Irlande : ce que l'on sait des violences survenues à Dublin après une attaque au couteau qui a fait plusieurs blessés

Jeudi soir, des voitures de police et des bus ont été incendiés dans la capitale irlandaise. Plusieurs commerces ont aussi été pillés. Le gouvernement a pointé la responsabilité de "groupes d'extrême droite".
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Un véhicule et un bus incendié lors de violences à Dublin (Irlande), le 23 novembre 2023. (PETER MURPHY / AFP)

La capitale de l'Irlande a vécu "une extraordinaire explosion de violence", jeudi 23 novembre, dans la soirée, selon le commissaire Drew Harris. Pendant plusieurs heures, un quartier du centre de Dublin a été le théâtre de violences et de heurts avec les forces de l'ordre imputés par la police à l'extrême droite. Drew Harris a ainsi décrit "des scènes que nous n'avions pas vues depuis des décennies". Ces violences sont intervenues après une attaque à l'arme blanche en début d'après-midi à Dublin. Un homme armé d'un couteau a blessé cinq personnes, dont trois jeunes enfants, avant d'être arrêté sur place. Franceinfo fait le point sur ce que l'on sait de cet enchaînement d'événements.

Une attaque au couteau en début d'après-midi

D'après les premiers éléments de l'enquête, un homme muni d'un couteau a agressé plusieurs personnes vers 13h30 (heure locale) à Parnell Square. "Il semble s'agir d'une attaque isolée dont nous devons déterminer les raisons", a déclaré Liam Geraghty, le responsable de la police locale.

Selon des témoins, l'agression a eu lieu près d'une école, à un moment où des élèves sortaient de l'établissement. Une témoin a expliqué à la radio et télévision publique RTE que des passants ont réussi à désarmer l'assaillant et à le plaquer au sol. D'après Micheal Martin, le vice-Premier ministre irlandais, c'est un livreur qui s'est interposé pour mettre fin à l'attaque.

Une ambulance est arrivée trois à quatre minutes après les faits, selon la témoin interrogée par RTE. Cinq personnes ont été blessées, dont une femme et trois enfants. Ils ont tous été transportés vers plusieurs hôpitaux, a précisé la police, ajoutant que la femme et une petite fille de 5 ans étaient "sérieusement" blessées.

Le suspect, âgé d'une cinquantaine d'années d'après la police, a été arrêté sur place. Aucune information sur son identité n'a été communiquée. A ce stade, les enquêteurs excluent le motif terroriste. La police ne cherche "personne d'autre", a précisé Liam Geraghty. 

Des secours interviennent après une attaque à l'arme blanche à Parnell Square à Dublin (Irlande), le 23 novembre 2023. (@NAOISEOMUIRI / TWITTER / AFP)

De violents heurts avec la police dans la soirée

Dans la soirée, des violences ont également éclaté dans un quartier de Dublin où vivent notamment des immigrés, sur fond de rumeurs sur l'origine du suspect dans l'attaque au couteau. Des voitures de police ou encore des bus ont été incendiés et plusieurs commerces ont été pillés, selon un journaliste de l'AFP sur place.

Les forces de l'ordre ont également été visées par des projectiles d'émeutiers, dont certains avaient des pancartes "Irish Lives Matter" ("Les vies irlandaises comptent") et des drapeaux du pays. "Des Irlandais sont attaqués par ces ordures", a lancé une personne dans les heurts, tandis que d'autres dans la foule évoquaient le meurtre d'une jeune enseignante par un ressortissant slovaque, récemment condamné à la prison à vie.

Plusieurs centaines de personnes étaient présentes lors de ces heurts, d'après l'AFP. Certains ont tenu des propos hostiles envers "les médias mainstream". Jusqu'à 400 policiers ont été mobilisés dans la soirée. Aucun blessé grave n'a été signalé, selon un responsable policier. Plus tard jeudi soir, la police a annoncé que les rues du centre de Dublin étaient de nouveau "essentiellement calmes".

Plus de 30 personnes interpellées

Le commissaire Drew Harris a annoncé que la police avait arrêté 34 personnes, et que "beaucoup d'autres arrestations interviendront" au fil de l'enquête. Parmi les 34 suspects déjà interpellés, 32 étaient attendus au tribunal vendredi matin. Le responsable policier a évoqué une "faction de hooligans dingues mus par une idéologie d'extrême droite" pour décrire les émeutiers. "Des groupes d'extrême droite ont exacerbé la situation", a-t-il insisté. L'Irlande, confrontée à une crise du logement, a en effet vu se développer un discours anti-immigration sous l'influence de figures extrémistes.

Les émeutiers ayant visé les forces de l'ordre encourent jusqu'à 12 ans de prison, a souligné Helen McEntee, la ministre irlandaise de la Justice, auprès de RTE. Celle-ci a précisé que la police allait visionner de nombreuses images de vidéosurveillance, de nombreux émeutiers n'ayant pas couvert leurs visages. D'après Drew Harris, 13 commerces ont été endommagés ainsi que 11 véhicules de police. Trois bus ont été également dégradés. 

Des agents nettoient les débris d'un bus brûlé par des émeutiers, le 24 novembre 2023 à Dublin (Irlande). (PAUL FAITH / AFP)

Un discours de fermeté par les autorités

Le Premier ministre irlandais, Leo Varadkar, a dénoncé vendredi les actes des émeutiers : "Ces gens affirment défendre les ressortissants irlandais. (...) Ils mettent en danger les plus innocents et vulnérables, a-t-il déclaré à la presse. Ils font honte à Dublin, honte à l'Irlande, honte à leurs familles et à eux-mêmes." Le leader du gouvernement centriste a promis d'utiliser "toutes les ressources de la loi, toute la machine de l'Etat pour punir ceux qui sont impliqués". Il a également annoncé une prochaine modernisation des lois sur l'exploitation des images de vidéosurveillance et de lutte contre "la haine".

"Je pense que certaines personnes ont avec certitude instrumentalisé les événements de l'attaque contre les enfants très rapidement pour organiser ce qui s'est passé la nuit dernière", a également déclaré vendredi le vice-Premier ministre irlandais, Micheal Martin, lors d'un point-presse. "Ce n'est pas ce que nous sommes en tant que peuple", a-t-il assuré, ajoutant que l'Irlande "a construit une société moderne et inclusive"

Le gouvernement a salué l'action de la police dans les rues de la capitale jeudi. Selon les autorités, les forces de l'ordre n'auraient pas pu "anticiper" un tel niveau de violence en réaction à l'attaque au couteau.

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