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Européennes 2014: le jour d'après
«Le jour d’après» un film catastrophe en 2004. Signé par un spécialiste du genre l’Américain Roland Emmerich. Le thème du film: un nouvel âge de glace allait s’abattre sur la Terre. Et bien sur l’idée européenne, cette glaciation s’est bien abattue. Dans les urnes et par le choix des électeurs. Le nouveau Parlement européen devrait compter près de 140 eurodéputés hostiles à l'Europe d'aujourd'hui.
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Alors par quoi commencer pour ces premières analyses forcément succinctes, car le calendrier européen ne s’est pas achevé hier au soir. Votons pour la participation !
Un coup d’arrêt à l’abstention
Le président du Parti Populaire européen (droite et centre droit) Joseph Daul l’a dit hier soir à Bruxelles: «Nous avons endigué le développement de l’abstention.» Et c’est un fait, les chiffres 2014 de la participation (43,11 %) correspondent à ceux de 2009 à quelques centièmes près. Demeurent des disparités très fortes entre les pays. Sur ce point deux remarques, les très mauvais chiffres de la participation dans les pays issus du bloc de l’Est et donc relativement nouveaux dans l’Union européenne. Avec en Pologne, en Croatie, en République Tchèque ou en Slovaquie, des taux carrément catastrophiques (moins de 25% de votants). L’idée européenne ne fait pas recette.
Et puis, surprise, dans les pays touchés par la crise et fortement impactés par les décisions européennes, Grèce, Espagne ou Italie, on a plus voté que dans bien d’autres Etats membres. Exemple en Grèce, ou le taux de participation frise les 57%. Le sentiment d’appartenance à l’Union demeure donc très fort malgré la crise ou à cause de la crise.
La montée des eurosceptiques
Cette montée était annoncée, prévue. Mais elle n’est pas homogène. Entre les membres d’Aube Dorée en Grèce qui va envoyer des parlementaires à Strasbourg et les britanniques de l’UKIP de Nigel Farradge, il n’y a rien de commun. Le clan des eurosceptiques partira à la bataille divisée. Pour faire simple, il y aurait les eurosceptiques et les europhobes, deux clans qui ne travailleront pas ensemble. Exemple avec les Italiens de la Ligue du Nord qui pourraient rejoindre un groupe nouveau constitué autour du Front national et quitter celui des Conservateurs et réformistes européens. Les premières grandes manœuvres devraient débuter dès aujourd’hui.
Mais le succès de Marine Le Pen en France fait l’effet d’un véritable séisme politique, la presse européenne s’en faisant l’écho ce matin. A noter enfin que le succès de l’extrême-droite ou des populistes s’est fait sentir également en Autriche ou au Danemark où le Parti populaire, formation anti-immigration arrive en tête.
Enfin à gauche aussi, les eurosceptiques ont effectué quelques percées, en Grèce avec Syriza (sans doute 6 sièges), et en Espagne avec l’arrivée du Parti Podemos né de la mouvance des indignés et qui pourrait envoyer cinq parlementaires au Parlement européen.
Les grands équilibres
Les grands équilibres demeurent. Le Parti Populaire européen (PPE), qui regroupe la droite conservatrice et une partie du centre droit, demeure le premier groupe politique avec en principe 212 sièges devant les socialistes 186 parlementaires. Troisième groupe, les libéraux, 70 sièges puis les Verts qui subissent de grosse défaites en France et en Allemagne, mais reçoivent des renforts venus par exemple du Royaume-Uni. Le chiffre des élus peut encore évoluer. En effet, apparaissent également dans ce Parlement version 2014 de nouveaux petits partis qui vont faire sans doute l’objet d’avances plus ou moins couronnées de succès. Où iront par exemple les élus du parti anti-euro allemand, l’AFD, dans quel groupe siègeront Les indignés espagnols? Tout cela demeure donc un rien hypothétique, ce qui n’empêche pas de se poser la question. Ce scrutin va-t-il permettre de dégager un vrai candidat pour la présidence de la Commission européenne?
Les grandes manœuvres
On sait une partie des Etats membres désireux de continuer de choisir à leur manière le Président de la Commission européenne. Après tout, son boulot c’est de mettre en musique les grandes orientations politiques décidées par le chefs d’Etat et de gouvernements. Seulement voilà, depuis le Traité de Lisbonne, ils sont censés proposer des candidats en tenant compte du résultat du scrutin européen. Les grands partis avaient désigné leurs candidats, ils ont fait campagne et c’est peut-être une des raisons qui ont permis d’endiguer l’abstention. Et c’est au Parlement européen d’élire, en principe en juillet prochain, le futur président. Pour cela, il lui faudra regrouper 376 suffrages sur son nom. Il y aura donc des négociations qui s’annoncent difficiles. Entre groupes politiques.
Jean-Claude Junker paraît faire la course en tête à l’image du PPE. Mais la différence entre les deux grands groupes n’est pas énorme. Les chefs d’Etats et de gouvernement, Angela Merkel en tête, qui dînent ensemble ce mardi, pourraient bien sortir de leur chapeau de façon parfaitement anti-démocratique un nouveau candidat. On murmure les noms de Christine Lagarde, de Pascal Lamy pour n’en citer que deux. Si tel était le cas, la crise politique pourrait être gravissime pour l’Union européenne. Et le Parlement européen nouvellement élu serait déjà face à sa véritable capacité politique et démocratique. Résister ou avaler la couleuvre.
Et puis, faut-il le rappeler, d’autres postes sont en jeu… Celui du président du Parlement européen traditionnellement partagé entre les socialistes et les conservateurs, celui de la Haute Représentante de l’UE pour l’Action extérieure, bref de quoi continuer à discuter, à négocier. Des jeux de billard à plusieurs bandes qui s’annoncent.
Le cas français
Il faut bien terminer par là. Entre erreurs de casting, petites cuisines internes cuites et désormais recuites, les partis traditionnels ont loupé hier la marche. Le PS n’en finit pas de payer la politique de François Hollande, même si en nombre de sièges il n'y a pas trop de dégâts. L’UMP, elle, sanctionne Hollande mais perd des voix oubliant elle aussi que ce scrutin était censé parler d’Europe. Et à l’arrivée c’est Marine Le Pen qui gagne. Avec une campagne «européenne» puisqu’il s’agissait de tirer à boulets rouges sur l’Europe.
Résultat des courses, la France renouvelle à presque 50% son personnel politique au Parlement (38 nouveaux sur 74). Or, on sait que ce Parlement ça s’apprend si l’on veut y exister et être efficace. C’est une évidence, la France va sortir affaiblie de ce scrutin. Mathématiquement, vu le nombre des europhobes et politiquement.
Certains parlementaires expérimentés et spécialistes dans leur domaine disparaissent. Ainsi Jean-Paul Gauzès, connu dans toute l’Europe mais pas à Paris, pour ses compétences dans les dossiers bancaires et que l’UMP n’avait placé que troisième dans le Nord-Ouest. Ainsi Catherine Trautmann qu’une bonne âme au PS avait décidé de rétrograder seconde derrière le syndicaliste Edouard Martin dans l’Est de la France.
Et puis, dernier point, que va peser cette France lorsqu’il s’agira de lutter contre les partisans du tout Bruxelles ? L’Alsace ne va compter qu’une seule députée européenne. Une jeune femme qui va d’abord devoir faire ses preuves. Catherine Trautmann qui dirigeait la Task force pro-Strasbourg disparaît des écrans radars. Qui va défendre le siège du Parlement européen à Strasbourg donc accessoirement en France?
Les temps de glace sont peut-être effectivement venus sur la France et sur l’Union européenne. Et pourtant que d’échéances devant ce Parlement européen… mais ça, c’est une autre histoire et… un autre article sur Géopolis.
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