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Explosion d'un missile en Pologne : comment l'origine d'un tel tir est-elle déterminée ?

Plusieurs dirigeants ont expliqué, mercredi, que le missile tombé mardi près de la frontière ukrainienne ne relevait vraisemblablement pas d'une "attaque intentionnelle" russe. Explications.

Article rédigé par Thibaud Le Meneec
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Des enquêteurs polonais près du lieu de l'explosion d'un missile à Przewodow (Pologne), le 16 novembre 2022. (ARTUR WIDAK / ANADOLU AGENCY / AFP)

Et l'escalade fut évitée, du moins pour l'instant. Au lendemain de l'explosion meurtrière d'un missile dans le village de Przewodów, dans l'est de la Pologne, les dirigeants occidentaux ont provisoirement écarté, mercredi 16 novembre, la thèse d'un tir volontaire de la Russie. "Notre analyse préliminaire suggère que l'incident a été probablement causé par un missile de système ukrainien de défense anti-aérienne tiré pour défendre le territoire ukrainien contre les missiles de croisière russes", a expliqué Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l'Otan, lors d'une conférence de presse dans la matinée.

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Pour privilégier la piste d'un tir de défense ukrainien, il se base sur les premiers éléments d'une enquête entamée mardi soir et dont il n'a pas souhaité communiquer les détails. Mais comment les autorités polonaises, ainsi que les équipes de l'Alliance nord-atlantique, ont-elles procédé pour aboutir à ces conclusions provisoires ? De quelle manière la trajectoire et la provenance d'un missile sont-elles déterminées ?

Des avions spéciaux capables de suivre les missiles

Comme lors d'un crash d'avion, les enquêteurs se rendent sur les lieux de l'explosion du missile pour collecter de précieuses informations. Dans un premier temps, dans les débris, "il faut identifier le type de missile et éventuellement le lanceur", explique Léo Peria-Peigné, chercheur au centre des études de sécurité de l’Institut français des relations internationales (Ifri). Mais cette première phase matérielle n'est pas "une tâche facile", prévient le spécialiste des questions d'armement, "car les débris sont rarement en bon état".

Dans le cas du missile qui est tombé en Pologne, peu de doutes subsistent sur le fait qu'il s'agisse d'un système de défense sol-air S-300. Ces derniers, de fabrication soviétique, sont utilisés par les Russes mais aussi par les Ukrainiens. Dans d'autres cas, l'utilisation de systèmes de défense et de missiles distincts peut grandement faciliter le travail des enquêteurs.

"Si les enquêteurs disposent d'un numéro de série d'un débris, c'est bien plus facile."

Léo Peria-Peigné, chercheur à l'Ifri

à franceinfo

Mais l'enquête "au sol" n'est pas le seul moyen pour les autorités de déterminer d'où provient le missile – et agir en conséquence. Dans le cadre de l'Otan, des avions spéciaux patrouillent dans le ciel des pays membres de l'Alliance nord-atlantique pour y rendre compte de l'activité aérienne, quelle qu'elle soit. C'est le rôle d'une flotte de Boeing E-3A, dotés d'un système aéroporté de détection et de contrôle (Awacs), qui patrouillent en Europe.

Un avion Awacs de l'Otan, dans le ciel allemand, le 13 juin 2019. (CHRISTOPHE GATEAU / DPA / AFP)

"Les Awacs sont des avions radars, qui peuvent détecter la trace du missile, ainsi que sa vitesse, sa portée et sa taille", précise Léo Peria-Peigné. "En réalité, la résolution de ces avions est telle qu'ils peuvent même traquer des volées d'oies", expliquait au média CBC (en anglais) Walter Dorn, du Collège militaire royal du Canada.

"Cartes du ciel et relevés satellite"

Un responsable militaire de l'organisation a confirmé à CNN (en anglais), mardi, que le missile avait été suivi par l'un de ces avions Awacs, en vol au-dessus de la Pologne au moment de l'impact. Rien d'étonnant à cela : depuis l'invasion russe en Ukraine, en février, les avions Awacs multiplient la surveillance des régions proches du territoire ukrainien. "Les informations recueillies par la traque, via un radar, du missile ont été fournies à l'Otan et la Pologne", selon le responsable cité par CNN.

D'autres outils existent enfin pour permettre de mener à bien la trajectographie, autrement dit l'étude des trajectoires, notamment des missiles. "Il faut regarder les faits de manière très précise, regarder les informations, les cartes du ciel, voir les relevés satellite, expliquait mercredi un conseiller de l'Elysée à l'AFP. C'est une affaire sur laquelle on ne peut pas se tromper."

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