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Guerre en Ukraine : Kiev a fait des "erreurs stratégiques" en décidant "d'allonger cette offensive", selon l'ancien officier Guillame Ancel

À l'approche de l'hiver, l'Ukraine craint des frappes russes sur ses infrastructures énergétiques. Dans le même temps, la situation s'enlise sur le front et profite aux Russes, estime Guillaume Ancel, auteur du blog "Ne pas subir".
Article rédigé par franceinfo - Aurore Richard
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
La ville d'Odessa, dans le sud de l'Ukraine, a été visée par des frappes dans la nuit du 5 au 6 novembre 2023. (NINA LIASHONOK / AVALON / MAXPPP)

Des frappes russes sur Odessa, une grande ville du sud de l'Ukraine, ont fait au moins huit blessés et endommagé notamment un musée d'art dans la nuit du dimanche 5 au lundi 6 novembre, selon des responsables ukrainiens. L'Ukraine, en difficulté en ce moment, redoute de voir Moscou lancer des attaques systématiques sur ses infrastructures d'énergie, comme l'hiver dernier. Cela avait imposé des coupures de chauffage et de courant à des millions de personnes. Les informations publiées dans les médias occidentaux, faisant état d'un échec de la contre-offensive ukrainienne ou de tiraillements au sommet du pouvoir à Kiev, ne sont pas passées inaperçues à Moscou. Pour Guillaume Ancel, ancien officier et écrivain, auteur du blog Ne pas subir, le temps joue clairement pour la Russie.

Guillaume Ancel, invité mardi 7 novembre sur franceinfo, a attribué cet enlisement sur le front à des "erreurs stratégiques" des Ukrainiens. "Contrairement à ce que les alliés leur avaient conseillé, ils ont décidé de prendre du temps, d'allonger cette offensive. Cette grande offensive est devenue une longue offensive. Pourtant, les alliés les avaient prévenus qu'ils avaient des réserves seulement jusqu'en octobre. Or là, on voit bien qu'ils sont dans un moment de creux parce qu'ils ont utilisé ces réserves et que les Russes n'ont pas cédé comme ils l'espéraient, notamment dans la région de Zaporijia", explique l’ancien officier.

L’écrivain s’interroge malgré tout sur les moyens que l’Ukraine avait ou non pour mener une contre-offensive plus rapide, comme le préconisaient les alliés. Sur la question de l’armement, il note que les alliés en avaient promis plus qu’ils n’en ont fourni, tout comme les munitions.

"On a tous en tête les débats sans fin pour savoir s’il faut fournir des chars, ensuite des avions. Tout cela aurait dû être fait dès le début"

Guillaume Ancel, ancien officier

à franceinfo

Un élément peut faire évoluer la situation et donner une réelle capacité de frappe aux Ukrainiens dans les mois à venir d’après lui : l’arrivée d’avions de combat F16, même si cela ne devrait pas entraîner de changement radical sur le front. Avec cette livraison de F16, "est-ce que le soutien à l’Ukraine sera suffisant pour qu’il puisse reprendre cette offensive ou est-ce que, en collision avec la guerre au Proche-Orient, en Israël, le soutien des 50 pays alliés de l’Ukraine, peut s’affaiblir ?", questionne l’auteur du blog Ne pas subir. Dans ce dernier cas, Guillaume Ancel estime que cela mènerait à "une sorte de no man’s land, un gel du front et une possibilité de négociations, ce qui serait assez infâme de reconnaître à la Russie qu’elle a le droit de s’emparer et d’envahir contre toute légalité".

L'Ukraine doit-elle ouvrir un nouveau front ?

Par ailleurs, face à cet enlisement, des voix divergentes se font entendre ces derniers jours en Ukraine, notamment du côté de l’état-major. Guillaume Ancel souligne déjà la différence avec la Russie car lorsque Prigojine s’est rebellé, "il a eu un léger problème de transport en avion", dit-il en référence à la mort de l'ancien chef de la milice Wagner. "En Ukraine, qui "est une vraie démocratie […] quand le chef d’état-major des armées a dit estimer être dans une impasse, Zélensky ne dément pas, il répond oui, et qu’il faut trouver des alternatives". Pour l’ancien officier, cela signifie ouvrir un deuxième ou un troisième front, soit dans la région de Kherson, soit plus à l’Est. À condition, dit-il, que les alliés continuent de soutenir l’Ukraine, sachant aussi que "la Russie ne dirige absolument plus rien dans cette guerre".

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