comprennent, ils prient Dieu", témoigne Lydia, une infirmière à l'hospice.
À l’arrière d’une ambulance, debout, un vieux monsieur au visage impassible, le regard dans le vide. C’est peut-être la dernière fois qu’il voit la ville d’Irpin.
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