Cet article date de plus de deux ans.

En Russie, des artistes s'organisent pour dénoncer la guerre en Ukraine

Malgré le risque de perdre leur emploi ou d'être emprisonnés, des artistes russes protestent contre la guerre menée par Vladimir Poutine en Ukraine. Des cinéastes ont notamment créé un collectif et réalisent des courts-métrages pour dénoncer l'invasion russe.

Article rédigé par franceinfo - Claire Leys
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Animator against war. (CAPTURE D'ÉCRAN YOUTUBE)

En Russie, les citoyens qui osent protester contre l'invasion de l'Ukraine sont systématiquement arrêtés. L'État réprime toute forme de contestation et pourtant des voix s'élèvent. Notamment celles d'artistes russes. Ils savent qu'ils risquent de finir en prison mais pour eux, il est temps que la peur change de camp.

>> Suivez l'évolution de la guerre en Ukraine dans notre direct 

Sur YouTube, un nouveau compte a fait son apparition et il cumule déjà des milliers de vues. Il s'agit des "Animator against war" ("Les cinéastes d'animations contre la guerre"). Près de 200 Russes en font partie, des dessinateurs, graphistes, des ingénieurs du son aussi. Ensemble, ils créent des courts métrages pour dénoncer l'invasion de l'Ukraine.

Daria est à l'initiative du projet. Certains de ses amis ont été arrêtés en marge d'actions artistiques pacifiques à Moscou. "Nous pleurons avec l'Ukraine, c'est notre devoir de dire : 'S'il vous plait, arrêtez la guerre !' , lance la cinéaste. Cette guerre était la plus grande peur de beaucoup de Russes et c'est arrivé. Pour moi, c'est comme le grand désastre. Rien ne peut être pire que ça. Mais ce désastre a tué notre peur."

"C'est très dangereux de protester dans la rue mais on y va parce que la situation mérite que je prenne le risque d'être arrêtée."

Daria, membre des "Animators against war"

à franceinfo

Au-delà d'afficher son désaccord, l'artiste espère aussi lutter contre la propagande du gouvernement. En Russie, à la télé, les mots "attaque" ou "invasion" sont bannis et l'État ukrainien est diabolisé. "Nos vidéos et nos photos, j'espère qu'elles seront vues car en Russie certains citoyens ne sont pas persuadés que cette guerre est injuste. On veut s'adresser à eux en priorité et nous ne sommes qu'une voix parmi tant d'autres."

"C'est un crime en Russie de dire stop à la guerre"

Nadya Svirskaia, une Moscovite de 44 ans fait aussi partie du mouvement des cinéastes d'animation contre la guerre. Elle sait que l'art ne pourra pas arrêter les blindés russes. D'ailleurs ses amis ukrainiens n'ont pas tous compris son projet de court-métrages. "On a décidé de continuer parce qu'on n'a pas beaucoup d'autres manières d'exprimer nos opinions, explique l'artiste. C'est un crime en Russie de dire stop à la guerre. On a reçu beaucoup de réactions chaleureuses d'autres citoyens qui ont essayé de résister et ne savent pas comment s'exprimer. Maintenant, ils se sentent moins seuls et je pense que c'est important."

"Quand on a plus de voie légale pour protester, on peut encore se servir de l'art, j'espère que personne n'ira en prison pour ça mais ce qui est sûr c'est que l'on peut perdre nos emplois."

Nadya Svirskaia

à franceinfo


Malgré le danger, les artistes se mobilisent aussi dans la rue. À Moscou, ses amis ont par exemple recouvert des arbres de messages contre la guerre en Ukraine.

Des artistes Moscovites ont recouvert des arbres de messages contre la guerre en Ukraine. (DR)

L'une des participantes a été arrêtée par la police. "Nous sommes effrayés mais il faut continuer de protester car cette guerre, c'est la pire chose qui pouvait nous arriver", estime Nadya Svirskaia. Certains cinéastes d'animations ont reçu des pressions de la part de leurs studios. S'ils s'expriment, c'est la porte. Nadya Svirskaia assure également que le Musée d'Arts modernes de Moscou s'apprête à licencier plusieurs employés pour avoir signé une lettre ouverte des travailleurs russes de la culture et de l'art contre la guerre avec l'Ukraine. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.